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03/06/2025 | FRANCE | N°24NC01749

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 5ème chambre, 03 juin 2025, 24NC01749


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 5 février 2024 par lesquels le préfet de Meurthe-et-Moselle, d'une part, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination en cas de reconduite d'office et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans et, d'autre part, l'a assigné à résidence dans le département de la Meurthe-et-Moselle p

endant quarante-cinq jours.



Par un jugement n°2400385 du 28 février 2024, la m...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 5 février 2024 par lesquels le préfet de Meurthe-et-Moselle, d'une part, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination en cas de reconduite d'office et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans et, d'autre part, l'a assigné à résidence dans le département de la Meurthe-et-Moselle pendant quarante-cinq jours.

Par un jugement n°2400385 du 28 février 2024, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 2 juillet 2024, M. C... A... B..., représenté par Me Jacquin, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 février 2024 ;

2°) d'annuler les décisions du préfet de Meurthe-et-Moselle du 5 février 2024 lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de destination et lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an ;

3°) d'enjoindre à la préfète de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer une carte de séjour " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans les deux mois de la décision à rendre et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 800 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas régulièrement motivée ;

- elle est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur d'appréciation ;

- elle méconnaît son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

- il ne constitue pas une menace pour l'ordre public ;

- le préfet ne pouvait se fonder sur le 3° de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour refuser d'accorder un délai de départ volontaire ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français n'est pas régulièrement motivée ;

- des circonstances humanitaires justifiaient de ne pas prononcer une telle interdiction ;

- sa présence ne menace pas l'ordre public ;

- l'interdiction de retour sur le territoire français méconnaît sont droit à sa vie privée et familiale garanti par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 février 2025, la préfète de Meurthe-et-Moselle conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. A... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 mai 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord du 27 décembre 1968 entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Durup de Baleine a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A... B..., ressortissant algérien né en 1988, est entré sur le territoire français le 14 avril 2015, muni d'un passeport en cours de validité revêtu d'un visa de court séjour de type C à entrées multiples valable pour un séjour de 90 jours du 30 novembre 2014 au 28 mai 2015 qui lui avait été délivré le 30 novembre 2014 par l'autorité consulaire française à Oran. Par un premier arrêté du 5 février 2024, le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a refusé le séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, en fixant le pays de destination, ainsi qu'interdiction de retour sur le territoire français pendant deux ans. Par un second arrêté du même jour, ce préfet l'a assigné à résidence dans le département de la Meurthe-et-Moselle pendant quarante-cinq jours. M. A... B... relève appel du jugement du 28 février 2024 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 5 février 2024 lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai, fixant le pays de renvoi, lui faisant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans et l'assignant à résidence.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. L'arrêté du 5 février 2024, quand bien même son dispositif, à la différence de son intitulé, n'en fait pas état, refuse à M. A... B... la délivrance d'un titre de séjour et fait état de la demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée le 27 décembre 2023 par l'intéressé, demande qui a été examinée au regard du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et du b) de l'article 7 de cet accord, comme des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du pouvoir que détient le préfet d'apprécier s'il y a lieu en opportunité, en particulier au regard de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels, de régulariser le séjour d'un ressortissant algérien ne remplissant pas les conditions prévues par cet accord ouvrant droit à la délivrance d'un certificat de résidence. Cet arrêté comporte, en outre, l'énoncé des considérations de droit comme de fait des décisions portant obligation de quitter le territoire français et refusant d'accorder un délai de départ volontaire. Il en résulte que le moyen tiré de l'absence ou de l'insuffisance de motivation de ces décisions doit être écarté. En outre, il résulte de l'instruction que le préfet a examiné de manière précise et complète la situation de M. A... B....

3. Dès lors que l'arrêté du 3 février 2024 refuse la délivrance d'un titre de séjour, M. A... B... se trouve dans le cas prévu au 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans lequel le préfet peut faire obligation à l'étranger de quitter le territoire français.

