Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... D... I... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite née le 27 août 2022 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours contre la décision du 25 mai 2022 de l'ambassade de France en République démocratique du A... refusant de délivrer à F... D... un visa de long séjour en qualité de membre de la famille d'un réfugié, ainsi que cette décision consulaire.
Par un jugement n°2214099 du 24 juillet 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 25 septembre 2023 et le 21 février 2024, M. D..., représenté par Me Duponteil, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 24 juillet 2023 du tribunal administratif de Nantes ;
2°) d'annuler la décision implicite née le 27 août 2022 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, ainsi que la décision de refus de visas de l'ambassade de France en République démocratique du A... du 25 mai 2022 ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer les visas sollicités ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision de refus de visa de l'ambassade de France en République démocratique du A... du 25 mai 2022 est insuffisamment motivée ;
- le jugement comporte une erreur, il se nomme I... D..., il est né en 1987 date à laquelle les prénoms n'étaient pas sur les actes de naissance, la loi a été modifiée en 1997, date à laquelle les prénoms ont été rétablis et il utilise comme prénom I... et parfois Mazowa ;
- les décisions contestées sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que son lien familial avec F..., Claudeau et Anitou D... est établi ;
- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, compte tenu de son statut de réfugié, il ne lui est pas possible d'aller voir ses enfants au A....
M. D... I... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 17 janvier 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Pons a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... I..., ressortissant congolais, est bénéficiaire d'une protection internationale en France. M. F... D..., ressortissant congolais né le 7 avril 2012, qu'il présente comme son fils, a déposé une demande de visa de long séjour, auprès de l'ambassade de France en République démocratique du A... au titre de la réunification familiale. Par une décision du 25 mai 2022, cette autorité a refusé de lui délivrer ce visa. Par une décision implicite née le 27 août 2022, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé contre cette décision consulaire. M. I... D... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler ces décisions. Par un jugement du 24 juillet 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. M. D... I... relève appel de ce jugement.
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision des autorités consulaires françaises en République démocratique du A... :
2. La décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est substituée à la décision des autorités consulaires françaises en République démocratique du A... du 25 mai 2022.Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision des autorités consulaires françaises ne peut être utilement invoqué.
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France :
3. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) 8° Rejettent un recours administratif dont la présentation est obligatoire préalablement à tout recours contentieux en application d'une disposition législative ou réglementaire ". Aux termes des dispositions de l'article L. 211-5 de ce code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Aux termes de l'article L. 232-4 du même code : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués ".
4. Les décisions des autorités consulaires portant refus d'une demande de visa doivent être motivées en vertu des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Il en va de même pour les décisions de rejet des recours administratifs préalables obligatoires formés contre ces décisions. Si la décision consulaire est motivée, l'insuffisance de la motivation de la décision de la commission de recours peut être utilement soulevée devant le juge, sans qu'une demande de communication de motifs ait été faite préalablement.
5. L'accusé de réception adressé par la commission de recours au requérant indique qu'en l'absence de réponse expresse à son recours dans un délai de deux mois, celui-ci sera réputé rejeté pour les mêmes motifs que ceux de la décision contestée, à savoir la décision consulaire du 25 mai 2022. Par ce mécanisme d'appropriation, la commission doit être regardée comme ayant communiqué les motifs de sa décision implicite, rendant superflue une demande de communication de ces motifs.
6. La décision consulaire vise les articles anciennement codifiés aux articles L. 752-1 et R. 752-1, R. 752-3 et L. 211-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique qu'elle est fondée sur le motif suivant : " Le dossier de demande de visa ne contient pas la preuve du lien familial avec la personne placée sous la protection de l'OFPRA. ". Cette décision et, partant, la décision contestée, comportent un exposé suffisant des motifs de droit et considérations de de fait sur lesquelles elles se fondent. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France doit donc être écarté.
7. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le ressortissant étranger qui s'est vu reconnaître la qualité de réfugié ou qui a obtenu le bénéfice de la protection subsidiaire peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre de la réunification familiale : / (...) 3° Par les enfants non mariés du couple, n'ayant pas dépassé leur dix-neuvième anniversaire. / (...). ". L'article L. 561-5 de ce code dispose que : " Les membres de la famille d'un réfugié ou d'un bénéficiaire de la protection subsidiaire sollicitent, pour entrer en France, un visa d'entrée pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois auprès des autorités diplomatiques et consulaires, qui statuent sur cette demande dans les meilleurs délais. Ils produisent pour cela les actes de l'état civil justifiant de leur identité et des liens familiaux avec le réfugié ou le bénéficiaire de la protection subsidiaire. En l'absence d'acte de l'état civil ou en cas de doute sur leur authenticité, les éléments de possession d'état définis à l'article 311-1 du code civil et les documents établis ou authentifiés par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, sur le fondement de l'article L. 121-9 du présent code, peuvent permettre de justifier de la situation de famille et de l'identité des demandeurs. Les éléments de possession d'état font foi jusqu'à preuve du contraire. Les documents établis par l'office font foi jusqu'à inscription de faux. ".
8. Pour justifier de l'identité du demandeur de visa et de son lien de filiation avec lui, le requérant a produit en première instance le jugement supplétif d'acte de naissance n° RCE 2743/II, rendu le 20 novembre 2020 par le tribunal pour enfants de G.../H..., qui indique que F... D... est né le 7 avril 2012, ainsi que l'acte de naissance n° 2767, dressés le 13 janvier 2021, qui en assure la transcription. Il produit également un autre jugement supplétif d'acte de naissance n° RCE 2743/II, rendu à la même date.
9. En premier lieu, l'identité du requérant n'est pas clairement établie, ce dernier se présentant tantôt comme " D... I... E... ", parfois mentionné sur les actes officiels produits, comme " Masowa D... F... " ou, selon ses dires, " D... F... " ou " D... Mazowa ".
10. En deuxième lieu, il ressort des motifs des jugements supplétifs produits que le dénommé " F... Mazowa D... ", né le 13 juillet 1987, de profession électricien, informations qui correspondent au requérant, s'est présenté devant le tribunal de G.../H... en sa qualité de père de " D... F... ", " D... Claudeau " et " D... Anitou ". Dans le second jugement supplétif du 20 novembre 2020, il est mentionné en sa qualité d'oncle paternel du demandeur de visa et ce dernier est présenté comme son neveu. Cette qualité d'oncle paternel est reprise en page 2 de ce jugement. S'il est également mentionné dans ces jugements supplétifs que le père de l'enfant F... Mazowa D... est un dénommé " M. D... I... ", né le 25 mars 1987, ce dernier est présenté tantôt comme un électricien, tantôt comme un commis de cuisine. Il ressort également du dispositif d'un de ces jugements que l'enfant F... D... est issu de l'union de " Mme C... B... " et de " M. D... I... ", ce dispositif distinguant cette dernière personne du dénommé " F... Mazowa D... ". Dans ces conditions, les nombreuses incohérences entre les déclarations du requérant et les mentions portées dans ces jugements supplétifs relatives au lien l'unissant au jeune " F... D... ", ne sont pas de nature à établir le lien de filiation allégué. En outre, M. D... ne produit aucun élément de possession d'état pour justifier de sa situation de famille et de l'identité du demandeur. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France aurait entaché sa décision d'une erreur d'appréciation.
11. En dernier lieu, le requérant n'établit pas que la décision attaquée aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée, compte tenu de ce qui précède. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
12. Il résulte de ce qui précède que M. I... D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Sa requête doit donc être rejetée en toutes ses conclusions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. D... I... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... I... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Délibéré après l'audience du 13 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Gaspon, président,
- M. Coiffet, président-assesseur,
- M. Pons, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er octobre 2024.
Le rapporteur,
F. PONSLe président,
O. GASPON
La greffière,
I. PETTON
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N°23NT02828