Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... et Mme A... D... épouse B... ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler les décisions implicites nées les 10 mai 2022 et 19 mars 2023 par lesquelles la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté les recours formés contre les décisions des 10 janvier 2022 et 15 novembre 2022 de l'autorité consulaire française à Tunis, refusant de délivrer à M. B... un visa d'entrée et de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française.
Par un jugement n° 2307453 du 9 avril 2024, le tribunal administratif de Nantes a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 12 juin 2024, M. C... B... et Mme A... D... épouse B..., représentés par Me Moutel, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 9 avril 2024 du tribunal administratif de Nantes ;
2°) d'annuler les deux décisions implicites de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de réexaminer la demande de visa dans un délai de 15 jours ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement à leur conseil de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Ils soutiennent que les dispositions de l'article L. 312-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont méconnues ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; leur union ne présente pas de caractère frauduleux et ils sont empêchés de vivre ensemble.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 juillet 2024, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.
Mme A... D... épouse B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 mars 2025.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Rivas a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... B..., ressortissant tunisien, a sollicité à deux reprises la délivrance d'un visa d'entrée et de long séjour en qualité de conjoint de français auprès de l'autorité consulaire française à Tunis (Tunisie). Par deux décisions des 10 janvier 2022 et 15 novembre 2022, cette autorité a refusé de lui délivrer le visa demandé. Les deux recours formés contre ces décisions ont été rejetés par deux décisions implicites de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France, nées les 10 mai 2022 et 19 mars 2023. Par un jugement du 9 avril 2024, dont M. B... et Mme D... épouse B... relèvent appel, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande d'annulation de ces deux décisions.
2. Il ressort des pièces du dossier que pour fonder ses deux décisions de refus de visa la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France s'est fondée sur le fait que le projet d'installation en France de M. B... présentait un caractère frauduleux au motif qu'il était sans rapport avec sa demande de visa présentée en qualité de conjoint d'une ressortissante française.
3. Aux termes de l'article L. 312-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le visa de long séjour est délivré de plein droit au conjoint de ressortissant français. Il ne peut être refusé qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public. ".
4. Il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint étranger d'un ressortissant français dont le mariage n'a pas été contesté par l'autorité judiciaire le visa nécessaire pour que les époux puissent mener une vie familiale normale. Pour y faire obstacle, il appartient à l'administration, si elle allègue une fraude, de l'établir, la seule circonstance que l'intention matrimoniale d'un seul des deux époux ne soit pas contestée n'y faisant pas obstacle.
5. Pour établir que l'union de M. et Mme B... a été célébrée à des fins étrangères à l'institution matrimoniale, le ministre fait valoir l'absence de communauté de vie et de relation sentimentale antérieure à la date du mariage, et relève que M. B... ne participe pas aux charges du mariage. Il ressort des pièces du dossier que M. et Mme B... n'ont jamais résidé ensemble avant leur union et aucun élément ne vient établir l'existence même de leur relation avant cette date. Il n'est pas non plus établi de résidence commune après celle-ci. Par ailleurs, les seules photographies produites ne permettent pas d'établir les conditions des séjours en Tunisie de Mme B..., également ressortissante de ce pays. Les différentes attestations produites de participants à leur mariage célébré en France présentent pour leur majorité un caractère stéréotypé et laconique. En outre, la réalité de l'intention matrimoniale ne peut davantage résulter de la circonstance que Mme B... a conclu en 2024 un bail pour un deux-pièces au Mans après avoir loué un studio dans cette ville en 2023. Dans ces conditions, l'administration peut être regardée comme établissant l'existence d'une fraude de nature à justifier légalement, conformément aux dispositions de l'article L. 312-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le refus de visa sollicité.
6. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "
7. Compte tenu de ce qui a été exposé au point 5, la décision contestée ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit des intéressés au respect de leur vie privée et familiale. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande. Par suite, leurs conclusions présentées aux fins d'injonction et au titre des frais d'instance ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à Mme A... D... épouse B... et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 27 mars 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Degommier, président de chambre,
- M. Rivas, président assesseur,
- Mme Ody, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 avril 2025.
Le rapporteur,
C. RIVAS
Le président,
S. DEGOMMIER
Le greffier,
C. GOY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24NT01785