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01/10/2024 | FRANCE | N°23NT01290

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 6ème chambre, 01 octobre 2024, 23NT01290


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a présenté au tribunal administratif de Rennes une demande comprise comme tendant à la condamnation l'Etat à lui verser la somme totale de 30 000 euros, assortie des intérêts et de leur capitalisation, en réparation de son préjudice moral et du trouble dans ses conditions d'existence, résultant de la carence fautive de l'Etat (ministère des armées) à l'avoir exposé, pendant de nombreuses années, tant à l'inhalation de poussières d'amiante

qu'aux rayonnements ionisants, sans moyen de protection efficace.



Par un jugemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a présenté au tribunal administratif de Rennes une demande comprise comme tendant à la condamnation l'Etat à lui verser la somme totale de 30 000 euros, assortie des intérêts et de leur capitalisation, en réparation de son préjudice moral et du trouble dans ses conditions d'existence, résultant de la carence fautive de l'Etat (ministère des armées) à l'avoir exposé, pendant de nombreuses années, tant à l'inhalation de poussières d'amiante qu'aux rayonnements ionisants, sans moyen de protection efficace.

Par un jugement n°2106225 du 16 mars 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 mai 2023, M. B... représenté par la société d'avocats Teissonnière, Topaloff, Lafforgue, Andreu associés demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 16 mars 2023 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser les sommes de 15 000 euros en réparation de son préjudice moral et de 15 000 euros au titre des troubles dans ses conditions d'existence qu'il estimé avoir subis, somme totale de 30 000 euros assortie des intérêts de droit à compter de sa première demande d'indemnisation avec capitalisation de ces intérêts.

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la responsabilité pour carence fautive de l'Etat, en qualité d'employeur, doit être engagée ; il n'a bénéficié d'aucune protection efficace contre les rayonnements ionisants pendant sa période d'activité ;

- il justifie des préjudices qu'il invoque.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 septembre 2024, le ministre des armées conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens présentés par M. B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- la loi n° 2001-1276 de finances rectificative du 28 décembre 2001 ;

- le décret n° 2002-775 du 3 mai 2002 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coiffet,

- et les conclusions de Mme Bougrine, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ouvrier d'Etat né le 11 février 1954, a été employé au sein de la Direction des Constructions Navales (DCN) de Brest du 13 février 2002 au 31 mars 2014, en qualité en dernier lieu de " C... ". Affecté sur le site de l'Ile Longue, il a exercé en qualité de pyrotechnicien. Estimant l'Etat employeur responsable d'une carence fautive, M. B... a, par un courrier notifié le 4 août 2021, soutenu " qu'il avait été au cours de sa carrière exposé à l'inhalation de poussières d'amiante ainsi qu'aux rayonnements ionisants sans bénéficier de protection individuelle ou collective efficace. ". Il a alors sollicité la réparation de son préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence en résultant respectivement à hauteur de 15 000 et 20 000 euros.

2. A la suite du silence gardé par l'administration sur sa demande d'indemnisation, M. B... a, le 6 décembre 2021, saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande dirigée contre le refus implicite qui lui avait ainsi été opposé, limitée aux préjudices résultant de son exposition aux rayonnements ionisants, et a sollicité " la condamnation de l'Etat à l'indemniser de son préjudice moral et des troubles subis dans ses conditions d'existence " pour des montants de 15 000 euros chacun.

3. Par un jugement du 16 mars 2023, cette juridiction, qui s'est estimée saisie d'une demande d'indemnisation de M. B... portant tout à la fois sur l'inhalation de poussières d'amiante et sur l'exposition aux rayonnements ionisants, a, sans se prononcer sur l'exception de prescription opposée par la ministre des armées, et après avoir rappelé que l'Etat ne pouvait voir sa responsabilité engagée au titre de l'exposition de l'intéressé après le 31 mai 2003, rejeté sa demande en considérant que les préjudices invoqués n'étaient pas établis. M. B... relève appel de ce jugement.

Sur l'exposition aux poussières d'amiante et le périmètre du litige :

