La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/07/2024 | FRANCE | N°24PA01749

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 6ème chambre, 09 juillet 2024, 24PA01749


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 25 janvier 2024 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.



Par un jugement n° 2401150 du 15 mars 2024, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.





Procédure devant la Cour :



Par une requête, enregistrée le 15 avril 2024, M. B....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 25 janvier 2024 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.

Par un jugement n° 2401150 du 15 mars 2024, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 15 avril 2024, M. B..., représenté par Me Anwar, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement de la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Montreuil du 15 mars 2024 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du préfet de la Seine-Saint-Denis du 25 janvier 2024, mentionné ci-dessus ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trente jours à compter de la notification de la présente décision ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente décision ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de mettre fin à son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions de l'article L. 611-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'interdiction de quitter le territoire français méconnaît les dispositions de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 612-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle n'est pas justifiée dans sa durée ;

- l'arrêté méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Niollet a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant pakistanais né le 21 avril 1992 à Mandi Bahauddhin (Pakistan), est entré en France en 2012 selon ses déclarations. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 11 décembre 2013. Cette décision a été confirmée par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) par une décision du 12 mai 2015. Par des décisions des 9 août 2018 et 30 juin 2022, confirmées par la CNDA le 4 novembre 2022, l'OFPRA a rejeté ses deux demandes de réexamen. Par un arrêté du 25 janvier 2024, le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. M. B... fait appel du jugement du 15 mars 2024 par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. Il ressort des pièces du dossier que, si M. B..., qui n'établit pas avoir été présent en France en 2016, justifie avoir épousé en 2014 une ressortissante pakistanaise et avoir eu avec elle trois enfants âgés de six, quatre et trois ans à la date de la l'arrêté attaqué, qui sont scolarisés, aucune circonstance particulière ne fait obstacle à ce que leur vie familiale se poursuive dans leur pays. S'il soutient avoir en France un frère qui a acquis la nationalité française, il n'établit pas la réalité de la présence de ce dernier. S'il fait aussi valoir qu'il souffre d'un diabète de type 1 nécessitant des hospitalisations et un suivi régulier, il ne démontre en tout état de cause pas qu'il ne pourrait avoir accès à un traitement effectif dans son pays. Enfin, il ne fait état d'aucune insertion particulière dans la société française. L'arrêté attaqué ne peut, dans ces conditions, être regardé comme intervenu en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni comme reposant sur une erreur manifeste d'appréciation.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 3° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention " étudiant " ".

5. Ainsi qu'il a été dit au point 3, M. B... n'établit pas avoir résidé de manière habituelle en France en 2016. Il n'est donc pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire prononcée à son encontre méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / (...) ".

7. Compte tenu des éléments de la situation personnelle du requérant exposés au point 3, aucune circonstance humanitaire ne justifie qu'une interdiction de retour ne soit pas édictée. Compte tenu des mêmes éléments et alors qu'il ne conteste pas sérieusement les faits de conduite d'un véhicule sans être titulaire du permis de conduire et d'usage d'un permis faux ou falsifié, le préfet de la Seine-Saint-Denis ne peut être regardé comme s'étant livré à une appréciation erronée de sa situation en fixant à une année la durée de cette interdiction. Les moyens tirés de la méconnaissance des articles L. 612-6 et L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent, par suite, être écartés.

8. En quatrième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 612-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est inopérant dès lors que le préfet s'est fondé sur l'article L. 612-6 du même code pour prendre la décision portant interdiction de retour sur le territoire français. Le moyen doit donc être écarté.

9. En cinquième et dernier lieu, si M. B... soutient que le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait méconnu les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile, ce moyen est inopérant à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français. Par suite, ce moyen doit être écarté.

10. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa requête, y compris les conclusions à fin d'injonction et les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 24 juin 2024, à laquelle siégeaient :

Mme Bonifacj, présidente,

M. Niollet, président-assesseur,

Mme d'Argenlieu, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 juillet 2024.

Le rapporteur,

J.-C. NIOLLETLa présidente,

J. BONIFACJ

La greffière,

E. TORDO

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N°24PA01749


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA01749
Date de la décision : 09/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONIFACJ
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe NIOLLET
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : SELARL ANWAR AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 20/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-07-09;24pa01749 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award