Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 8 septembre 2023 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de douze mois.
Par un jugement n° 2321235/6-1 du 2 février 2024, le tribunal administratif de Paris a annulé les décisions du 8 septembre 2023 refusant à M. A... un délai de départ volontaire et lui interdisant de retourner sur le territoire français pour une durée de douze mois, a condamné l'Etat à lui verser la somme de 800 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 et a rejeté le surplus des demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 19 février 2024, M. A..., représenté par Me Debazac, demande à la cour :
1°) de l'admettre provisoirement à l'aide juridictionnelle ;
2°) d'annuler le jugement n° 2321235/6-1 du 2 février 2024 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il rejette ses conclusions à fin d'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;
3°) d'annuler les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination contenues dans l'arrêté du 8 septembre 2023 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;
4°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai d'un mois ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Debazac d'une somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que Me Debazac renonce au bénéfice de la somme versée au titre de l'aide juridictionnelle ou, dans l'hypothèse d'un rejet de sa demande d'aide juridictionnelle, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;
- elle n'a pas été précédée d'un examen particulier de sa situation par le préfet ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 août 2024, le préfet de la Seine-Saint-Denis conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91- du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Jayer a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant guinéen né le 4 février 1980, est entré en France courant 2018 selon ses déclarations. A la suite de son interpellation, par arrêté du 8 septembre 2023, le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de renvoi en cas d'exécution d'office de la mesure d'éloignement, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de douze mois. M. A... relève appel du jugement du 2 février 2024 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il rejette ses demandes d'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination contenues dans cet arrêté, ainsi que ses conclusions à fin d'injonction.
Sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire :
2. Il résulte de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président (...) ". Aux termes de l'article 61 du décret du 28 décembre 2020 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " L'admission provisoire peut être accordée dans une situation d'urgence, notamment lorsque la procédure met en péril les conditions essentielles de vie de l'intéressé (...) / L'admission provisoire est accordée par (...) le président de la juridiction saisie, soit sur une demande présentée sans forme par l'intéressé, soit d'office si celui-ci a présenté une demande d'aide juridictionnelle (...) sur laquelle il n'a pas encore été statué. ".
3. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... aurait déposé une demande d'aide juridictionnelle auprès du bureau d'aide juridictionnelle. Eu égard aux circonstances de l'espèce, alors que la situation d'urgence, au sens de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991, n'est pas caractérisée, il n'y a pas lieu de prononcer son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
4. En premier lieu, l'arrêté attaqué vise l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne, expressément, que le requérant n'a pas été en mesure de présenter de document transfrontalier au moment de son interpellation, ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et n'est pas titulaire d'un titre de séjour en cours de validité au sens du 1° de cet article. Alors que l'administration n'est pas tenue d'indiquer de manière exhaustive l'ensemble des éléments relatifs à la situation de l'intéressé mais seulement de rappeler les éléments pertinents de sa situation administrative, familiale et personnelle, il en résulte que l'arrêté est suffisamment motivé. De même, il ne ressort ni des termes de l'arrêté attaqué, ni des autres éléments du dossier, que le préfet n'aurait pas procédé à un examen suffisamment circonstancié de la situation personnelle de M. A.... Par suite, les moyens tirés de l'insuffisance de motivation et de ce que la décision d'éloignement n'aurait pas été précédée d'un examen particulier de sa situation du doivent être écartés.
5. En deuxième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. M. A... fait valoir qu'il réside en France depuis 2018, qu'il vit en couple avec une compatriote demandeuse d'asile qui a fait l'objet d'un arrêté de transfert aux autorités italiennes annulé par jugement du 18 octobre 2023 du tribunal administratif de Melun, avec laquelle il a eu un enfant né le 23 septembre 2023 qu'il avait reconnu dès le 22 juin précédent. Il soutient, en outre, ne plus avoir de famille dans son pays d'origine, ses parents étant décédés et qu'il est intégré socialement et professionnellement en France. Pour autant, à supposer même qu'il ait résidé en France depuis son entrée en 2018, à l'âge de 38 ans, il ne justifie d'aucune insertion sociale ou professionnelle. Par ailleurs, si sa compagne, également guinéenne, a déposé une demande d'asile le 22 mai 2023, le jugement ayant annulé l'arrêté ordonnant son transfert en Italie est postérieur à la décision contestée, date à laquelle s'apprécie sa légalité. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet, aurait ainsi méconnu les stipulations précitées.
7. Pour les mêmes motifs qu'au point précédent, la décision contestée n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A....
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
8. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 7 qu'aucun des moyens soulevés à l'encontre de la décision faisant obligation à M. A... de quitter le territoire français n'est fondé. Ce dernier ne peut dès lors se prévaloir de l'illégalité de cette décision. Le moyen tiré, par voie de conséquence, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit ainsi être écarté.
9. En second lieu, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été exposé au point 7, la décision litigieuse, qui n'a pas pour conséquence une séparation durable de la cellule familiale, ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée familiale de l'intéressé tel que garanti par l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni n'est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination contenues dans l'arrêté du 8 septembre 2023 du préfet de la Seine-Saint-Denis. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : M. A... n'est pas admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.
Article 2 : La requête de M. A... est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.
Délibéré après l'audience du 5 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Bonifacj, présidente de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme Jayer, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 novembre 2024.
La rapporteure,
M-D. JAYERLa présidente,
J. BONIFACJ
La greffière,
A. LOUNIS
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24PA00820