Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme A... et C... D... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la délibération du 5 mars 2020 par laquelle le conseil municipal de Bangor (Morbihan) a approuvé son plan local d'urbanisme et, subsidiairement, d'annuler cette délibération en tant qu'elle classe leur parcelle cadastrée ZR 106 en zone naturelle.
Par un jugement n° 2003583 du 13 janvier 2023, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 13 mars 2023, M. et Mme A... et C... D..., représentés par Me Vendé, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 13 janvier 2023 du tribunal administratif de Rennes ;
2°) d'annuler la délibération du 5 mars 2020 du conseil municipal de Bangor et, subsidiairement, d'annuler cette délibération en tant qu'elle classe la parcelle cadastrée ZR 106 en zone naturelle N ;
3°) d'enjoindre à la maire de Bangor de mettre à l'ordre du jour du prochain conseil municipal, susceptible d'intervenir dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, la modification du plan local d'urbanisme afin de classer la parcelle ZR 106 en zone Uc, sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Bangor la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le jugement est irrégulier ; il n'a pas répondu aux moyens tirés de l'absence de débat en conseil municipal sur un projet d'aménagement et de développement durables communal et de l'incohérence du plan local d'urbanisme avec le schéma de cohérence territoriale (SCOT), s'agissant de la création d'une zone 1 AU au lieu-dit Kervilahouen ;
- la délibération méconnaît les dispositions de l'article L. 2121-18 du code général des collectivités territoriales en ce qu'elle a été adoptée lors d'une réunion à huis-clos qui ne se justifiait pas ;
- la délibération méconnaît les dispositions des articles L. 151-2 et L. 151-5 du code de l'urbanisme, en l'absence de projet d'aménagement et de développement durables propre à la commune de Bangor ;
- le classement du village de Bordrouhant en zone N n'est pas cohérent avec les orientations du projet d'aménagement et de développement durables ;
- le classement en zone 1AU, d'urbanisation future, de trois secteurs proches du centre-bourg et d'un secteur proche du hameau de Kervilahouen n'est pas cohérent avec les orientations du schéma de cohérence territoriale (SCOT) du Pays d'Auray ;
- les trois zones d'urbanisation future proches du centre-bourg au plan local d'urbanisme méconnaissent les dispositions de la loi littorale, en ce qu'elles ne sont pas situées en continuité avec une agglomération existante ; le plan local d'urbanisme est intervenu à tort avant que le SCOT applicable prenne en compte la loi dite ELAN ;
- le classement en zone N de la parcelle ZR n°106 et du village de Bordrouhant, ainsi que le classement en zone Ns pour la partie sud de la parcelle, sont entachés d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaissent les dispositions de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 octobre 2023, la commune de Bangor, représentée par Me Gourvennec et Me Maccario, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de M. et Mme D... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rivas,
- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,
- les observations de Me Vendé, représentant M. et Mme D..., et E..., substituant Me Gourvennec et Me Maccario, représentant la commune de Bangor.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme D... sont propriétaires d'une parcelle cadastrée section ZR 106 située au lieu-dit Bordrouhant à Bangor (Morbihan). Par une délibération du 5 mars 2020, le conseil municipal de cette commune a approuvé son plan local d'urbanisme. M. et Mme D... ont demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'intégralité de cette délibération et, subsidiairement, de l'annuler en tant qu'elle classe leur parcelle en zone naturelle N. Par un jugement du 13 janvier 2023, dont ils relèvent appel, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En premier lieu, M. et Mme D... soutiennent que le jugement attaqué n'a pas répondu au moyen qu'ils ont soulevé, tiré de l'absence de débat en conseil municipal sur le projet d'aménagement et de développement durables (PADD) communal, en méconnaissance de l'article L. 123-9 du code de l'urbanisme. Toutefois, au point 13 de ce jugement il est répondu à ce moyen. Par suite, l'irrégularité alléguée du jugement en l'absence de réponse à ce moyen manque en fait et doit être écartée.
3. En second lieu, M. et Mme D... ont soulevé en première instance le moyen tiré de ce que le classement en zone 1AU d'un secteur jouxtant le hameau de Kervilahouen est incompatible avec les dispositions du schéma de cohérence territoriale (SCOT) du Pays d'Auray, alors applicable, réglementant les extensions de hameaux. Le jugement attaqué n'a pas répondu à ce moyen, qui n'était pas inopérant et ne l'a pas visé. Par suite, M. et Mme D... sont fondés à soutenir que le jugement attaqué doit être annulé, en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions relatives à la zone 1AU de Kervilahouen, pour irrégularité.
