Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'établissement public Voies Navigables de France a demandé au tribunal administratif de Nancy de liquider l'astreinte fixée par le jugement du tribunal administratif de Nancy n° 1802380 du 30 décembre 2019 à la charge de M. A... B... auquel il était enjoint de procéder à l'enlèvement de son bateau " Solvay 79 " stationné sans autorisation.
Par un jugement n° 2200729 du 21 décembre 2023, le tribunal administratif de Nancy a condamné M. B... à verser la somme de 29 000 euros à Voies Navigables de France pour la période du 27 septembre 2020 au 30 novembre 2023.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 22 février 2024, 4 octobre 2024, 4 novembre 2024 et 14 avril 2025, M. B..., représenté par Me Labrusse, demande à la cour :
1) d'annuler ce jugement du 21 décembre 2023 du tribunal administratif de Nancy ;
2)°de rejeter les demandes présentées par Voies navigables de France.
Il soutient que :
- il ne peut plus être poursuivi dès lors qu'il n'est plus propriétaire du bateau " Solvay 79 " qu'il a cédé ; il ne peut pas lui être reproché de ne pas avoir procédé aux formalités de publicité prescrites par l'article L. 4121-2 du code des transports pour rendre la vente opposable aux tiers car il appartient à l'acquéreur de le faire ; en tout état de cause, l'établissement Voies navigables de France était informé de la vente ; la société ML Etudes et Réalisations qui appartient à son père, a depuis vendu le 2 novembre 2024 le bateau " Solvay 79 " à l'euro symbolique à la société BFA Automobiles et cette vente a été enregistrée ;
- Voies navigables de France l'empêche d'exécuter le jugement et ne lui laisse pas d'autre choix que de détruire le bateau ; cet empêchement du fait de VNF justifiait le rejet de sa demande devant le tribunal administratif et en tout état de cause la réduction importante du taux journalier de l'astreinte ;
- le montant de l'astreinte n'est pas justifié ; le taux journalier de 25 euros pour liquider l'astreinte retenu par le tribunal administratif est surévalué au regard des particularités de l'espèce ; VNF qui refuse le déplacement de son bateau et qui n'a jamais répondu à ses interrogations pour procéder au déplacement du bateau, pouvait mettre en œuvre les dispositions de l'article L. 2132-9 du code général de la propriété des personnes publiques qui lui permet de procéder d'office à l'enlèvement du bateau ; alors qu'il a toujours cherché des solutions et que finalement ce bateau a été un gouffre financier, il serait inéquitable de le condamner au paiement d'une astreinte aussi importante.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 4 juin 2024, 4 novembre 2024 et 14 décembre 2024, l'établissement Voies navigables de France, représenté par Me Caron, de la société CLL Avocats conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) au rejet de toutes les demandes de M. B... ;
3°) à la mise à la charge de M. B... d'une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
L'établissement public fait valoir que :
- l'acte de vente du 1er mai 2019, qui n'a pas été enregistré et n'a pas fait l'objet d'un certificat d'immatriculation au nom du nouveau propriétaire, n'est pas opposable à Voies navigables de France de sorte que c'est à bon droit que les premiers juges ont mis à la charge de M. B... la somme de 29 000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte ;
- le requérant ne démontre pas que VNF l'a empêché de déplacer son bateau ; d'ailleurs, contrairement aux allégations du requérant, le bateau voisin n'est pas frappé d'une quelconque interdiction de déplacement mais est également en situation irrégulière et son évacuation est demandée par VNF ;
- il n'appartient pas à VNF mais au contrevenant, qui a fait preuve d'une passivité totale, d'initier les démarches ;
- si la modulation de l'astreinte relève du pouvoir d'appréciation du juge, la présente situation ne justifie pas une baisse ou une suppression de l'astreinte ;
- le taux journalier de 25 euros n'est pas disproportionné.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- les conclusions de M. Denizot, rapporteur public,
- et les observations de M. B..., entendu à titre exceptionnel, représentant son fils M. A... B... et D..., pour Voies navigables de France.
