Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler l'arrêté du 21 mars 2018 par lequel le maire de la commune de Longeville-les-Metz a délivré un permis de construire une maison d'habitation à M. D..., ensemble le rejet de son recours gracieux le 2 juillet 2018.
Par un jugement n° 1805456 du 18 février 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a sursis à statuer sur sa demande et imparti à la commune de Longeville-les-Metz et à M. D... un délai de quatre mois pour régulariser le permis de construire litigieux.
La commune de Longeville-les-Metz a transmis au tribunal un permis de construire de régularisation délivré à M. D... le 17 juin 2021.
Par un jugement n° 1805456 du 22 juillet 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté la demande de M. A....
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 21 septembre 2021, le 27 février 2023, et le 28 mars 2023, M. C... A..., représenté par Me Enckell, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement avant-dire droit du tribunal administratif de Strasbourg du 18 février 2021, ainsi que le jugement du 22 juillet 2021 mettant fin à l'instance ;
2°) d'annuler le permis de construire du 21 mars 2018 ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Longeville-les-Metz et de M. D... la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les jugements sont irréguliers en l'absence de réponse au moyen tiré du détournement de pouvoir ;
- le permis de construire litigieux est entaché d'un détournement de pouvoir qui ne peut donner lieu à régularisation ;
- le permis de construire est illégal en raison du détournement de pouvoir entachant le plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Longeville-les-Metz ;
- il méconnaît l'article 3 de la zone 1AUH du règlement du PLU et de l'orientation d'aménagement et de programmation n° 3 du PLU concernant l'accessibilité du terrain.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 25 février 2022, le 15 mars 2023 et le 14 avril 2023, M. B... D..., représenté par Me Gillig, conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3.2 du règlement du PLU est inopérant ;
- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 4 mars 2022 et le 15 mars 2023, la commune de Longeville-les-Metz, représentée par Me De Zolt, conclut au rejet de la requête ou, subsidiairement, qu'il soit fait application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, et demande que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'article 3.2 du règlement du PLU n'est pas applicable s'agissant d'une voie qui n'est pas nouvelle ;
- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Berthou,
- les conclusions de M. Meisse, rapporteur public,
- et les observations de Me Lehmann, substituant Me De Zolt, représentant la commune de Longeville-les-Metz et de Me Erkel, représentant M. D....
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté en date du 21 mars 2018 le maire de la commune
de Longeville-les-Metz a accordé à M. D... un permis de construire une maison individuelle sur un terrain cadastré section 2 n° 168, sis rue des Chenêts à Longeville-les-Metz. M. A..., en sa qualité de voisin immédiat, a formé le 14 mai 2018 contre cet arrêté un recours gracieux qui a été rejeté le 2 juillet 2018. Par un jugement avant dire droit du 18 février 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a sursis à statuer sur sa demande d'annulation de cet arrêté dans l'attente de la régularisation du vice tiré de l'incompétence du maire, celui-ci étant intéressé à l'affaire. Par un arrêté du 17 juin 2021 le maire nouvellement élu de la commune de Longeville-les-Metz a accordé un permis de régularisation et la demande de M. A... a ensuite été rejetée par le tribunal administratif de Strasbourg par son jugement du 22 juillet 2021 mettant fin à l'instance. M. A... demande à la cour d'annuler ces deux jugements du 18 février et du 22 juillet 2021 ainsi que le permis de construire accordé le 14 mai 2018 à M. D....
Sur la régularité des jugements :
2. Le tribunal a répondu de manière suffisante aux points 22 et 23 de son jugement du 18 février 2021 aux moyens tirés du détournement de pouvoir dans le classement de la parcelle litigieuse en zone 1AUh du PLU et dans la délivrance du permis de construire litigieux. Ce moyen d'irrégularité est, par suite, inopérant à l'encontre du jugement du 22 juillet 2021 mettant fin à l'instance. Par suite, le moyen d'irrégularité tiré de l'omission à statuer doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement du 18 février 2021 :
3. Lorsqu'un tribunal administratif, après avoir écarté comme non fondés des moyens de la requête, a cependant retenu l'existence d'un vice entachant la légalité du permis de construire, de démolir ou d'aménager dont l'annulation lui était demandée et a alors décidé de surseoir à statuer en faisant usage des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme pour inviter l'administration à régulariser ce vice, l'auteur du recours formé contre ce jugement avant-dire droit peut contester le jugement en tant qu'il a écarté comme non fondés les moyens dirigés contre l'autorisation initiale d'urbanisme et également en tant qu'il a fait application de ces dispositions de l'article L. 600-5-1.
