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18/06/2025 | FRANCE | N°24PA02793

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 6ème chambre, 18 juin 2025, 24PA02793


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision par laquelle le recteur de l'académie de Paris a implicitement rejeté le recours gracieux qu'il a formé contre la décision du 8 juin 2022 du lycée Jules Ferry refusant son passage en deuxième année de classe préparatoire aux grandes écoles, ensemble cette décision initiale.



Par un jugement n° 2217908/1-3 du 21 février 2024, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa dem

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Procédure devant la Cour :



Par une requête et un mémoire, enregistrés le 27 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision par laquelle le recteur de l'académie de Paris a implicitement rejeté le recours gracieux qu'il a formé contre la décision du 8 juin 2022 du lycée Jules Ferry refusant son passage en deuxième année de classe préparatoire aux grandes écoles, ensemble cette décision initiale.

Par un jugement n° 2217908/1-3 du 21 février 2024, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 27 juin 2024 et le 25 février 2025, M. B..., représenté par Me Patout, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 21 février 2024 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision implicite du recteur de l'académie de Paris ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- les premiers juges ont dénaturé des pièces du dossier et commis une erreur de droit en considérant que la commission d'évaluation avait pris une décision refusant d'autoriser son passage en khâgne alors qu'une telle décision ne peut relever que du chef d'établissement ;

- la décision de refus de passage en deuxième année n'est pas suffisamment motivée ;

- cette décision est entachée de vices de procédure ;

- elle est entachée d'erreur de droit ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 janvier 2025, le recteur de la région académique d'Ile-de-France, recteur de l'académie de Paris, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens de légalité externe, soulevés par le requérant pour la première fois en appel, sont irrecevables ; à titre subsidiaire, ils ne sont pas fondés ;

- les moyens de légalité interne ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal judiciaire de Paris du 18 avril 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'éducation ;

- l'arrêté du 23 novembre 1994 relatif à l'admission et au régime des études dans les classes préparatoires aux grandes écoles organisées dans les lycées relevant du ministre chargé de l'éducation ou fonctionnant sous contrat d'association dans des établissements privés ;

- la circulaire 2012-0008 du 6 avril 2012 " classes préparatoires aux grandes écoles Admission, déroulement du cursus, partenariat avec les universités " ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Jayer,

- et les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a été admis, pour l'année scolaire 2021/2022, en première année de classe préparatoire littéraire aux grandes écoles (CPGE) au lycée Jules Ferry à Paris. Le 8 juin 2022, la commission d'évaluation a refusé son passage en deuxième année. Le 8 juillet suivant, l'intéressé a formé un recours contre cette décision auprès du recteur de l'académie de Paris, implicitement rejeté. M. B... relève appel du jugement du 24 août 2022 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel de se prononcer directement sur les moyens dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. M. B... ne peut donc utilement se prévaloir, pour contester la régularité du jugement attaqué, de ce que les premiers juges auraient entaché leur jugement d'une dénaturation des faits de l'espèce ou d'erreur de droit.

Sur les conclusions à fins d'annulation :

En ce qui concerne les moyens de légalité externe :

3. Il ressort du dossier de première instance que M. B... n'a soulevé devant le tribunal administratif, à l'encontre des décisions contestées, que des moyens de légalité interne, tirés de la méconnaissance du principe de sécurité du parcours de l'élève prévu par la circulaire n° 2012-0008 du 6 avril 2012, de l'erreur de faits et de ce que la mesure constituait une sanction disciplinaire déguisée. Si devant la Cour, il se prévaut d'un défaut de motivation suffisante et de vices de procédure, ainsi que l'oppose le recteur de la région académique d'Ile-de-France, recteur de l'académie de Paris, ces moyens, fondés sur une cause juridique distincte, constituent une demande nouvelle irrecevable en appel.

