Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... G... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 4 avril 2022 de l'autorité consulaire française à Casablanca (Maroc) et la décision du 31 août 2022 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté son recours formé contre cette décision consulaire refusant de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour en qualité d'ascendante à charge d'un ressortissant français.
Par un jugement n° 2213336 du 7 juillet 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 5 septembre 2023, Mme G..., représentée par Me Bochnakian, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 7 juillet 2023 du tribunal administratif de Nantes ;
2°) d'annuler la décision du 31 août 2022 du ministre de l'intérieur rejetant un recours à l'encontre d'une décision de refus de visa émanant des autorités consulaires françaises à Casablanca au Maroc le 4 avril 2022 ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer le visa sollicité dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la décision du ministre de l'intérieur est entachée d'une erreur d'appréciation et d'une erreur de fait dès lors qu'elle ne dispose pas de ressources propres et que sa fille C... F... et son mari subviennent à ses besoins.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Pons,
- et les observations de Me Bochnakian, représentant la requérante.
Considérant ce qui suit :
1. Mme G..., ressortissante marocaine, née en 1967, a sollicité auprès du consul général de France à Casablanca (Maroc) la délivrance d'un visa de long séjour en qualité d'ascendante à charge de ses cinq enfants de nationalité française, qui lui a été refusé le 4 avril 2022. Saisie d'un recours contre ce refus consulaire, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a, par une décision du 18 août 2022, décidé de recommander au ministre de l'intérieur d'accorder le visa sollicité. Toutefois, par une décision du 31 août 2022, le ministre de l'intérieur a refusé de délivrer ledit visa. Mme G... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler ces décisions. Par un jugement du 7 juillet 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Mme G... fait appel de ce jugement.
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision des autorités consulaires françaises à Casablanca :
2. La décision du ministre de l'intérieur s'est substituée à la décision des autorités consulaires françaises à Casablanca du 4 avril 2022. Par suite, les conclusions de la requête doivent être regardées comme dirigées contre la seule décision de refus du ministre de l'intérieur et les conclusions à fin d'annulation de la décision consulaire sont irrecevables.
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du ministre de l'intérieur du 31 août 2022 :
3. Lorsqu'elles sont saisies d'une demande tendant à la délivrance d'un visa de long séjour par un ressortissant étranger faisant état de sa qualité d'ascendant à charge de ressortissant français et/ou de son conjoint français, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France peut légalement fonder sa décision de refus sur la circonstance que le demandeur ne saurait être regardé comme étant à la charge de son descendant ou du conjoint de ce dernier, dès lors qu'il dispose de ressources propres, que son descendant de nationalité française ou son conjoint ne pourvoit pas régulièrement à ses besoins ou qu'il ne justifie pas des ressources nécessaires pour le faire.
4. Il ressort des pièces du dossier que plusieurs membres de la famille de Mme G... contribuent à subvenir à ses besoins quotidiens, notamment sa fille, Mme C... F..., le mari de cette dernière, M. E... I..., ainsi que son petit-fils, M. A... F..., qui ont opérés plusieurs transferts d'argent pour des montants allant de 550 euros à 3 631,33 euros du 23 janvier 2017 au 24 mars 2022. Elle produit également un " certificat de non activité professionnelle " rédigé par le Caid chef de la 51ème annexe administrative Al Qods de la préfecture des arrondissements Sidi Bernoussi, lequel atteste que la requérante n'exerce aucune activité professionnelle. Elle ajoute qu'elle était mariée à M. H... F..., qui n'avait jamais travaillé avant son décès le 11 décembre 2021 et avait toujours été à la charge de sa sœur, Mme B... F..., et qu'elle n'a jamais eu de compte bancaire au Maroc. Le ministre ne contredit pas ces éléments, ni en première instance, ni en appel. Dans ces conditions, Mme G... établit que ses descendants de nationalité française pourvoient régulièrement à ses besoins et justifient des ressources nécessaires pour le faire.
5. Dès lors, en estimant que Mme G... ne justifiait pas de sa qualité d'ascendant à charge de français, le ministre de l'intérieur a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
6. Il résulte de ce qui précède que Mme G... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur du 31 août 2022.
Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :
7. L'annulation prononcée par le présent arrêt implique seulement qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de réexaminer la demande de Mme G..., tendant à la délivrance d'un visa de long séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme G... de la somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article1er: Le jugement n° 2213336 du 7 juillet 2023 du tribunal administratif de Nantes est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de Mme G... dirigées contre la décision du 31 août 2022 du ministre de l'intérieur.
Article 2 : La décision du 31 août 2022 par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté le recours de Mme G... formé contre la décision consulaire refusant de lui délivrer un visa d'entrée et de long séjour en qualité d'ascendante à charge d'un ressortissant français est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de réexaminer la demande de Mme G..., tendant à obtenir la délivrance d'un visa de long séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à Mme G... une somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme G... est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... G... et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 30 août 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Gaspon, président,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- M. Pons, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 septembre 2024.
Le rapporteur,
F. PONSLe président,
O. GASPON
La greffière,
C. VILLEROT
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N°23NT02642