4. En premier lieu, aux termes de l'article 3, relatif aux accès et voirie, de la partie du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Longeville-les-Metz applicable à la zone 1AUH: " 3.1 Accès : / Pour être constructible, toute unité foncière doit être desservie par une voie (publique ou privée) ouverte à la circulation automobile, dans des conditions répondant à l'importance et à la destination de l'immeuble ou de l'ensemble d'immeubles à édifier, notamment en ce qui concerne la commodité de la circulation et des accès, et l'approche des moyens de lutte contre l'incendie (...) / 3.2 Voirie / Les nouvelles voies publiques ou privées, ouvertes à la circulation automobile, doivent être de caractéristiques proportionnées à l'importance de l'occupation et de l'utilisation des sols envisagées. / (...) Les nouvelles voies en impasse doivent être aménagées de manière à permettre aux véhicules privés et publics de faire aisément demi-tour. Le règlement de collecte des déchets, présent en annexe du dossier de PLU, fixe des gabarits effectifs selon le mode de collecte. ".
5. L'autorité compétente et, en cas de recours, le juge administratif doivent s'assurer qu'une ou plusieurs voies de desserte du terrain d'assiette du projet pour lequel un permis de construire est demandé permettent de satisfaire aux exigences posées par les règles d'urbanisme citées ci-dessus. A cette fin, pour apprécier les possibilités de desserte du terrain pour le propriétaire ou les tiers, il incombe à l'autorité compétente et au juge de s'assurer de l'existence d'une desserte suffisante de la parcelle par une voie ouverte à la circulation publique et, le cas échéant, de l'existence d'un titre créant une servitude de passage donnant accès à cette voie. Il résulte par ailleurs des dispositions des articles L. 1424-2 à L. 1424-4 du code général des collectivités territoriales que les services publics d'incendie et de secours sont, dans le cadre de leurs missions de protection et de secours, en droit d'intervenir sur tout le territoire de la commune, sans que puisse leur être opposé le caractère privé des voies qu'ils doivent emprunter. Dès lors, pour apprécier les possibilités d'accès de ces services au même terrain d'assiette, il appartient seulement à l'autorité compétente et au juge de s'assurer que les caractéristiques physiques d'une voie de desserte permettent l'intervention de leurs engins, la circonstance que cette voie ne serait pas ouverte à la circulation publique ou grevée d'une servitude de passage étant sans incidence.
6. D'une part, la voie de desserte en impasse du terrain d'assiette de l'opération litigieuse est constituée du chemin existant depuis la rue des Chenêts. Par suite, les dispositions précitées de l'article 3.2 du règlement du PLU, applicable aux seules voies nouvelles, ne trouvent, en l'espèce, pas à s'appliquer.
7. D'autre part, il n'est pas sérieusement contesté que la largeur de ce chemin est d'environ trois mètres sur toute sa longueur jusque l'accès de la parcelle n° 168 sans que les limites de parcelles ne puissent être considérées comme un obstacle au cheminement des engins des services publics d'incendie et de secours. Par ailleurs, ses caractéristiques répondent suffisamment aux dimensions et à la destination de la maison à édifier, notamment en ce qui concerne la commodité de la circulation et des accès. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le projet litigieux méconnaîtrait les dispositions précitées de l'article 3.1 du règlement du PLU.