4. Les infractions pénales commises par un étranger ne sauraient, à elles seules, justifier légalement une mesure d'obligation de quitter le territoire français et ne dispensent pas l'autorité compétente d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français constitue une menace pour l'ordre public. Lorsque l'administration se fonde sur l'existence d'une telle menace pour décider une telle obligation, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les faits qu'elle invoque à cet égard sont de nature à justifier légalement sa décision.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. A... B... est l'auteur de faits de vol à l'étalage et vol en réunion commis à Roanne le 3 septembre 2016, de faits de vol simple commis à Saint-Etienne le 2 mai 2019, de faits de vol dans un local d'habitation ou un lieu d'entrepôt commis à Bouthéon le 23 mai 2020, de faits d'altération frauduleuse de la vérité dans un écrit commis à Saint-Etienne le 17 février 2022. Il en ressort également, en particulier du procès-verbal de son audition le 5 février 2024 par les services de la police aux frontières, qu'il s'est procuré un faux titre de séjour, qu'il a utilisé au mois de décembre 2022 à l'appui d'une demande auprès d'une caisse primaire d'assurance maladie ainsi que pour travailler, notamment dans le cadre de missions d'intérim. Une demande d'asile et une demande de réexamen qu'il avait présentées ont été rejetées par des décisions du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile en 2016 et 2017. Par une décision du 25 février 2019, la préfète de la Loire lui avait fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et, par un arrêté du 18 février 2022, cette préfète lui a fait obligation de quitter ce territoire sans délai et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant un an. M. A... B... n'a pas respecté ces mesures d'éloignement. Enfin, il s'est en connaissance de cause maintenu irrégulièrement sur le territoire français pendant plusieurs années. Dès lors, quand bien même les infractions dont il est l'auteur n'auraient pas donné lieu à des poursuites pénales, le préfet de Meurthe-et-Moselle, qui n'a pas méconnu la présomption d'innocence, a pu à bon droit et sans commettre d'erreur d'appréciation, estimer que, compte tenu de l'ensemble des circonstances caractérisant la situation de M. A... B..., son comportement constitue une menace pour l'ordre public et ce, alors même qu'il vit depuis plusieurs années en France avec sa compagne, ressortissante algérienne née en 1998, qui séjourne irrégulièrement en France, et qu'ils sont les parents d'un enfant né en France le 1er mars 2019. Dès lors, sa situation relève également du cas prévu au 5° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans lequel le préfet peut obliger l'étranger à quitter le territoire français.

6. La délivrance d'un certificat de résidence en qualité de salarié prévu au b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 est subordonnée par le second alinéa de l'article 9 de cet accord à la présentation d'un passeport en cours de validité muni d'un visa de long séjour délivré par les autorités françaises. Faute pour M. A... B... de présenter un tel visa, il n'est pas en droit de prétendre à un tel certificat de résidence.

7. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) / 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; / (...) ".

8. Si le séjour en France de M. A... B..., remontant à près de neuf ans, est ancien, il a déjà fait l'objet en 2019 et 2022 de mesures portant obligation de quitter le territoire français, dont la seconde assortie d'une interdiction de retour sur le territoire français pendant un an, auxquelles il n'a pas déféré. Il ne peut ainsi se prévaloir d'une situation stable sur ce territoire. Sa compagne, ressortissante algérienne née en 1998, de même nationalité que lui, séjourne irrégulièrement sur ce territoire et a fait l'objet, en 2019 et 2022, de décisions portant obligation de quitter le territoire français. Leur enfant, né en France en 2019, est de la même nationalité que ses parents et peut les accompagner en Algérie, où un enfant de cet âge peut être scolarisé. La cellule familiale que constituent ces trois personnes peut se reconstituer en Algérie, où M. A... B... a vécu pendant vingt-sept ans et où résident encore ses trois sœurs et deux de ses trois frères. M. A... B... ne justifie pas des raisons pour lesquelles il serait dans l'impossibilité de poursuivre sa vie personnelle, de nature privée et familiale, dans le pays dont il est originaire. En outre et comme déjà dit, le préfet a pu valablement estimer que le comportement de l'intéressé menace l'ordre public. Dès lors, les liens personnels et familiaux de M. A... B... en France ne sont pas tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. Il en résulte qu'il n'est pas fondé à soutenir qu'il est en droit de prétendre, de plein droit, à la délivrance d'un certificat de résidence sur le fondement du 5) de l'article 6 de l'accord du 27 décembre 1968 et que cette raison faisait obstacle à ce qu'il soit fait obligation de quitter le territoire français. Pour les mêmes raisons, la décision de lui faire, sans délai, obligation de quitter le territoire français, ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de Meurthe-et-Moselle aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'il n'y avait pas lieu, en opportunité, de régulariser le séjour de M. A... B... pour des raisons humanitaires ou des motifs exceptionnels et que, faute d'une telle régularisation, il y avait lieu de lui faire obligation de quitter le territoire français.

