La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/06/2025 | FRANCE | N°22NC02098

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 3ème chambre, 12 juin 2025, 22NC02098


Vu la procédure suivante :



Par une requête et un mémoire, enregistrés le 5 août 2022 et le 30 août 2023, la SNC Magasin 278, représentée par la SELARL Cabinet Coudray, demande à la cour :



1°) d'annuler la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial rejetant sa demande d'autorisation d'un projet d'extension d'un ensemble commercial situé 6 rue de Taubenhof à Haguenau, par la création d'un magasin de 571 m2 de surface de vente ;



2°) d'enjoindre à la Commission nationale d'aménagement commercial d

e procéder au réexamen de sa demande ;



3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 00...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 5 août 2022 et le 30 août 2023, la SNC Magasin 278, représentée par la SELARL Cabinet Coudray, demande à la cour :

1°) d'annuler la décision de la Commission nationale d'aménagement commercial rejetant sa demande d'autorisation d'un projet d'extension d'un ensemble commercial situé 6 rue de Taubenhof à Haguenau, par la création d'un magasin de 571 m2 de surface de vente ;

2°) d'enjoindre à la Commission nationale d'aménagement commercial de procéder au réexamen de sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure devant la Commission nationale d'aménagement commercial est irrégulière dès lors que la demande de pièces complémentaires a été faite moins de dix jours avant la séance du 2 juin 2022, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 752-34 du code de commerce ;

- la complétude du dossier de demande ne pouvait plus être remise en cause après l'expiration du délai de quinze jours prévu à l'article R. 752-12 du code de commerce ;

- en tout état de cause, le dossier de demande était complet ;

- le projet n'a aucune incidence significative sur les flux routiers et de déplacement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juillet 2023, la Commission nationale d'aménagement commercial conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Berthou,

- les conclusions de M. Meisse, rapporteur public,

- et les observations de Me Lapprand pour la SNC Magasin 278.

Considérant ce qui suit :

1. La SNC Magasin 278 a saisi, le 10 janvier 2022, la commission départementale d'aménagement commercial (CDAC) du Bas-Rhin d'une demande d'autorisation d'exploitation commerciale en vue de l'extension de 571 m² d'un ensemble commercial, situé 6 rue de Taubenhof à Haguenau, pour la création d'un magasin sous l'enseigne NOZ. Elle a formé, le 31 mars 2022, un recours auprès de la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) contre l'avis défavorable émis par la CDAC le 3 mars 2022. Par la présente requête, elle demande à la cour d'annuler la décision du 2 juin 2022 par laquelle la CNAC rejette son recours au motif que le dossier de demande présente des lacunes persistantes.

Sur la légalité de la décision attaquée :

2. En premier lieu, la SNC Magasin 278 ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article R. 752-12 du code de commerce, qui n'est applicable qu'à la procédure suivie devant la CDAC.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce : " (...) La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : 1° En matière d'aménagement du territoire : / (...) d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; (...) ". Aux termes de l'article R. 752-6 de ce même code : " I.- La demande est accompagnée d'un dossier comportant les éléments mentionnés ci-après ainsi que, en annexe, l'analyse d'impact définie au III de l'article L. 752-6. / (...) 3° Effets du projet en matière d'aménagement du territoire. / Le dossier comprend une présentation des effets du projet sur l'aménagement du territoire, incluant les éléments suivants : / (...) b) Evaluation des flux journaliers de circulation des véhicules générés par le projet sur les principaux axes de desserte du site, ainsi que des capacités résiduelles d'accueil des infrastructures de transport existantes ; / (...) e) Analyse prévisionnelle des flux de déplacement dans la zone de chalandise, tous modes de transport confondus, selon les catégories de clients ; (...) ". Aux termes de son article R. 752-34 : " (...) Quinze jours au moins avant la réunion de la commission nationale, les parties, et le membre de la commission départementale désigné en application des dispositions du quatrième alinéa de l'article R. 752-16 sont convoqués à la réunion et informés que la commission nationale ne tiendra pas compte des pièces qui seraient produites moins de dix jours avant la réunion, à l'exception des pièces émanant des autorités publiques. ".

4. D'une part, lorsqu'elle estime qu'une demande d'autorisation d'exploitation commerciale est incomplète, il appartient à la CNAC, non de refuser d'emblée pour ce motif l'autorisation, mais d'inviter la société à compléter dans cette mesure son dossier afin de combler les insuffisances constatées, puis, le cas échéant, de rejeter la demande en raison de lacunes persistantes.

