Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... C... épouse B... a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 19 janvier 2021 par laquelle le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour.
Par un jugement n° 2101972 du 9 octobre 2024, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la requête de Mme B....
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 31 octobre 2024. Mme B..., représentée par Me Kaddouri, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes en date du 9 octobre 2024 ;
2°) d'annuler la décision du 19 janvier 2021 par laquelle le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour ;
3°) d'enjoindre au préfet de Maine et Loire de lui délivrer un titre de séjour ou à défaut de réexaminer sa situation administrative dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de deux cents euros par jour de retard, et de lui délivrer une autorisation de séjour et de travail en attendant qu'il soit statué à nouveau sur sa demande ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1800 euros à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve du renoncement de son conseil à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Elle soutient que :
- la décision est insuffisamment motivée ;
- la décision méconnait le droit protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense enregistré le 13 mars 2025, le préfet de Maine et Loire conclut au rejet de la requête.
Mme B... a été admise à l'aide juridictionnelle partielle à hauteur de 25 % par décision du 10 janvier 2025.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Viéville,
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante marocaine née en1980, est entrée en France le 22 août 2016 sous couvert d'un visa de court séjour. Elle s'est mariée le 19 octobre 2019 avec M. B..., ressortissant marocain titulaire d'un titre de séjour salarié et un enfant est né de leur relation le 25 janvier 2019. Le 20 août 2020, Mme B... a sollicité du préfet de Maine-et-Loire un titre de séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par une décision du 19 janvier 2021, le préfet de Maine-et-Loire a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité. Par un jugement du 9 octobre 2024, le tribunal a rejeté la requête de Mme B... tendant à l'annulation de cette décision. Mme B... relève appel de ce jugement.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. Aux termes de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version en vigueur à la date de la décision attaquée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...). ". En outre, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que l'appelante, entrée sur le territoire français quatre ans et demi avant la décision attaquée, s'est mariée à Angers le 19 octobre 2019 avec M. B..., ressortissant marocain titulaire d'un titre de séjour salarié. Le couple a eu un enfant né le 25 janvier 2019. La relation avec M. B... apparait ainsi antérieure au mariage et la circonstance opposée par le préfet que le mari de l'appelante aurait divorcé de sa précédente épouse en 2018 n'est pas de nature à établir que cette relation ne serait pas stable. Dans les circonstances de l'espèce, et alors même que l'intéressée pourrait bénéficier du regroupement familial, le préfet, en prenant la décision attaquée, a porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette mesure a été prise et méconnaît, par suite, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 19 janvier 2021.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Au regard du motif d'annulation retenu par la cour, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement qu'il soit enjoint, sauf changement dans les circonstances de droit ou de fait, au préfet de Maine et Loire de délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " à Mme B... dans un délai de deux mois.
Sur les frais liés au litige :
6. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'État, partie perdante, une somme de 1 200 euros hors taxe au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, à verser au conseil de Mme B... sous réserve de son renoncement à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
D E C I D E :
Article 1er : La décision du 19 janvier 2021par lequel le préfet de Maine et Loire a refusé de délivrer une carte de séjour temporaire à Mme B... est annulée.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de Maine et Loire de délivrer à Mme B... une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale dans un délai de deux mois suivant la mise à dispositions du présent arrêt.
Article 3 : L'État versera une somme de 1 200 euros hors taxe au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 au conseil de Mme B... sous réserve de son renoncement à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Une copie en sera adressée, pour information, au préfet du Maine et Loire.
Délibéré après l'audience du 21 mars 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Quillévéré, président de chambre,
- M. Penhoat, premier conseiller,
- M. Viéville, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 avril 2025.
Le rapporteur
S. VIÉVILLELe président
G. QUILLÉVÉRÉ
La greffière
H. DAOUD
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N°24NT03073020