4. Il y a lieu en conséquence pour la cour administrative d'appel de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur les conclusions de M. et Mme D... relatives à la zone 1AU de Kervilahouen et de statuer par l'effet dévolutif de l'appel sur les autres conclusions présentées par ces derniers devant le tribunal administratif de Rennes.
Sur les conclusions à fin d'annulation de la délibération du 5 mars 2020 de la commune de Bangor en tant qu'elle concerne le classement en zone 1Au d'un secteur proche du hameau de Kervilahouen :
5. Aux termes de l'article L. 131-4 du code de l'urbanisme : " Les plans locaux d'urbanisme (...) sont compatibles avec : / 1° Les schémas de cohérence territoriale (...). ".
6. A l'exception des cas limitativement prévus par la loi dans lesquels les schémas de cohérence territoriale peuvent contenir des normes prescriptives, ceux-ci doivent se borner à fixer des orientations et des objectifs. Les plans locaux d'urbanisme sont soumis à une simple obligation de compatibilité avec ces orientations et objectifs. Si ces derniers peuvent être en partie exprimés sous forme quantitative, il appartient aux auteurs des plans locaux d'urbanisme, qui déterminent les partis d'aménagement à retenir en prenant en compte la situation existante et les perspectives d'avenir, d'assurer, ainsi qu'il a été dit, non leur conformité aux énonciations des schémas de cohérence territoriale, mais leur compatibilité avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent. Pour apprécier la compatibilité d'un plan local d'urbanisme avec un schéma de cohérence territoriale, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle de l'ensemble du territoire couvert en prenant en compte l'ensemble des prescriptions du document supérieur, si le plan ne contrarie pas les objectifs qu'impose le schéma, compte tenu des orientations adoptées et de leur degré de précision, sans rechercher l'adéquation du plan à chaque disposition ou objectif particulier.
7. Le document d'orientation et d'objectifs (DOO) du SCOT du Pays d'Auray, dans sa version applicable le 5 mars 2020, prévoit parmi ses objectifs, " une gestion économe de l'espace pour une valorisation patrimoniale " et à ce titre " une utilisation optimale des espaces artificialisés existants ". A ce titre il se fixe une " action 1 : prioriser l'intensification des espaces urbanisés existants. ".
8. Il ressort des pièces du dossier que le plan local d'urbanisme contesté prévoit la réalisation d'une zone 1Au de petite taille aux abords immédiats du lieu-dit Kervilahouen. La création de cette zone n'est pas, par elle-même, de nature à établir une incompatibilité avec le DOO du SCOT du Pays d'Auray en tant qu'il privilégie la densification des espaces urbanisés existants, alors que le SCOT identifie le secteur de Kervilahouen comme un village au titre de la loi littoral. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le plan local d'urbanisme empêcherait cette densification dans ce secteur, alors que l'une des orientations du PADD vise explicitement à " Organiser un développement modéré du village de Kervilahouen ". Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompatibilité, au regard du lieu-dit Kervilahouen, entre le plan local d'urbanisme contesté et l'objectif précité du DOO du SCOT du Pays d'Auray doit être écarté.
Sur les autres conclusions présentées par M. et Mme D... sur lesquelles il est statué par l'effet dévolutif de l'appel :
9. En premier lieu, aux termes de l'article L. 2121-18 du code général des collectivités territoriales : " Les séances des conseils municipaux sont publiques. Néanmoins, sur la demande de trois membres ou du maire, le conseil municipal peut décider, sans débat, à la majorité absolue des membres présents ou représentés, qu'il se réunit à huis clos (...). ".
10. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'une requête tendant à l'annulation d'une délibération adoptée par le conseil municipal à l'issue d'une séance à huis clos, de contrôler que la décision de recourir au huis clos, autorisée par les dispositions précitées de l'article L. 2121-18 du code général des collectivités territoriales, ne repose pas sur un motif matériellement inexact et n'est pas entachée d'erreur de droit, d'erreur manifeste d'appréciation ou de détournement de pouvoir.