5. Il ressort des pièces du dossier que, par un courrier électronique du 28 avril 2022, la CNAC a demandé des éléments complémentaires à la société pétitionnaire en l'interrogeant notamment sur l'existence d'une étude de trafic et en lui demandant, le cas échéant, de la joindre. Dans son courrier électronique du 2 mai 2022, très peu fourni, la SNC Magasin 278 n'a pas répondu expressément sur ce point. La CNAC lui a adressé alors à nouveau, par un courrier électronique du 25 mai 2022, une demande de compléments relevant le caractère daté des données de circulation fournies, l'absence de précision dans le dossier de demande quant aux difficultés de circulation les samedis mentionnées par la CDAC, l'absence d'éléments sur la situation actuelle et projetée en période de pointe et l'absence de prise en compte de la nouvelle liaison inter-quartiers reliant l'entrée Sud-Ouest de Haguenau à la route du Rhin. En réponse, la SNC Magasin 278 a adressé un courrier électronique laconique daté du 30 mai 2022 se bornant à remettre en cause le rapport de la direction départementale des territoires évoquant un constat d'un ralentissement du trafic les samedis après-midi et à invoquer l'absence de pertinence des données de trafic disponibles émanant du conseil départemental pour 2020 en raison de la pandémie de COVID 19. Il ressort ainsi des pièces du dossier que la décision de rejet de la CNAC est motivée par des lacunes persistantes du dossier relevées dès le 28 avril 2022. En outre et en tout état de cause, les dispositions précitées de l'article R. 752-34 du code de commerce n'ont ni pour objet, ni pour effet d'interdire à la CNAC de solliciter des éléments complémentaires de la part du pétitionnaire moins de dix jours avant la séance. Par suite, le moyen tiré de ce que la demande de pièces complémentaires a été faite moins de dix jours avant la séance du 2 juin 2022, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 752-34 du code de commerce, doit être écarté.

6. D'autre part, la circonstance que le dossier de demande d'autorisation ne comporterait pas l'ensemble des éléments exigés par les dispositions précitées, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité l'autorisation qui a été accordée que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

7. En l'espèce, le dossier de demande comporte une évaluation des flux journaliers de circulation des véhicules légers succincte relevant que l'axe routier le plus proche concerné par le projet est constitué par la route départementale RD 29, dont le trafic journalier moyen s'élevait, en 2019, à 13 130 véhicules par jour, dont une proportion de 96.3 % de véhicules légers, soit 12 670 véhicules légers et qu'en conséquence, l'augmentation de trafic escomptée du fait du projet représenterait 2,9 % de cet axe. Il comporte également une analyse des flux de déplacements au sein de la zone de chalandise fondée sur la part des transports utilisés au sein de l'unité urbaine de Haguenau en 2018, à défaut d'étude plus précise. Ainsi qu'il a été dit au point 5 et malgré les demandes formulées en ce sens par l'instructeur, aucun complément n'a été apporté par la SNC Magasin 278 lors de l'instruction de son dossier par la CNAC sur la réalité du trafic en heures de pointe sur les axes de desserte, alors que de sérieux doutes ont pu être exprimés sur ce point dans le rapport d'instruction à la CDAC, et sur la prise en compte de la nouvelle liaison inter quartiers débouchant à proximité du projet. Ces insuffisances qui entachaient le dossier étaient de nature à fausser l'appréciation qui aurait été portée par l'autorité administrative quant à l'effet du projet sur les flux de transports et quant à son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émissions de dioxyde de carbone, lesquels figurent parmi les éléments qui doivent être pris en considération en vertu de l'article L. 752-6 du code de commerce. Par suite, la CNAC pouvait légalement rejeter la demande au motif de son caractère incomplet en méconnaissance de l'article R. 752-6 précité du code de commerce.

8. En dernier lieu, la SNC Magasin 278 ne saurait utilement soutenir que son projet n'aurait aucune incidence significative sur les flux routiers et de déplacement, alors qu'une telle incidence ne constitue pas un motif de la décision attaquée.

9. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation présentées par la SNC Magasin 278 doivent être rejetées.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Le présent jugement, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par la SNC Magasin 278, n'implique aucune mesure d'exécution. Les conclusions en injonction présentée par la requérante ne peuvent par suite qu'être rejetées.

Sur les frais de l'instance :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SNC Magasin 278 demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la SNC Magasin 278 est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SNC Magasin 278, à la Commission nationale d'aménagement commercial et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré après l'audience du 22 mai 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Wurtz, président,

- Mme Bauer, présidente-assesseure,

- M. Berthou, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 juin 2025.

Le rapporteur,

Signé : D. BERTHOULe président,

Signé : Ch. WURTZLe greffier,

Signé : F. LORRAIN La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier :

F. LORRAIN

N° 22NC02098 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 22NC02098
Date de la décision : 12/06/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WURTZ
Rapporteur ?: M. David BERTHOU
Rapporteur public ?: M. MEISSE
Avocat(s) : CABINET COUDRAY

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-12;22nc02098 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award