4. Il ressort de l'examen des écritures présentées par M. B... dans son recours de première instance, en particulier des développements figurant aux pages 2, 3 et 4 de sa demande qu'il s'est borné à demander réparation des préjudices qu'il estimait avoir subi du fait de son exposition aux rayonnements ionisants, en se prévalant d'études techniques ou scientifiques portant sur ce sujet et en indiquant notamment " qu'il apportait des éléments probants complémentaires démontrant l'existence d'un lien de causalité entre son exposition aux rayonnements ionisants et ses préjudices moraux et troubles dans ses conditions d'existence ". Il en va de même de ses conclusions et moyens présentés dans sa requête devant la cour. Ainsi, après avoir évoqué " l'absence de contrôle dosimétrique suffisant ", M. B... a clairement et seulement précisé, lorsqu'il a rappelé quel était " le cadre général de ses demandes ", " qu'il sollicitait le versement de dommages et intérêts sur le fondement de la responsabilité pour faute de l'administration qui l'a exposé pendant toutes ses années d'activité aux rayonnements ionisants " et que " de cette exposition fautive ", étaient nés deux préjudices distincts dont il demandait réparation. La juridiction administrative n'a donc été saisie d'aucune demande indemnitaire relative aux préjudices qui seraient nés d'une exposition aux poussières d'amiante. En tout état de cause, M. B..., qui n'a versé aux débats aucune attestation d'exposition aux poussières d'amiante établie à son profit par la DCN de Brest ou aucun document permettant de justifier de cette exposition au cours de sa carrière sur son poste de travail, n'établit pas davantage en appel qu'en première instance la réalité d'un quelconque préjudice à ce titre. Par suite, M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que par le jugement attaqué la demande qu'il aurait présentée sur ce point a été rejetée.

Sur l'exposition aux rayonnements ionisants :

En ce qui concerne l'exception de prescription quadriennale :

5. Aux termes du premier alinéa de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics : " Sont prescrites, au profit de l'État (...) sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis (...) ". Aux termes de l'article 2 de la même loi : " La prescription est interrompue par : / (...) Tout recours formé devant une juridiction, relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître, et si l'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance ; / (...) Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption. Toutefois, si l'interruption résulte d'un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée. ". Aux termes de l'article 3 de cette loi : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même ou par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement. ". Aux termes de l'article 6 du même texte : " Les autorités administratives ne peuvent renoncer à opposer la prescription qui découle de la présente loi (...) ". Aux termes, enfin, du premier alinéa de son article 7 : " L'Administration doit, pour pouvoir se prévaloir, à propos d'une créance litigieuse, de la prescription prévue par la présente loi, l'invoquer avant que la juridiction saisie du litige au premier degré se soit prononcée sur le fond (...) ".

S'agissant du point de départ de la prescription quadriennale :

6. En premier lieu, s'agissant du point de départ du délai de prescription, ainsi que l'a estimé le Conseil d'Etat dans son avis n° 457560 du 19 avril 2022, lorsque la responsabilité d'une personne publique est recherchée, les droits de créance invoqués en vue d'obtenir l'indemnisation des préjudices doivent être regardés comme acquis, au sens des dispositions citées au point 2, à la date à laquelle la réalité et l'étendue de ces préjudices ont été entièrement révélées, ces préjudices étant connus et pouvant être exactement mesurés. La créance indemnitaire relative à la réparation d'un préjudice présentant un caractère continu et évolutif doit être rattachée à chacune des années au cours desquelles ce préjudice a été subi. Dans ce cas, le délai de prescription de la créance relative à une année court, sous réserve des cas visés à l'article 3 de la loi du 31 décembre 1968, à compter du 1er janvier de l'année suivante, à la condition qu'à cette date le préjudice subi au cours de cette année puisse être mesuré.

7. Il résulte des dispositions citées au point 5 que le point de départ de la prescription quadriennale est la date à laquelle la victime est en mesure de connaître de façon suffisamment précise l'origine et la gravité du dommage qu'elle a subi ou est susceptible de subir. Dans le cas du préjudice moral d'anxiété dont peuvent se prévaloir les agents publics qui ne sont pas bénéficiaires de l'un des dispositifs législatifs d'indemnisation mis en place, cette connaissance naît de la conscience prise par l'intéressé qu'il court le risque élevé de développer une pathologie grave, et par là-même d'une espérance de vie diminuée. Le droit à réparation du préjudice en question doit donc être regardé comme acquis, au sens des dispositions citées au point 5, pour la détermination du point de départ du délai de prescription, à la date de cette connaissance.

8. A cet égard, s'il est constant que le commissariat à l'énergie atomique (CEA) a, en 1996, alerté la direction de la pyrotechnie du site de l'Ile Longue d'une émission de rayonnements Gamma plus élevée sur le dernier type de tête nucléaire livré à partir des années 1993-1994, entraînant la suspension temporaire de l'activité du site afin de prendre des mesures de protection, cet incident n'a toutefois pas permis à M. B... d'avoir alors une connaissance suffisante de ses conditions personnelles d'exposition aux rayonnements ionisants, susceptible de lui faire prendre conscience de l'étendue et de la gravité du risque sanitaire qu'il encourait. En revanche, M. B... a versé aux débats une " attestation d'exposition réalisée dans le cadre du suivi personnalisé relatif aux rayonnements des systèmes d'arme ", établie le 7 février 2019 qui mentionne que ce salarié est " intervenu - en étant habilité R.I. [rayonnements ionisants] - sur des systèmes d'arme de dissuasion nucléaire pour les périodes du 13 février 2002 au 31 mars 2014 ". Ce document a permis à ce dernier d'acquérir à la date du 7 février 2019 la connaissance de l'étendue et de la gravité du risque sanitaire qu'il encourait. Par suite, le délai de prescription quadriennale a débuté le 1er janvier 2020 et la créance de M. B... consécutive à son exposition aux rayonnements ionisants n'était donc pas prescrite à la date du 4 août 2021, à laquelle la ministre des armées a reçu sa réclamation préalable sur ce point.

