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11/02/2025 | FRANCE | N°24NT00570

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 6ème chambre, 11 février 2025, 24NT00570


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



I°) Sous le n° 2302930, M. B... C... a demandé, dans le dernier état de ses écritures, au tribunal administratif de Nantes, tout d'abord, d'annuler la décision du 23 février 2023 par laquelle la commission de recours contre la décision de refus de visa d'entrée en France, saisie d'un recours administratif préalable obligatoire formé contre la décision de l'autorité consulaire française à Alger (Algérie) refusant de lui délivrer un visa de court sé

jour, a refusé de délivrer le visa sollicité, ensuite, d'enjoindre au ministre de l'intérie...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I°) Sous le n° 2302930, M. B... C... a demandé, dans le dernier état de ses écritures, au tribunal administratif de Nantes, tout d'abord, d'annuler la décision du 23 février 2023 par laquelle la commission de recours contre la décision de refus de visa d'entrée en France, saisie d'un recours administratif préalable obligatoire formé contre la décision de l'autorité consulaire française à Alger (Algérie) refusant de lui délivrer un visa de court séjour, a refusé de délivrer le visa sollicité, ensuite, d'enjoindre au ministre de l'intérieur et des outre-mer de faire délivrer le visa sollicité dans un délai de huit jours à compter de la notification de la décision à intervenir ensuite, enfin, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros à lui verser en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2°) Sous le n°2302911, Mme A... D... épouse C... a demandé, dans le dernier état de ses écritures, au tribunal administratif de Nantes, tout d'abord, d'annuler la décision du 23 février 2023 par laquelle la commission de recours contre la décision de refus de visa d'entrée en France, saisie d'un recours administratif préalable obligatoire formé contre la décision de l'autorité consulaire française à Alger (Algérie) refusant de lui délivrer un visa de court séjour, a refusé de délivrer le visa sollicité, ensuite, d'enjoindre au ministre de l'intérieur et des outre-mer de faire délivrer le visa sollicité dans un délai de huit jours à compter de la notification de la décision à intervenir ensuite, enfin, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros à lui verser en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement nos2302911, 2302930 du 26 décembre 2023, le tribunal administratif de Nantes a rejeté les demandes.

Procédure devant la cour :

I°) Par une requête enregistrée le 25 février 2024, sous le n°24NT00570, M. B... C..., représenté par Me Boudjellal, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 26 décembre 2023 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision du 23 février 2023 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours, réceptionné le 17 octobre 2022, contre la décision de l'autorité diplomatique française refusant de délivrer à un visa pour visite familiale ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer le visa sollicité dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France contestée est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de leur situation personnelle dès lors, en particulier qu'elle ne vise pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors qu'il remplissait toutes les conditions pour l'obtention d'un visa de court séjour et en l'absence de tout risque de détournement de l'objet des visas sollicités ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mars 2024, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par M. C... n'est fondé et s'en remet à ses écritures de première instance.

II°) Par une requête enregistrée le 25 février 2024, sous le n°24NT00571, Mme D..., épouse C..., représentée par Me Boudjellal, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 26 décembre 2023 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision du 23 février 2023 par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours et refusé de délivrer un visa pour visite familiale ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui délivrer le visa sollicité dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Il soutient que :

- la décision de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France contestée est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de leur situation personnelle dès lors, en particulier qu'elle ne vise pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur d'appréciation dès lors qu'il remplissait toutes les conditions pour l'obtention d'un visa de court séjour et en l'absence de tout risque de détournement de l'objet des visas sollicités ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 mars 2024, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par Mme D..., épouse C... n'est fondé et s'en remet à ses écritures de première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Coiffet.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... C... et Mme A... D..., épouse C..., ressortissants algériens nés respectivement le 5 août 1954 et le 8 février 1961, ont sollicité la délivrance de visas d'entrée et de court séjour pour visite familiale auprès de l'autorité consulaire à Alger (Algérie), laquelle a rejeté leurs demandes par des décisions du 1er décembre et 29 novembre 2022. Saisie de recours administratifs préalables obligatoires formés contre ces refus consulaires, la commission de recours contre les refus de visa d'entrée en France a rejeté ces recours et refusé de délivrer les visas sollicités par une même décision du 23 février 2023.

2. M. C... et son épouse ont, le 27 février 2023, saisi le tribunal administratif de Nantes de demandes tendant, d'une part, à l'annulation de la décision du 23 février 2023 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de leur délivrer les visas sollicités. Par un jugement du 1er décembre 2023, cette juridiction a rejeté leurs demandes. Ils relèvent appel de ce jugement et sollicitent l'annulation de la décision précitée du 23 février 2023.