Considérant ce qui suit :
1. Par un jugement du 30 décembre 2019 remis à M. B... par acte d'huissier de justice le 26 août 2020, le tribunal administratif de Nancy, saisi par Voies navigables de France, a enjoint à M. B... de procéder à l'enlèvement de son bateau " Solvay 79 " du canal de la Marne au Rhin, aux environs du point kilométrique 177,825, rue Gabriel Peri commune de Varangéville, dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, et ce, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de l'expiration de ce délai. Ce jugement a été confirmé par un arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 29 décembre 2021. Par un procès-verbal établi le 16 décembre 2021 par un agent assermenté de Voies navigables de France et qui fait foi jusqu'à preuve du contraire, il a été constaté que M. B... n'avait pas pris les mesures nécessaires pour exécuter le jugement du tribunal du 30 décembre 2019. Saisi par Voies navigables de France, le tribunal administratif de Nancy a, par un jugement du 21 décembre 2023, liquidé l'astreinte en ramenant le taux journalier à 25 euros, et condamné M. B... à verser la somme de 29 000 euros à Voies Navigables de France pour la période du 27 septembre 2020 au 30 novembre 2023. M. B... relève appel de ce jugement.
2. Le juge administratif, lorsqu'il fait droit à une demande tendant à la libération d'une dépendance du domaine public irrégulièrement occupée, enjoint à l'occupant de libérer les lieux sans délai, une telle injonction prenant effet à compter de la notification à la personne concernée de la décision du juge. Si l'injonction de libérer les lieux est assortie d'une astreinte, l'astreinte court à compter de la date d'effet de l'injonction, sauf à ce que le juge diffère le point de départ de l'astreinte dans les conditions qu'il détermine. Lorsqu'il a prononcé une telle astreinte, il incombe au juge de procéder à sa liquidation, en cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive de l'injonction. Le juge saisi aux fins de liquidation d'une astreinte n'a pas le pouvoir de remettre en cause les mesures décidées par le dispositif de la décision juridictionnelle dont l'exécution est demandée. Il peut toutefois modérer ou supprimer l'astreinte provisoire, même en cas d'inexécution de la décision juridictionnelle.
3. M. B..., qui ne justifie pas avoir exécuté le jugement du 30 décembre 2019 du tribunal administratif de Nancy soutient qu'il ne peut être poursuivi puisqu'il n'est plus le propriétaire du bateau " Solvay 79 ". Cependant, un tel moyen est inopérant dès lors que le jugement du 30 décembre 2019 du tribunal administratif de Nancy prononçant une astreinte à son encontre, et qui a été confirmé par un arrêt du 29 décembre 2021 de la présente cour, est devenu définitif.
4. En deuxième lieu, et contrairement aux allégations de M. B..., qui ne sont pas étayées par les courriels échangés avec Voies navigables de France à compter de janvier 2024, il ne résulte pas de l'instruction qu'il aurait été empêché par cet établissement public d'exécuter le jugement du 30 décembre 2019 lui enjoignant, sous astreinte, de libérer l'emplacement occupé par son bateau.
5. Enfin, saisi d'une demande de liquidation de l'astreinte qu'il a prononcée, le juge se livre à une appréciation souveraine des faits de la cause en refusant de faire usage, à la demande du défendeur, de son pouvoir de modération du taux de cette astreinte. En l'espèce, M. B..., qui ne se prévaut pas d'un état d'impécuniosité, ne peut utilement faire valoir que son bateau a été un gouffre financier pour solliciter une baisse du taux journalier de l'astreinte.
6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nancy l'a condamné à verser à Voies navigables de France une somme de 29 000 euros au titre de la liquidation de l'astreinte prononcée par le jugement du même tribunal le 30 décembre 2019.
7. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de Voies navigables de France présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de Voies navigables de France présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à Voies navigables de France.
Copie en sera adressée au tribunal administratif de Nancy.
Délibéré après l'audience du 6 mai 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Stéphane Barteaux, président,
- M. Arnaud Lusset, premier conseiller,
- Mme Sophie Roussaux, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 mai 2025.
La rapporteure,
Signé : S. C...
Le président,
Signé : S. Barteaux
La greffière,
Signé : N. Basso
La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
N. Basso
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N° 24NC00423