S'agissant de la personne dont la responsabilité est recherchée :

9. M. B... recherche la responsabilité de l'Etat en sa qualité d'employeur, pour carence fautive ayant permis son exposition, pendant les années où il travaillait au sein de la direction des constructions navales (DCN) de Brest - soit du 13 février 2002 au 31 mars 2014 - aux rayonnements ionisants, sans moyen de protection efficace.

10. En application de l'article 78 de la loi susvisée du 28 décembre 2001, les ouvriers de l'Etat affectés aux établissements du service à compétence nationale DCN à la date de réalisation des apports des droits, biens et obligations de l'Etat relatifs à ce service à l'entreprise nationale DCN, devenue DCNS, ont été mis à la disposition de cette entreprise, soit au 1er juin 2003. Aux termes de l'article 1er du décret du 3 mai 2002 : " Les [...] ouvriers de l'Etat [...] mis à la disposition de l'entreprise nationale [...] sont en position d'activité. Dans cette position, ils demeurent soumis aux dispositions statutaires et réglementaires les régissant et bénéficient de celles du présent décret. ". Il résulte de la combinaison des articles 3, 10 et 13 du même décret que, si les mesures générales de gestion et d'administration des ouvriers de l'Etat mis, à compter du 1er juin 2003, à la disposition de l'entreprise nationale DCN, devenue DCNS puis Naval Group, continuent de relever de la compétence du ministre de la défense, les décisions individuelles les concernant relèvent en revanche de la compétence du président de l'entreprise Naval Group, exploitante des sites d'activité. A cet égard, le ministre de la défense n'exerce plus, depuis le 1er juin 2003, aucune responsabilité opérationnelle dans la gestion des postes de travail des ouvriers de l'Etat, chefs d'équipe et techniciens à statut ouvrier qui ont été mis à la disposition de cette entreprise nationale, responsable de la mise en œuvre effective des mesures de sécurité et d'hygiène, en particulier des équipements de protection individuelle, pour ses salariés qui exercent leurs fonctions sur ses différents sites. Ainsi, l'Etat ne peut être regardé comme ayant conservé sa qualité d'employeur de ces derniers après le 1er juin 2003. Dans ces conditions, la responsabilité de l'Etat ne saurait être recherchée pour la période postérieure au 1er juin 2003. Il s'ensuit que M. B..., embauché à compter du 13 février 2002 et affecté à compter de cette date sur le site de L'Ile Longue n'est susceptible de rechercher la responsabilité pour faute de l'Etat que pour la période d'activité commençant à cette date et jusqu'au 1er juin 2003, soit pendant une durée d'environ 15 mois.

S'agissant de la responsabilité de l'Etat :

11. La responsabilité de l'administration, notamment en sa qualité d'employeur, peut être engagée à raison de la faute qu'elle a commise, pour autant qu'il en résulte un préjudice direct et certain. A le caractère d'une faute, le manquement à l'obligation de sécurité à laquelle l'employeur est tenu envers son agent, lorsqu'il a ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé ce dernier et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

12. Il ressort des dispositions du décret susvisé du 20 juin 1966 relatif aux principes généraux de protection contre les rayonnements ionisants, applicable durant la période d'exposition de l'intéressé, qu'une zone contrôlée et surveillée doit être établie lorsque les travailleurs sont susceptibles d'être exposés, dans des conditions de travail normales, à des doses réglementairement définies (article 21). Le même texte impose une surveillance individuelle de l'irradiation externe et de la contamination interne des agents directement affectés à des travaux sous rayonnements, permettant d'évaluer des équivalents de doses reçues (article 24) et précise le contenu de la surveillance médicale particulière à laquelle ils sont soumis (article 25) ainsi que les conditions de conservation de ces mesures et résultats d'examens médicaux (article 26). Enfin, ce décret impose également d'informer des risques et précautions à prendre les personnes appelées à travailler en milieu soumis à rayonnements (article 27).