8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 152-1 du code de l'urbanisme : " L'exécution par toute personne publique ou privée de tous travaux, constructions, aménagements, plantations, affouillements ou exhaussements des sols, et ouverture d'installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan sont conformes au règlement et à ses documents graphiques. / Ces travaux ou opérations sont, en outre, compatibles, lorsqu'elles existent, avec les orientations d'aménagement et de programmation ". Il résulte de ces dispositions qu'une autorisation d'urbanisme ne peut être légalement délivrée si les travaux qu'elle prévoit sont incompatibles avec les orientations d'aménagement et de programmation (OAP) d'un plan local d'urbanisme et, en particulier, s'ils en contrarient les objectifs. Cette compatibilité s'apprécie en procédant à une analyse globale des effets du projet sur l'objectif ou les différents objectifs d'une orientation d'aménagement et de programmation, à l'échelle de la zone à laquelle ils se rapportent.
9. L'OAP n° 3 du PLU prévoit que " Le développement de la zone devra obligatoirement s'intégrer avec le réseau routier. Il s'appuiera sur le chemin existant entre la rue des Chenets et la rue des Coteaux, élargie pour devenir une voie de desserte du cœur d'ilot. Une placette de retournement en bout d'impasse permettra aux véhicules de faire aisément demi-tour (...) ".
10. Il ressort des pièces du dossier que le projet litigieux respecte l'emplacement réservé inscrit au PLU devant permettre à terme l'élargissement du chemin et la création d'une placette de retournement en bout d'impasse. Par suite, le moyen tiré de l'incompatibilité du projet avec l'OAP n° 3 doit être écarté.
11. En troisième et dernier lieu, il ressort des pièces du dossier que M. D... a signé, le 3 juillet 2014, un compromis de vente avec l'épouse de l'ancien maire portant sur le terrain d'assiette du projet en litige et comportant une condition suspensive relative à l'obtention d'un document d'urbanisme purgé de tout recours. Il est constant que la parcelle en cause était alors située dans une zone classée à urbaniser 1AUHb, constructible sous réserve de la mise en œuvre d'une opération concernant au moins 40 % de la zone comprenant une douzaine de parcelles. La suppression de cette exigence a été opérée lors de la modification du règlement applicable à la zone par la modification n° 4 du PLU du 20 septembre 2016 sur la base du constat, objectivé dans la note de présentation de la modification, d'un morcellement des propriétés et d'une rétention foncière peu propice à un aménagement d'ensemble. La parcelle a ensuite été classée par le nouveau PLU adopté le 19 décembre 2017 en zone 1AUH, conservant la même vocation que dans le précédent PLU et correspondant donc à un secteur ouvert à l'urbanisation, encadré par une OAP et à destination principale d'habitat, sans exigence de réalisation d'opération d'ensemble. Cette ouverture à l'urbanisation apparaît par ailleurs cohérente avec le projet d'aménagement et de développement durable qui préconise largement la densification des quartiers et l'urbanisation des coteaux et avec le rapport de présentation et l'OAP n° 3. Il ressort ainsi des pièces du dossier que tant la modification du règlement de la zone opérée en septembre 2016 que le classement de la parcelle en secteur 1AUH n'ont pas été décidés pour des motifs étrangers à l'urbanisme et à l'intérêt général. De même et par conséquent, le maire, qui n'a fait qu'appliquer ces dispositions pour accorder le permis de construire litigieux, n'a pas agi pour des motifs différents. Ainsi, la seule circonstance que la vente du terrain a été conclue le 20 mai 2019, postérieurement à la délivrance du permis de construire litigieux, ne suffit pas, à elle seule, à caractériser l'existence d'un détournement de pouvoir. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré du détournement de pouvoir doit être écarté, de même et en tout état de cause que celui tiré du détournement de pouvoir entachant le PLU.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation du permis de construire délivré le 21 mars 2018 à M. D....
Sur les frais de l'instance :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Longeville-les-Metz et de M. D..., qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance, les sommes que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... les sommes demandées par la commune de Longeville-les-Metz et M. D... à ce même titre.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Longeville-les-Metz et M. D... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à la commune de Longeville-les-Metz et à M. B... D....
Délibéré après l'audience du 27 mars 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Wurtz, président,
- Mme Bauer, présidente-assesseure,
- M. Berthou, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 avril 2025.
Le rapporteur,
Signé : D. BERTHOULe président,
Signé : Ch. WURTZLe greffier,
Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au préfet de la Moselle en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier :
F. LORRAIN
N° 21NC02541 2