En ce qui concerne les moyens de légalité interne :

4. Aux termes de l'article D. 612-20 du code de l'éducation : " (...) Dans chaque lycée relevant de la compétence du ministre chargé de l'éducation comportant une ou plusieurs classes préparatoires aux grandes écoles, et pour chaque catégorie mentionnée à l'article D. 612-22, une commission d'examen des vœux donne un avis sur l'admission des étudiants dans les différentes classes. L'arrêté prévu au premier alinéa du présent article fixe la composition et le fonctionnement de cette commission. Une commission d'évaluation est en outre constituée dans chaque établissement comportant une ou plusieurs classes préparatoires aux grandes écoles. L'arrêté prévu au premier alinéa fixe la composition de cette commission qui prévoit la participation à titre consultatif d'un enseignant-chercheur. (...) ". En outre, aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 23 novembre 1994 modifié relatif à l'admission et au régime des études dans les classes préparatoires aux grandes écoles organisées dans les lycées relevant du ministre chargé de l'éducation ou fonctionnant sous contrat d'association dans des établissements privés : " En application de l'article D. 612-20 du code de l'éducation, deux commissions sont instituées dans chaque établissement comportant une ou plusieurs divisions de classes préparatoires aux grandes écoles et pour chacune des trois catégories prévues par l'article D. 612-22 du même code : une commission d'examen des vœux et une commission d'évaluation. Ces commissions sont présidées par le chef d'établissement ou son représentant. (...) ". Aux termes du II de l'article 2 de cet arrêté : " (...) La commission d'évaluation traite des questions d'évaluation en vue du passage dans la classe supérieure, de l'autorisation de redoublement et de l'établissement de l'attestation d'études prévue à l'article D. 612-25 du code de l'éducation. (...) ".

5. L'appréciation à laquelle se livre une commission d'évaluation des connaissances et mérites d'un élève en vue de son passage dans la classe supérieure, ne saurait, dès lors qu'elle ne repose pas sur des faits matériellement inexacts et n'est entachée ni d'erreur de droit, ni de détournement de pouvoir, être utilement discutée devant le juge de l'excès de pouvoir.

6. En premier lieu, il résulte des dispositions précitées du II de l'article 2 du 23 novembre 1994 modifié que la commission d'évaluation ne se borne pas à rendre un avis consultatif en vue du passage en classe supérieure mais se prononce sur celui-ci. M. B... n'est dès lors pas fondé à soutenir que les décisions litigieuses seraient entachées d'erreur de droit.

7. En deuxième lieu, le refus de la commission d'évaluation d'admettre M. B... en khâgne à l'unanimité des professeurs présents, est motivé, d'une part, par l'insuffisance de son niveau et, d'autre part, par ses trop nombreuses absences. S'il ne ressort pas des pièces du dossier, que l'intéressé aurait obtenu des résultats inférieurs à ceux des autres élèves de la classe, il en résulte en revanche que la quasi-totalité de ses professeurs lui a reproché le nombre très important de ses retards et absences ainsi que ses multiples défaillances dans la restitution des travaux demandés. De tels manquements sont établis et ne sont pas contestés. Le requérant se prévaut, toutefois, de ce que la pathologie d'hypersomnie idiopathique dont il souffre depuis l'adolescence, reconnue comme invalidante, en serait la cause. Pour autant, outre que par les pièces qu'il produit M. B... n'établit pas qu'il aurait justifié, en temps utile, de l'ensemble de ses absences auprès du corps enseignant, il ressort des pièces du dossier, qu'en dépit de la mise-en-garde adressée en fin de premier semestre, il n'a pas respecté les engagements alors souscrits. Il en résulte que, même si l'appréciation portée par le professeur d'histoire de l'art qui ne figure pas sur le bulletin du second semestre est très favorable au requérant, la commission aurait pu prendre la même décision au seul motif de l'absentéisme de M. B.... Par conséquent, sans entacher sa décision d'erreur manifeste d'appréciation, la commission d'évaluation aurait pu, pour ce seul motif, adopter la décision contestée, laquelle ne saurait, au vu des pièces du dossier, s'analyser en une sanction déguisée.

8. En dernier lieu, aux termes des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1- Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. (...)".

9. La procédure au terme de laquelle l'autorité administrative compétente exerce son pouvoir de décider du passage d'un élève en classe supérieure relevant d'un domaine purement administratif et n'entrant pas dans le champ d'application de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations susvisées est dépourvu d'incidence sur la légalité des décisions contestées.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles tenant aux frais liés à l'instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au recteur de l'académie de Paris, recteur de la région académique d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 3 juin 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Bonifacj, présidente de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme Jayer, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 juin 2025.

La rapporteure,

M-D. JAYERLa présidente,

J. BONIFACJ

La greffière,

A. LOUNIS

La République mande et ordonne à la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 24PA02793


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA02793
Date de la décision : 18/06/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONIFACJ
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : PATOUT

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-06-18;24pa02793 ?
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