13. Aux termes de l'article 3 du décret susvisé du 2 octobre 1986 relatif à la protection des travailleurs contre les dangers des rayonnements ionisants, alors applicable : " I. - En vue de déterminer les conditions dans lesquelles doivent être effectuées la surveillance radiologique et la surveillance médicale, les travailleurs dont l'exposition est susceptible de dépasser un dixième des limites annuelles d'exposition fixées aux articles 6, 7 et 8 ci-dessous sont classés par l'employeur dans l'une des deux catégories suivantes : / Catégorie A : travailleurs directement affectés à des travaux sous rayonnements : personnes dont les conditions habituelles de travail sont susceptibles d'entraîner le dépassement des trois dixièmes des limites annuelles d'exposition fixées aux articles 6, 7 et 8 du présent décret. / Catégorie B : travailleurs non directement affectés à des travaux sous rayonnements : personnes dont les conditions habituelles de travail sont telles qu'elles ne peuvent normalement pas entraîner le dépassement des trois dixièmes des limites annuelles d'exposition fixées aux articles 6, 7 et 8 du présent décret (...) ". Aux termes de l'article 5 du même décret : " Les limites fixées aux chapitres III et IV ci-dessous ne s'appliquent pas à l'exposition due aux sources naturelles de rayonnement ni aux expositions subies par les travailleurs du fait des examens ou traitements médicaux auxquels ils sont soumis. ". Il ressort de plus des dispositions de ce texte que sont précisées par l'employeur, qui est tenu d'assurer la protection de ses agents, les conditions de définitions des zones contrôlées et surveillées autour des sources d'émission (articles 23 à 25). A cet effet, les manipulations de sources radioactives ou générateurs électriques de rayonnements ionisants doivent toujours s'effectuer sous la surveillance d'une personne compétente désignée par l'employeur, préalablement formée et dont la mission est précisément décrite (article 17) et les agents exposés doivent être formés à la radioprotection (article 19). De plus, il résulte des articles 28, 31, 34, 36, 37, 39 du décret du 2 octobre 1986 qu'un contrôle de la dosimétrie d'ambiance, ainsi qu'un contrôle individuel de la dosimétrie des travailleurs exposés, notamment ceux classés en catégorie A pour lesquels un examen médical biannuel est prévu, sont exigés.

14. La méconnaissance significative des obligations rappelées aux points 12 et 13 ci-dessus est un manquement constitutif d'une carence fautive de nature à engager la responsabilité de l'Etat en sa qualité d'employeur des ouvriers de l'Etat exposés, en conditions normales de travail, à des rayonnements ionisants.

15. En l'espèce, il ressort des mentions précises du compte rendu du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) qui s'est réuni le 21 novembre 1996, relatif à la présentation des dispositions relatives à la mise en place des zones contrôlées, à la Pyrotechnie de l'Ile-Longue, que, à cette date, la création des zones contrôlées, la mise en place de la dosimétrie individuelle et l'information des agents exposés sur les risques encourus n'étaient pas effectives, en méconnaissance des dispositions du décret du 20 juin 1966 rappelées au point 8. Il ressort par ailleurs des mentions du compte rendu du CHSCT du 10 décembre 1996 que le classement du personnel concerné en catégorie A n'est intervenu qu'à la fin de l'année 1996, en méconnaissance des dispositions de l'article 3 du décret du 2 octobre 1986. Il ne ressort d'aucune autre pièce que certaines des mesures obligatoires citées aux points 8 et 9 ont fait l'objet d'un début d'application avant la fin de l'année 1996. En revanche, il ressort des mentions portées sur les mêmes pièces qu'à compter de cette date, les personnels concernés ont été placés en catégorie A ou B, que les zones contrôlées ont été créées et les rayonnements, dans ces zones, mesurés. De la même manière, deux référents au sens de l'article 17 du décret du 2 octobre 1986 ont été désignés, une noted'information aux personnels concernés a été remise, conformément aux dispositions de l'article 19 du même décret et la dosimétrie individuelle mise en place. Il résulte de ce qui précède que la responsabilité de l'Etat employeur pour sa carence fautive est engagée pour la période antérieure à l'année 1997 mais doit être écartée à compter de cette date.

16. Il résulte de ce qui vient d'être dit que la demande de M. B... qui entend obtenir l'indemnisation des préjudices qu'il estime avoir subis quand il était affecté sur le site de L'Ile Longue pendant sa période d'activité courant du 13 février 2002 au 31 mars 2014, soit postérieurement à l'année 1997, date à partir de laquelle toute carence fautive de l'Etat est écartée, ne pouvait qu'être rejetée.

17. Il résulte de tout ce qui précède, que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande indemnitaire.

Sur les frais liés au litige :

18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante pour l'essentiel, le versement à M. B... de la somme qu'il demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre des armées et à M. A... B....

Délibéré après l'audience du 13 septembre 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- M. Pons, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er octobre 2024.

Le rapporteur,

O. COIFFETLe président,

O. GASPON

La greffière,

I.PETTON

La République mande et ordonne au ministre des armées en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°23NT01290 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT01290
Date de la décision : 01/10/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: Mme BOUGRINE
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS TEISSONNIERE TOPALOFF LAFFORGUE ANDREU ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-01;23nt01290 ?
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