11. Il ressort des pièces du dossier que par une délibération adoptée le 5 mars 2020, en début de réunion du conseil municipal, cette instance a décidé de siéger à huis clos sur le fondement des dispositions précitées, au motif de la propagation du virus du COVID-19 sur le territoire national, plus particulièrement dans le Morbihan à cette date, et des risques subséquents pour la santé publique, afin de prévenir " tout comportement de nature à augmenter ou favoriser les risques de contagion ". La délibération contestée du 5 mars 2020 adoptant le plan local d'urbanisme communal est intervenue lors de cette réunion. M. et Mme D... font essentiellement valoir qu'à cette date, cette pandémie n'avait pas encore gagné Belle-Île-en-mer et la commune de Bangor, tandis que le préfet du Morbihan avait abrogé son arrêté de la veille interdisant certains rassemblements dans certaines communes, dont celle de Bangor, et que les élections municipales se sont tenues les 15 et 22 mars 2020. Cependant, eu égard aux incertitudes relatives à cette pandémie, dont ses modes de contamination, à une période où elle débutait, conduisant à des évolutions rapides et radicales dans l'organisation de la vie quotidienne de la population nationale, M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que la décision de siéger à huis clos serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ou reposerait sur un motif matériellement inexact, ni par suite, que la délibération qu'ils contestent serait intervenue au terme d'une procédure irrégulière.
12. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, depuis lors codifié à l'article L. 151-2 de ce code : " Le plan local d'urbanisme (...) comprend un rapport de présentation, un projet d'aménagement et de développement durables, des orientations d'aménagement et de programmation, un règlement et des annexes. ". Aux termes de l'article L. 123-1-3 du même code, depuis lors codifié à l'article L. 151-5 de ce code : " Le projet d'aménagement et de développement durables définit les orientations générales des politiques d'aménagement, d'équipement, d'urbanisme, de paysage, de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers, et de préservation ou de remise en bon état des continuités écologiques. (...) / Il fixe des objectifs chiffrés de modération de la consommation de l'espace et de lutte contre l'étalement urbain. ". Aux termes de l'article L. 123-9 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Un débat a lieu au sein de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale et des conseils municipaux ou, dans le cas prévu par le deuxième alinéa de l'article L. 123-6, du conseil municipal sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables mentionné à l'article L. 123-1-3, au plus tard deux mois avant l'examen du projet de plan local d'urbanisme. (...) ".
13. Il ressort des pièces du dossier que par une délibération du 15 décembre 2015 le conseil municipal de Bangor a débattu, dans le respect des dispositions précitées, des orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables communal. La circonstance que des élus des quatre communes de l'île ont débattu en amont de ces orientations, en associant la population insulaire, afin d'établir des orientations communes à ces collectivités n'est pas de nature à établir une méconnaissance des dispositions précitées alors qu'il a bien été débattu des orientations communales par le conseil municipal de Bangor le 15 décembre 2015 et que B... adopté énonce explicitement des orientations qui sont spécifiques à cette commune. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté.
14. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ".
15. Pour apprécier la cohérence ainsi exigée au sein du plan local d'urbanisme entre le règlement et le projet d'aménagement et de développement durables, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d'une analyse globale le conduisant à se placer à l'échelle du territoire couvert par le document d'urbanisme, si le règlement ne contrarie pas les orientations générales et objectifs que les auteurs du document ont définis dans le projet d'aménagement et de développement durables, compte tenu de leur degré de précision. Par suite, l'inadéquation d'une disposition du règlement du plan local d'urbanisme à une orientation ou un objectif du projet d'aménagement et de développement durables ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l'existence d'autres orientations ou objectifs au sein de ce projet, à caractériser une incohérence entre ce règlement et ce projet.
16. Au titre de l'axe 1er intitulé " Préserver un développement urbain raisonné pour préserver la qualité du cadre de vie de Belle-Île-en-Mer ", B... prévoit notamment, comme orientation, de " privilégier le renouvellement urbain au sein des centres-bourgs " et notamment, à ce titre, de " permettre les opérations de densification dans le tissu pavillonnaire " et de " conforter l'urbanisation des centres bourgs afin d'accueillir une population de permanents et de services de proximité. ". Il prévoit également au titre des orientations de " répondre à un objectif de croissance mesurée en privilégiant l'implantation de résidences principales ". A ce titre il décide de " privilégier le développement urbain en continuité directe des agglomérations " et de " conforter le pôle urbain de Bangor en définissant des limites claires à l'urbanisation dans un souci de préservation de leurs qualités urbaine, identitaire et patrimoniale. ". Le 3ème axe de ce PADD intitulé " Préserver et valoriser les espaces naturels de Belle-Ile-en-mer, atouts indéniables du territoire ", énonce comme orientation de " conserver les grands équilibres paysagers de l'île. ".
