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11/04/2025 | FRANCE | N°24NT02399

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 4ème chambre, 11 avril 2025, 24NT02399


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision implicite de refus de l'admettre au séjour et l'arrêté du 7 novembre 2023 par lequel le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français.



Par un jugement n° 2301695 du 20 mars 2024, le tribunal administratif de Caen a rejeté cette demande.



Procédure devant la cour :



Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 juillet 2024 et le 4 mars 2025, M. A..., représenté par Me Aba Carré, demand...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision implicite de refus de l'admettre au séjour et l'arrêté du 7 novembre 2023 par lequel le préfet du Calvados a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français.

Par un jugement n° 2301695 du 20 mars 2024, le tribunal administratif de Caen a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 juillet 2024 et le 4 mars 2025, M. A..., représenté par Me Aba Carré, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 20 mars 2024 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 7 novembre 2023 du préfet du Calvados ;

3°) d'enjoindre au préfet du Calvados de réexaminer sa situation administrative, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le préfet du Calvados a méconnu les dispositions des articles L. 423-23 et

L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet du Calvados n'a pas procédé à un examen complet de sa situation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2024, le préfet du Calvados conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens du requérant ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du

16 juillet 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Derlange, président assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant mauritanien, né le 31 décembre 1972, est entré en France le

29 juillet 2008 muni d'un visa de type C. Le 8 avril 2022, il a demandé un titre de séjour sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Une décision implicite de rejet est née du silence gardé par le préfet du Calvados sur cette demande. Puis, par un arrêté du 7 novembre 2023, le préfet du Calvados a expressément refusé de délivrer un titre de séjour à M. A... et lui a fait obligation de quitter le territoire français. Par un jugement du 20 mars 2024, le tribunal administratif de Caen a rejeté le recours de M. A... à l'encontre de cet arrêté. M. A... relève appel de ce jugement.

2. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Calvados n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de M. A..., contrairement à ce que celui-ci soutient.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier que M. A... depuis son entrée en France en 2008 s'est impliqué dans de nombreuses actions de type caritatif ou bénévole, notamment en participant à la création et à la direction d'une association dont l'objet est la promotion des valeurs de la République. Toutefois, il n'établit pas avoir résidé en France de manière permanente au cours des années 2019 et 2020 et il ressort des pièces du dossier qu'il a été en situation irrégulière pour l'essentiel de son séjour, alors qu'il a déjà fait l'objet de mesures d'éloignement en 2012, 2013 et 2018. Il admet que résident en Mauritanie, où il a vécu jusqu'à l'âge de 36 ans, un frère, une sœur et sa femme avec laquelle, il serait en instance de divorce. Il est constant qu'il est célibataire, sans charges de famille en France. Il ne justifie pas de revenus à d'autres moments qu'en 2013. Dans ces conditions, il ne justifie pas de considérations humanitaires ni de motifs exceptionnels susceptibles de justifier son admission exceptionnelle au séjour et le préfet du Calvados n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant de lui accorder un titre de séjour.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".

6. Eu égard à ce qui a été dit au point 4 au sujet de son statut de célibataire, de ses attaches en Mauritanie et des conditions de son séjour en France, le préfet du Calvados n'a pas porté d'atteinte disproportionnée au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale en prenant l'arrêté contesté. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

7. En cinquième et dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

8. Si M. A... soutient qu'il serait exposé à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour en Mauritanie, de la part des autorités gouvernementales de ce pays, du fait qu'il a rédigé un livre particulièrement critique sur le système de gouvernance mauritanien, qu'il a dédié à un militant abolitionniste, il n'établit ni l'existence et la diffusion de cet ouvrage, ni la réalité des risques allégués. D'ailleurs, l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d'asile par une décision du 30 avril 2010, confirmée par la cour nationale du droit d'asile (CNDA) le 5 avril 2012 et sa demande de réexamen a été rejetée par des décisions de l'OFPRA le 18 décembre 2012 et de la CNDA le 2 octobre 2013. M. A... n'est donc pas fondé à soutenir que le préfet du Calvados aurait méconnu l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 novembre 2023 du préfet du Calvados.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Le présent arrêt, qui rejette la requête de M. A..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions de l'intéressé aux fins d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que le conseil de M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Bara Carré et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise, pour information, au préfet du Calvados.

Délibéré après l'audience du 25 mars 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M. Derlange, président assesseur,

- Mme Picquet, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 avril 2025.

Le rapporteur,

S. DERLANGE

Le président,

L. LAINÉ

La greffière,

A. MARTIN

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24NT02399


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NT02399
Date de la décision : 11/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINÉ
Rapporteur ?: M. Stéphane DERLANGE
Rapporteur public ?: Mme ROSEMBERG
Avocat(s) : BARA CARRE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-11;24nt02399 ?
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