Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... B... et M. C... B... ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les décisions 22 juin 2022 par lesquelles la préfète du Bas-Rhin a refusé de leur octroyer le bénéfice de la protection contre l'éloignement.
Par un jugement n° 2208350, 2208351 du 18 octobre 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête enregistrée le 22 janvier 2024, sous le n° 24NC00177, Mme B..., représentée par Me Carraud, demande à la cour :
1°) avant-dire-droit d'appeler à la cause l'Office français de l'immigration et de l'intégration en tant que défendeur ou à tout le moins en tant qu'observateur, d'enjoindre à l'Office de produire les éléments sur lesquels il s'est fondé pour considérer que son fils pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Albanie et à défaut d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de produire ces éléments ;
2°) d'annuler ce jugement en ce qui la concerne ;
3°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 22 juin 2022 prise à son encontre par la préfète du Bas-Rhin ;
4°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation administrative dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- la décision de refus de protection contre l'éloignement est entachée d'un vice de procédure dès lors que la préfète du Bas-Rhin a instruit sa demande sur le fondement des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors qu'elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en raison de l'état de santé de son fils mineur au titre des dispositions de l'article L. 425-10 du même code ;
- ce vice de procédure l'a privée d'une garantie dès lors que l'avis médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'a pas été rendu sur la base d'un rapport établi par un médecin de l'Office ;
- aucune disposition du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne prévoit que les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 de ce code sont applicables aux parents d'un enfant mineur malade ;
- les premiers juges n'ont pas répondu à ce moyen ;
- la préfète a commis une erreur de droit en enregistrant puis en instruisant sa demande d'admission au séjour comme une demande de protection contre l'éloignement ;
- la décision contestée est entachée d'un défaut de base légale et d'une erreur de droit dès lors que les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas applicables aux parents d'un enfant malade ;
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
La requête a été communiquée à la préfète du Bas-Rhin, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrégularité du jugement du 18 octobre 2023 du tribunal administratif de Strasbourg qui a omis de constater un non-lieu à statuer sur les conclusions de la demande de Mme B... tendant à l'annulation de la décision du 22 juin 2022, en raison de la délivrance le 15 décembre 2022 d'une autorisation provisoire de séjour à Mme B... par la préfète du Bas-Rhin.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 décembre 2023.
II. Par une requête enregistrée le 22 janvier 2024, sous le n° 24NC00179, M. B..., représenté par Me Carraud, demande à la cour :
1°) avant-dire-droit d'appeler à la cause l'Office français de l'immigration et de l'intégration en tant que défendeur ou à tout le moins en tant qu'observateur, d'enjoindre à l'Office de produire les éléments sur lesquels il s'est fondé pour considérer que son fils pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié en Albanie et à défaut d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de produire ces éléments ;
2°) d'annuler ce jugement en ce qui le concerne ;
3°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 22 juin 2022 prise à son encontre par la préfète du Bas-Rhin ;
4°) d'enjoindre à la préfète du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation administrative dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de protection contre l'éloignement est entachée d'un vice de procédure dès lors que la préfète du Bas-Rhin a instruit sa demande sur le fondement des dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors qu'elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en raison de l'état de santé de son fils mineur au titre des dispositions de l'article L. 425-10 du même code ;
- ce vice de procédure l'a privé d'une garantie dès lors que l'avis médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration n'a pas été rendu sur la base d'un rapport établi par un médecin de l'Office ;
- aucune disposition du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne prévoit que les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 de ce code sont applicables aux parents d'un enfant mineur malade ;
- les premiers juges n'ont pas répondu à ce moyen ;
- la préfète a commis une erreur de droit en enregistrant puis en instruisant sa demande d'admission au séjour comme une demande de protection contre l'éloignement ;
- la décision contestée est entachée d'un défaut de base légale et d'une erreur de droit dès lors que les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas applicables aux parents d'un enfant malade ;
- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 425-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
La requête a été communiquée à la préfète du Bas-Rhin, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrégularité du jugement du 18 octobre 2023 du tribunal administratif de Strasbourg qui a omis de constater un non-lieu à statuer sur les conclusions de la demande de M. B... tendant à l'annulation de la décision du 22 juin 2022, en raison de la délivrance le 15 décembre 2022 d'une autorisation provisoire de séjour à M. B... par la préfète du Bas-Rhin.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 décembre 2023.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de M. Michel, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... et M. B..., ressortissants albanais nés respectivement le 9 janvier 1995 et le 13 août 1986, sont entrés en France le 4 août 2019 accompagnés de leurs deux enfants mineurs. Leurs demandes d'asile ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par des décisions du 29 novembre 2019, confirmées par la Cour nationale du droit d'asile par décisions du 24 février 2020. En raison de l'état de santé de leur fils cadet, A..., les intéressés ont obtenu une autorisation provisoire de séjour valable du 21 juillet 2020 au 20 janvier 2021. Par des décisions du 6 décembre 2021, le préfet de la Moselle a refusé de les admettre au séjour, les a obligés à quitter le territoire français et a prononcé leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Puis, par deux décisions du 22 juin 2022, la préfète du Bas-Rhin a refusé de leur octroyer le bénéfice de la protection contre l'éloignement. Par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre, M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 18 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du 22 juin 2022.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il ressort des pièces du dossier que, postérieurement aux décisions en litige du 22 juin 2022, la préfète du Bas-Rhin a délivré dans le cadre de l'instruction de la demande de titre de séjour présentée par M. et Mme B... en qualité de parent d'enfant malade, une autorisation provisoire de séjour à chacun d'eux le 15 décembre 2022. Ces autorisations ont implicitement mais nécessairement abrogé les décisions portant obligation de quitter le territoire français du 6 décembre 2021 et ont, par voie de conséquence, privé d'objet les décisions contestées de refus du bénéfice de la protection contre l'éloignement. Dès lors, en ayant omis de constater un non-lieu à statuer sur les conclusions des demandes de M. et Mme B... tendant à l'annulation des décisions du 22 juin 2022, les premiers juges ont entaché leur jugement d'irrégularité. Il y a lieu, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen d'irrégularité présenté par les requérants, d'annuler le jugement attaqué.
3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les demandes présentées par M. et Mme B... devant le tribunal administratif de Strasbourg.
Sur l'étendue du litige :
4. Pour les motifs qui viennent d'être exposés, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions des requérants tendant à l'annulation des décisions du 22 juin 2022 de la préfète du Bas-Rhin leur refusant le bénéfice de la protection contre l'éloignement.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
5. Le présent arrêt, qui constate le non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution. Les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par M. et Mme B... doivent ainsi être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
6. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. et Mme B... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2208350, 2208351 du 18 octobre 2023 du tribunal administratif de Strasbourg est annulé.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin d'annulation de M. et Mme B... dirigées contre les décisions du 22 juin 2022 de la préfète du Bas-Rhin.
Article 3 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. et Mme B... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B..., à M. C... B..., à Me Carraud et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet du Bas-Rhin.
Délibéré après l'audience du 28 mai 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Wallerich, président de chambre,
- Mme Guidi, présidente-assesseure,
- M. Michel, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 juin 2025.
Le rapporteur,
Signé : A. MichelLe président,
Signé : M. Wallerich
La greffière,
Signé : I. Legrand
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision
Pour expédition conforme,
La greffière,
I. Legrand
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N° 24NC00177, 24NC00179