17. Il ressort des pièces du dossier que le lieu-dit Bordrouhant, pour sa partie supportant des habitations et leurs abords, est classé au plan local d'urbanisme contesté en zone N à protéger en raison soit de la qualité des sites, des milieux naturels, des paysages et de leurs intérêts, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique, ou en raison de l'existence d'exploitations forestières. En conséquence de ce classement les possibilités de construire y sont limitées. Une partie de ce lieu-dit est également classée en espace proche du rivage au sens de la loi littoral.
18. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le lieu-dit Bordrouhant est clairement distinct du centre-bourg de Bangor dont il est séparé par une vaste zone dépourvue de constructions, classée en zone agricole au plan local d'urbanisme. Par ailleurs, l'orientation prévoyant le " renouvellement urbain au sein des centres-bourgs ", et prévoyant consécutivement des opérations de densification dans le tissu pavillonnaire, ne s'applique pas à ce lieu-dit dont il vient d'être dit qu'il est distinct du centre-bourg et qui, en tout état de cause, ne constitue pas un tel tissu pavillonnaire mais un secteur d'habitat diffus. Du reste, ce secteur n'a pas été identifié par le SCOT du Pays d'Auray applicable en l'espèce comme un espace urbanisé existant. Par ailleurs, contrairement à ce qui est soutenu par M. et Mme D..., B... ne se fixe pas pour orientation de " combler les espaces interstitiels vacants des hameaux tout en respectant les limites actuelles du bâti ", y compris au regard de la carte intitulée " projet d'aménagement et de développement durables - Bangor ".
19. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que le plan local d'urbanisme prévoit aux abords immédiats du centre-bourg de Bangor la création de trois zones à urbaniser classées à ce titre en 1AU. Ces zonages sont cohérents avec l'orientation du PADD visant à conforter l'urbanisation du centre-bourg de Bangor et ils n'interdisent pas le renouvellement urbain de ce dernier.
20. Par suite, M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir, pour les motifs exposés aux deux points précédents, qu'il y aurait des incohérences entre B... et le règlement du plan local d'urbanisme.
21. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier, et eu égard aux dispositions et mentions figurant aux points 16 à 18, que le plan local d'urbanisme contesté prévoit la réalisation de trois zones 1AU, d'urbanisation différée, de superficies limitées, aux abords immédiats du centre-bourg de Bangor. Cette seule circonstance n'est pas de nature à caractériser une incompatibilité avec l'orientation du SCOT du Pays d'Auray tendant à " prioriser " la densification des espaces urbanisés existants. Par ailleurs, les conditions de desserte de l'une de ces zones 1AU ou l'existence d'une interruption de l'urbanisation d'une quarantaine de mètres entre le lieu-dit Kerprad et le centre-bourg de Bangor sont sans incidence sur l'appréciation à porter sur l'incompatibilité alléguée entre le plan local d'urbanisme et l'objectif précité du DOO du SCOT au regard des dispositions citées au point précédent. En outre, ainsi qu'il a été exposé au point 8, le plan local d'urbanisme crée également une zone 1AU aux abords immédiats du lieu-dit Kervilahouen. Cette création, appréciée cumulativement avec celles prévues aux abords du centre-bourg de Bangor, n'apparaît pas davantage incompatible avec le DOO du SCOT du Pays d'Auray, qui privilégie la densification des espaces urbanisés existants. Enfin il ressort clairement du règlement graphique du plan local d'urbanisme que la densification des espaces urbanisés est valorisée, indépendamment de la création de ces zones 1AU à proximité de Kervilahouen et du centre-bourg de Bangor. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incompatibilité entre le plan local d'urbanisme contesté et l'objectif précité du DOO du SCOT du Pays d'Auray doit être écarté.
22. En cinquième lieu, il résulte des dispositions des articles L. 131-4 et L. 131-7 du code de l'urbanisme, que, s'agissant d'un plan local d'urbanisme, il appartient à ses auteurs de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de sa compatibilité avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral. Dans le cas où le territoire concerné est couvert par un schéma de cohérence territoriale, cette compatibilité s'apprécie en tenant compte des dispositions de ce document relatives à l'application des dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral, sans pouvoir en exclure certaines au motif qu'elles seraient insuffisamment précises, sous la seule réserve de leur propre compatibilité avec ces dernières.
