Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2023 par lequel le préfet de la Sarthe lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office et d'enjoindre au préfet de la Sarthe de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans un délai de sept jours.
Par un jugement n° 2315769 du 4 avril 2024, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 27 septembre 2024, Mme B..., représentée par Me Renaud, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 4 avril 2024 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2023 du préfet de la Sarthe ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans cette attente, un récépissé de demande de carte de séjour l'autorisant à travailler, dans un délai de sept jours ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
sur l'obligation de quitter le territoire français :
- son droit à être entendue a été méconnu ;
- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
sur la décision fixant le pays de destination :
- la décision est insuffisamment motivée, ce qui révèle un défaut d'examen particulier de sa situation ;
- la décision est illégale en raison de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ;
- la décision méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
La requête a été communiquée au préfet de la Sarthe qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 novembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport D... Picquet a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... B..., ressortissante guinéenne née en mai 1990, est entrée en France en janvier 2021. Elle a déposé une demande d'asile qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 25 mai 2023. Son recours contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a été rejeté par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 15 septembre 2023. Par un arrêté du 4 octobre 2023, le préfet de la Sarthe a fait obligation à Mme B... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation de l'arrêté du 4 octobre 2023. Par un jugement du 4 avril 2024, le tribunal a rejeté sa demande. Mme B... fait appel de ce jugement.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
2. En premier lieu, il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge le moyen tiré de la méconnaissance du droit de l'intéressée à être entendue, Mme B... n'apportant aucun nouvel élément en appel.
3. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
4. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... est entrée en France le 27 janvier 2021, soit depuis moins de trois ans à la date de l'arrêté contesté. Si elle vit en couple avec M. A..., qu'elle a rencontrée en Italie, et avec qui elle a eu un enfant né en janvier 2024, postérieurement à l'arrêté contesté, son compagnon est de la même nationalité qu'elle et il n'est ni établi ni même allégué qu'il serait en situation régulière en France. Rien ne fait obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue en Guinée, où réside le fils ainé D... Mme B.... Enfin, si Mme B... établit avoir contacté en 2023 un avocat afin d'engager la responsabilité d'un établissement hospitalier en raison du décès, le 26 novembre 2022, de la première fille du couple, née le 14 novembre 2022, il n'est pas contesté qu'aucune procédure n'avait encore été engagée à la date de la décision contestée et qu'au 23 octobre 2024, seule une demande d'aide juridictionnelle a été déposée, en vue du dépôt d'une requête en référé-instruction. Par conséquent, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
Sur la décision fixant le pays de destination :
5. En premier lieu, il résulte des points 2 à 4 que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.
6. En deuxième lieu, il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge les moyens tirés de ce que la décision fixant le pays de destination serait insuffisamment motivée, ce qui révèlerait un défaut d'examen particulier de sa situation, que Mme B... reprend en appel sans apporter d'éléments nouveaux.
7. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut désigner comme pays de renvoi : / 1° Le pays dont l'étranger a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu la qualité de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; / 2° Un autre pays pour lequel un document de voyage en cours de validité a été délivré en application d'un accord ou arrangement de réadmission européen ou bilatéral ; / 3° Ou, avec l'accord de l'étranger, tout autre pays dans lequel il est légalement admissible./ Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ". L'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule quant à lui que : " " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
8. Mme B... soutient qu'elle est exposée à des risques de traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine dès lors qu'elle a été bannie par son père après avoir refusé un mariage forcé et qu'elle a été violée par son beau-père. Toutefois, elle ne produit aucune pièce permettant d'établir qu'elle serait personnellement et directement exposée à des risques pour sa sécurité en cas de retour dans son pays d'origine. Au demeurant, la demande d'asile présentée par Mme B... a été rejetée par les instances chargées de l'asile. Dès lors, les moyens tirés de la méconnaissance, par la décision fixant le pays de destination, des dispositions de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés.
9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 octobre 2023 du préfet de la Sarthe. Ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles tendant au bénéfice des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête D... B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B..., à Me Renaud et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise, pour information, au préfet de la Sarthe.
Délibéré après l'audience du 11 mars 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président,
- M. Derlange, président assesseur,
- Mme Picquet, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 mars 2025.
La rapporteure,
P. PICQUET
Le président,
L. LAINÉ
Le greffier,
C. WOLF
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24NT02840