3. Les requêtes susvisées n° 24NT00570 et n° 24NT00571 sont dirigées contre le même jugement. Par suite, il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur les conclusions dirigées contre la décision 23 février 2023 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France :

4. Il ressort des pièces du dossier de première instance que la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté les recours présentés par les époux C... aux motifs de leur situation personnelle en relevant, d'une part, que " M. B..., 68 ans qui a été opéré le 15 décembre 2017 d'une pathologie grave nécessite une surveillance étroite et régulière à vie " et, d'autre part, que " son épouse, 61 ans a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français le 27 mai 2020, un de leur fils résidant en France ", et " qu'en l'absence de garanties de retour suffisamment probantes, il existe un risque de détournement de l'objet du visa sollicité pour raisons familiales, notamment médicales pour M. C... et migratoires pour son épouse ".

5. En premier lieu, s'agissant de M. C..., il ressort des pièces versées au dossier, d'une part, que si ce dernier a subi effectivement une intervention en France le 15 décembre 2017 imposant alors, selon le spécialiste en urologie qui l'avait opéré, " une surveillance étroite et régulière à vie ", sans traitement particulier prescrit, l'intéressé a versé aux débats de première instance une attestation médicale établie le 18 juillet 2023 par ce même médecin qui certifie que " opéré d'une néphrectomie droite, M. C... est en bon état général et que les examens qui ont été faits dans le cadre du suivi, ne présentent aucun signe de récidive. Il est en rémission complète ". D'autre part, s'il est avancé dans la décision contestée, " l'absence de garanties de retour suffisamment probantes ", M. C... justifiait au contraire qu'inscrit depuis le 2 mai 1998 en qualité de médecin Spécialiste Médecin généraliste, il était à la date de la décision contestée toujours en activité en cabinet, affilié à une caisse de sécurité sociale, percevait des revenus suffisants et était assujetti à l'impôt sur le revenu. Enfin, contrairement à ce que faisait valoir l'administration dans ses écritures de première instance, sans l'étayer en aucune façon, il n'est redevable d'aucun frais afférents à l'intervention qu'il a subie en 2017. Il justifie, en effet, avoir acquitté personnellement, le 21 décembre 2017, une somme de 8 924 euros auprès de l'établissement privé d'hospitalisation qui l'a pris en charge et joint également une attestation du 7 novembre 2019 par laquelle le comptable public du centre hospitalier de Mantes la Jolie certifie qu'il a réglé les soins de consultation et de soins externes facturés. Par ailleurs, il justifie qu'il avait également souscrit pour une durée de 31 jours - soit du 25 décembre 2022 au 24 janvier 2023 - une assurance voyage et assistance à l'étranger alors qu'il avait indiqué, dans sa demande de visa Schengen, vouloir se rendre en France pour raisons familiales du 15 décembre 2022 au 4 janvier 2023. Il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'administration a commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'il existait un risque de détournement de l'objet du visa sollicité, notamment pour des raisons médicales, par M. C....

6. En second lieu, s'agissant de Mme A... D..., épouse C..., si cette dernière a effectivement fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français le 27 mai 2020 prise sur le fondement d'un refus de délivrance d'un titre de séjour en qualité d'ascendante à charge de son fils, ressortissant français, il ne ressort d'aucune pièce du dossier qu'elle était encore présente sur le territoire français et s'y maintenait irrégulièrement lors de l'intervention de cette mesure d'éloignement. Dans ces conditions, cette seule circonstance alors, ainsi qu'il a été dit au point précédent, que " l'absence de garanties de retour suffisamment probantes " retenue dans la décision contestée n'est pas établie, ne permet pas de caractériser un détournement de l'objet du visa pour " raisons migratoires ". Par suite, la décision du 23 février 2023 est, s'agissant de Mme C..., également entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M.et Mme C... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes dirigées contre la décision du 23 février 2023 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France leur refusant à chacun la délivrance d'un visa pour raisons familiales et a demandé l'annulation de cette décision.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Eu égard à ces motifs, le présent arrêt implique nécessairement qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de délivrer à M. et Mme C... un visa dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais d'instance :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. et Mme C... d'une somme globale de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement nos2302911, 2302930 du 4 décembre 2023 du tribunal administratif de Nantes et la décision du 23 février 2023 de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur de délivrer à M. C... et à Mme D..., épouse C..., un visa dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera globalement à M. et Mme C... une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et à Mme A... D..., épouse C..., et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 24 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- M. Pons, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 février 2025.

Le rapporteur,

O. COIFFETLe président,

O. GASPON

La greffière,

I.PETTON

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Nos24NT00570 - 24NT00571 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NT00570
Date de la décision : 11/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: Mme BAILLEUL
Avocat(s) : BOUDJELLAL

Origine de la décision
Date de l'import : 16/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-11;24nt00570 ?
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