Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 1er mars 2024 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.
Par un jugement n° 2402845 du 13 août 2024, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 13 septembre 2024, M. A..., représenté par Me Gleizes, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement attaqué ;
2°) d'annuler les décisions contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'incompétence en l'absence d'empêchement de Mme C... et des agents délégataires ;
- cette décision est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision lui refusant un délai de départ volontaire est entachée d'incompétence et d'insuffisance de motivation ; elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; elle méconnaît également les dispositions de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne fait pas l'objet d'un refus de titre de séjour définitif ;
- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est entachée d'incompétence et d'insuffisance de motivation ; elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ; il justifie de circonstances humanitaires au sens de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 septembre 2024, le préfet des Hauts-de-Seine conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Lellig a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant ivoirien né en 1992, déclare être entré en France en 2018 pour y solliciter l'asile. Il fait appel du jugement en date du 13 août 2024 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er mars 2024 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine lui a fait obligation de quitter sans délai le territoire français et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.
Sur les moyens communs à l'ensemble des décisions :
2. En premier lieu, l'arrêté attaqué a été signé par Mme D..., adjointe au chef du bureau des examens spécialisés et de l'éloignement de la préfecture des Hauts-de-Seine, qui bénéficiait, en vertu d'un arrêté n° 2024-078 du 21 février 2024, régulièrement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture, d'une délégation du préfet à l'effet de signer les décisions portant obligation de quitter le territoire français assorties ou non d'un délai de départ volontaire, celles fixant le pays de renvoi et les décisions d'interdiction de retour sur le territoire français, en cas d'absence ou d'empêchement de Mme C..., directrice des migrations et de l'intégration. Il ne ressort pas des pièces du dossier que les conditions de cette suppléance, et notamment l'absence de l'autorité suppléée, n'étaient pas satisfaites. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque en fait et doit être écarté.
3. En deuxième lieu, les décisions litigieuses visent les textes dont il est fait application et mentionnent, de manière suffisamment précise, les faits qui en constituent le fondement. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation manque dès lors en fait et doit être écarté.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
4. En premier lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., qui déclare être entré en France en 2018 sans en justifier, a vu sa demande d'asile définitivement rejetée par décision de la cour nationale du droit d'asile du 5 octobre 2022. Il s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire et a fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement le 16 juin 2023. Lors de son audition par les services de police, M. A... s'est déclaré célibataire, sans enfant à charge, et s'être séparé de la mère de son enfant français durant la grossesse. Il n'a d'ailleurs reconnu l'enfant, née le 27 mai 2022, que le 28 février 2023. Les pièces versées au dossier établissent seulement une contribution financière régulière entre mars 2023 et octobre 2023, sans que l'intensité des liens existant entre M. A... et son enfant soit démontrée par quelques photos au demeurant non datées. Dans ces conditions, et alors que M. A... déclare par ailleurs ne pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où résident son père et ses sœurs, le préfet des Hauts-de-Seine n'a pas porté au droit de ce dernier au respect de la vie privée et familiale en France une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels la décision portant obligation de quitter le territoire français a été prise. Par suite, le moyen tiré de ce que cette décision méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision portant obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle est édictée après vérification du droit au séjour, en tenant notamment compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France et des considérations humanitaires pouvant justifier un tel droit (...) ".
7. Conformément à ce qui été exposé au point 5, M. A..., qui se prévaut d'un droit au séjour en sa qualité de parent d'enfant français, n'est pas fondé à soutenir que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 613-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
8. En troisième lieu, aux termes des stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
9. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, M. A..., qui n'établit pas participer à l'éducation et à l'entretien de sa fille, ni même entretenir une relation affective stable avec elle, n'est pas fondé à soutenir qu'en édictant une obligation de quitter le territoire français à son encontre, le préfet des Hauts-de-Seine aurait méconnu l'intérêt supérieur de cette enfant.
Sur la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :
10. Pour regarder comme établi le risque que M. A... se soustraie à la décision d'obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet, le préfet des Hauts-de-Seine s'est fondé sur les dispositions du 5° de l'article L. 612-3 qui prévoient que ce risque peut être regardé comme établi lorsque l'étranger s'est soustrait à une précédente mesure d'éloignement. En se bornant à soutenir qu'il n'a fait l'objet d'aucun refus de titre séjour devenue définitif, M. A... ne conteste pas utilement la décision par laquelle le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire.
11. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 5 et 9, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doivent être écartés.
Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :
12. Contrairement à ce qu'il soutient, M. A... ne fait valoir aucune circonstance humanitaire s'opposant à ce que le préfet des Hauts-de-Seine prononce à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français.
13. Pour les mêmes motifs que ceux exposés aux points 5 et 9, le préfet des Hauts-de-Seine, en prenant à l'encontre de M. A... une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an, n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Hauts-de-Seine.
Délibéré après l'audience du 3 avril 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Barthez, président de chambre,
- Mme Milon, présidente assesseure,
- Mme Lellig, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 mai 2025.
La rapporteure,
W. LELLIGLe président,
A. BARTHEZ
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 24PA03992 2