10. La présence du requérant constitue une menace pour l'ordre public et il n'a pas respecté de précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet en 2019 et 2022. Dès lors, c'est par une exacte application des dispositions, d'une part, du 1° de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, d'autre part, des 5° de l'article L. 612-3 et 3° de l'article L. 612-3 de code, que le préfet de Meurthe-et-Moselle a pu légalement refuser de lui accorder un délai de départ volontaire et ce, quand bien même M. A... B... présenterait, selon lui, des garanties de représentation.

11. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder cinq ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, et dix ans en cas de menace grave pour l'ordre public. ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / (...) ". L'article L. 613-2 de ce code dispose : " Les décisions relatives au refus et à la fin du délai de départ volontaire prévues aux articles L. 612-2 et L. 612-5 et les décisions d'interdiction de retour et de prolongation d'interdiction de retour prévues aux articles L. 612-6, L. 612-7, L. 612-8 et L. 612-11 sont distinctes de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Elles sont motivées. ".

12. L'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'énumère l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère. L'autorité compétente doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément. En outre, il résulte de l'article L. 612-6 de ce code que, lorsque le préfet prend, à l'encontre d'un étranger, une décision portant obligation de quitter le territoire français ne comportant aucun délai de départ, il lui appartient d'assortir sa décision d'une interdiction de retour sur le territoire français, sauf dans le cas où des circonstances humanitaires y feraient obstacle. Seule la durée de cette interdiction de retour doit alors être appréciée au regard des quatre critères énumérés à l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à savoir la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, la nature et l'ancienneté de ses liens avec la France, l'existence ou non d'une précédente mesure d'éloignement et, le cas échéant, la menace pour l'ordre public que constitue sa présence sur le territoire.

13. L'arrêté du 5 février 2024 comporte l'indication des considérations de droit et de fait fondant, tant en son principe qu'en sa durée, la décision de son auteur de faire interdiction à M. A... B... de retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans. Cette motivation, qui permet au requérant à sa seule lecture de comprendre les motifs de cette interdiction, atteste de la prise en compte de l'ensemble des critères prévus par l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il en résulte que la décision portant interdiction de retour est régulièrement motivée.

14. Il ne ressort pas des pièces du dossier que des circonstances humanitaires auraient justifié que le préfet de Meurthe-et-Moselle n'édicte pas d'interdiction de retour sur le territoire français à l'encontre de M. A... B....

15. M. A... B... a déjà fait l'objet de deux mesures d'obligation de quitter le territoire français qu'il n'a pas respectées, la seconde de ces mesures, en 2022, ayant été assortie d'une décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant un an. Sa présence en France représente une menace pour l'ordre public, alors même que cette dernière ne serait pas grave. S'il justifie en France d'un lien familial depuis plusieurs années, sa compagne, de même nationalité que lui, y séjourne irrégulièrement et leur enfant a vocation à les accompagner. Dès lors, sans commettre d'erreur d'appréciation et sans méconnaître les principes constitutionnels, les principes généraux du droit et les règles résultant des engagements internationaux de la France, le préfet a pu fixer à deux ans la durée de l'interdiction de retour sur le territoire français.

16. M. A... B... peut poursuivre sa vie privée et familiale en Algérie, avec sa compagne et leur enfant, tous de nationalité algérienne. Dès lors, l'interdiction de retour sur le territoire français, pendant deux ans, ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande. Les conclusions à fin d'injonction qu'il présente ne sauraient, dans ces conditions, être accueillies.

Sur les frais liés au litige :

18. Les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, le versement d'une somme à ce titre.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... B..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et à Me Floriane Jacquin.

Copie en sera adressée à la préfète de Meurthe-et-Moselle.

Délibéré après l'audience du 13 mai 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Durup de Baleine, président,

- M. Barlerin, premier conseiller,

- Mme Peton, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 juin 2025.

Le président-rapporteur,

Signé : A. Durup de BaleineL'assesseur le plus ancien

dans l'ordre du tableau,

Signé : A. Barlerin

Le greffier,

Signé : A. Betti

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

A. Betti

2

N° 24NC01749


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NC01749
Date de la décision : 03/06/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DURUP DE BALEINE
Rapporteur ?: M. Antoine DURUP DE BALEINE
Rapporteur public ?: Mme BOURGUET
Avocat(s) : JACQUIN FLORIANE

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-03;24nc01749 ?
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