23. Aux termes de l'article L. 121-3 du code de l'urbanisme : " (...) Le schéma de cohérence territoriale précise, en tenant compte des paysages, de l'environnement, des particularités locales et de la capacité d'accueil du territoire, les modalités d'application des dispositions du présent chapitre. Il détermine les critères d'identification des villages, agglomérations et autres secteurs déjà urbanisés prévus à l'article L. 121-8, et en définit la localisation. " et aux termes de l'article L. 121-8 de ce code : " L'extension de l'urbanisation se réalise en continuité avec les agglomérations et villages existants. / Dans les secteurs déjà urbanisés autres que les agglomérations et villages identifiés par le schéma de cohérence territoriale et délimités par le plan local d'urbanisme, des constructions et installations peuvent être autorisées, en dehors de la bande littorale de cent mètres, des espaces proches du rivage et des rives des plans d'eau mentionnés à l'article L. 121-13, à des fins exclusives d'amélioration de l'offre de logement ou d'hébergement et d'implantation de services publics, lorsque ces constructions et installations n'ont pas pour effet d'étendre le périmètre bâti existant ni de modifier de manière significative les caractéristiques de ce bâti. Ces secteurs déjà urbanisés se distinguent des espaces d'urbanisation diffuse par, entre autres, la densité de l'urbanisation, sa continuité, sa structuration par des voies de circulation et des réseaux d'accès aux services publics de distribution d'eau potable, d'électricité, d'assainissement et de collecte de déchets, ou la présence d'équipements ou de lieux collectifs. ". Il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions, mais que, en revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages.
24. D'une part, il ressort des pièces du dossier que les zones 1Au situées aux abords immédiats du centre-bourg de Bangor sont prévues en continuité immédiate de ce centre bourg, qui comprend un nombre et une densité significatifs de constructions au sens de l'article L. 121-8 précité du code de l'urbanisme, alors même qu'elles n'auraient pas toutes un accès direct immédiat à une rue. D'autre part, le SCOT du Pays d'Auray, dans sa rédaction applicable à la date d'adoption de la délibération contestée, n'avait pas déterminé de critères d'identification des villages, agglomérations et autres secteurs déjà urbanisés prévus à l'article L. 121-8 et leur localisation. Or il ne résulte d'aucune disposition que les auteurs d'un plan local d'urbanisme ne pouvaient, dans cette attente, adopter un nouveau plan local d'urbanisme et y délimiter des zones 1AU, identifier des " critères de classification des entités urbaines significatives " ou classer le lieu-dit Bordrouhant en zone N. Par suite, il n'est pas établi que, pour les motifs qui viennent d'être évoqués, la délibération contestée serait intervenue en méconnaissance des dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral.
25. En sixième lieu, aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. / Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. / Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées. ". Aux termes de l'article R. 151-24 de ce code : " Les zones naturelles et forestières sont dites " zones N ". Peuvent être classés en zone naturelle et forestière, les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison : / 1° Soit de la qualité des sites, milieux et espaces naturels, des paysages et de leur intérêt, notamment du point de vue esthétique, historique ou écologique ; / 2° Soit de l'existence d'une exploitation forestière ; / 3° Soit de leur caractère d'espaces naturels ; / 4° Soit de la nécessité de préserver ou restaurer les ressources naturelles ; / 5° Soit de la nécessité de prévenir les risques notamment d'expansion des crues. ". Par ailleurs, aux termes de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme : " Les documents et décisions relatifs à la vocation des zones ou à l'occupation et à l'utilisation des sols préservent les espaces terrestres et marins, sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine naturel et culturel du littoral, et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques. (...) ".
26. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Ils peuvent être amenés, à cet effet, à modifier le zonage et à classer en zone naturelle, pour les motifs énoncés à l'article R. 151-24 précité, un secteur qu'ils entendent soustraire pour l'avenir à l'urbanisation, sous réserve que l'appréciation à laquelle ils se livrent ne repose pas sur des faits matériellement inexacts et ne soit pas entachée d'erreur manifeste.
27. En l'espèce, le règlement du plan local d'urbanisme classe en zone N (naturelle), sur le fondement du 1° de l'article R. 151-24 du code de l'urbanisme, le lieu-dit Bordrouhant pour sa partie comprenant des maisons d'habitation, et la partie sud de ce secteur, dépourvue de constructions, en zone Ns au titre des espaces naturels " délimitant les espaces naturels sensibles et les sites et paysages remarquables ou caractéristiques du patrimoine du littoral et les milieux nécessaires au maintien des équilibres biologiques ou présentant un intérêt écologique " visés à l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme. La parcelle des requérants est pour sa partie nord classée en zone N et pour sa partie sud, majoritaire, en zone Ns.
28. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le lieu-dit Bordrouhant classé en zone N comprend une trentaine de constructions édifiées de manière diffuse sur de grandes parcelles dans un espace ayant conservé un caractère naturel en raison de la présence de nombreux boisements. Ce lieu-dit est situé non loin du littoral, dont il est séparé par un espace naturel, classé en zone Ns au titre de la loi littoral et protégé au titre de zones Natura 2000. La commune précise également qu'il appartient, eu égard à la topographie, à la façade maritime de la commune alors que certaines des constructions de ce lieu-dit sont incluses en " espace proche du rivage ". Or, d'une part les auteurs du règlement du plan local d'urbanisme ont classé en zone N divers secteurs, dont celui en débat, afin de " préserver les caractéristiques paysagères, environnementales remarquables de Bangor " ainsi qu'il résulte des objectifs précisés en présentation de la zone N dans ce règlement. Par ailleurs, B... expose, au titre de l'axe 3 " préserver et valoriser les espaces naturels de Belle-Île-en-mer, atouts indéniables du territoire ", qu'il s'agit de " conserver les grands équilibres paysagers de l'île " et de préserver le " maintien du caractère naturel de la façade littoral. ". Par suite, et alors que M. et Mme D... ne peuvent utilement se prévaloir par comparaison du classement de divers autres lieux-dits de la commune, c'est sans erreur manifeste d'appréciation que le lieu-dit Bordrouhant a été classé en zone N, comprenant la partie nord de la parcelle dépourvue de construction de M. et Mme D... qui s'ouvre directement sur la zone Ns en direction du littoral.
29. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que les auteurs du plan local d'urbanisme ont classé en zone Ns un vaste secteur à caractère totalement naturel, protégé notamment au titre des sites Natura 2000 et comprenant des zones naturelles d'intérêt écologique faunistique et floristique (ZNIEFF), situé entre le lieu-dit Bordrouhant et le littoral, qui se trouve en contre-bas et distant d'environ 700 mètres. La partie de la parcelle de M. et Mme D... classée au sein de cette zone présente un tel caractère naturel et borde la zone protégée au titre du site Natura 2000. Par suite, c'est au terme d'une exacte application des dispositions de l'article L. 121-23 du code de l'urbanisme que cette partie de la parcelles ZR 106 a été classée en zone Ns.
30. Il résulte de tout ce qui précède que M et Mme D... ne sont pas fondés à demander l'annulation de la délibération du 5 mars 2020 par laquelle le conseil municipal de Bangor a approuvé son plan local d'urbanisme en tant qu'elle institue une zone 1Au au lieu-dit Kervilahouen, ni à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté le surplus de leur conclusions tendant à l'annulation de cette délibération tant dans son intégralité qu'en ce qu'elle classe leur parcelle cadastrée ZR 106 en zone N et en zone Ns.
Sur les conclusions aux fins d'injonction sous astreinte :
31. Eu égard à ce qui précède, les conclusions présentées par M. et Mme D... afin qu'il soit enjoint à la maire de Bangor de mettre à l'ordre du jour du prochain conseil municipal de cette commune la modification du plan local d'urbanisme afin de classer leur parcelle ZR 106 en zone UC, sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt, ne peuvent, en tout état de cause, qu'être rejetées.
Sur les frais d'instance :
32. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à l'octroi d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à la partie perdante. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par M. et Mme D.... En revanche, il convient, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme D..., sur le fondement des mêmes dispositions, la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune de Bangor.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2003583 du tribunal administratif de Rennes du 13 janvier 2023 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. et Mme D... relatives au classement en zone 1AU d'un secteur du lieu-dit Kervilahouen.
Article 2 : La demande présentée par M. et Mme D... devant le tribunal administratif de Rennes relative au classement en zone 1AU d'un secteur du lieu-dit de Kervilahouen et le surplus des conclusions de la requête sont rejetés.
Article 3 : M. et Mme D... verseront à la commune de Bangor la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... et C... D... et à la commune de Bangor.
Délibéré après l'audience du 23 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Degommier, président de chambre,
- M. Rivas, président assesseur,
- Mme Dubost, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 février 2025.
Le rapporteur,
C. RIVAS
Le président,
S. DEGOMMIER
La greffière,
S. PIERODÉ
La République mande et ordonne au préfet du Morbihan en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23NT00682