Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 11 octobre 2024 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire français, lui a refusé l'octroi d'un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination vers lequel il sera éloigné et a pris à son encontre une décision d'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.
Par ordonnance n° 2414579 du 24 octobre 2024, la requête a été transmise au tribunal administratif de Paris.
Par un jugement n° 2427272/8 du 22 octobre 2024, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 22 novembre 2024, M. A..., représenté par Me Soh Mouafo, demande à la Cour :
1°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d'annuler le jugement du 22 octobre 2024 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris ;
3°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 11 octobre 2024 du préfet des Hauts-de-Seine ;
4°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de le convoquer pour réexaminer sa situation administrative dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision l'obligeant à quitter le territoire est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît son droit d'être entendu au sens du point 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union, reconnu par décision du 22 novembre 2012 de la Cour de justice de l'union européenne ;
- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familial, méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle alors qu'il ne représente pas une menace pour l'ordre public ;
- la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an est insuffisamment motivée ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 février 2025, le préfet des Hauts-de-Seine conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés en renvoyant à ses conclusions en première instance.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Jayer a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant congolais (République démocratique du Congo) né le 12 décembre 2004, est entré en France, selon ses déclarations, en 2019. Par un arrêté du 11 octobre 2024, le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi en cas d'exécution de la mesure d'éloignement et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. M. A... relève appel du jugement du 22 octobre 2024 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :
2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., déjà représenté par un avocat, n'a pas déposé de demande d'aide juridictionnelle depuis l'enregistrement de sa requête. Par suite et en l'absence d'urgence, il n'y a pas lieu de l'admettre à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
4. En premier lieu, il y a lieu d'écarter les moyens dirigés contre la décision contestée, tirés de l'insuffisance de motivation et de la méconnaissance du droit d'être entendu au sens du point 2 de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union par adoption des motifs retenus à bon droit par le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris aux points 5, 6 et 8 de son jugement.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. Il ressort des pièces du dossier que, si M. A... est entré en France courant 2019, il n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour à sa majorité. Agé de 20 ans à la date de la décision contestée, il n'établit pas, par les pièces qu'il produit, vivre en concubinage, ni être dépourvu de liens dans son pays d'origine. Quand bien même son comportement ne constituerait-il pas une menace pour l'ordre public, en prenant la décision contestée, le préfet n'a dès lors pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision contestée a été prise. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit dès lors être écarté.
7. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, le moyen tiré de ce que le préfet des Hauts-de-Seine aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de M. A... doit être écarté.
En ce qui concerne la légalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an :
8. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder cinq ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, et dix ans en cas de menace grave pour l'ordre public. ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".
9. En premier lieu, M. A..., qui ne justifie pas que la décision portant obligation de quitter le territoire serait illégale, n'est par suite pas fondé à exciper de son illégalité à l'appui de sa demande d'annulation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an.
10. En deuxième lieu, la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an indique qu'elle est prise sur le fondement de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que M. A... est obligé de quitter le territoire national sans délai, précise que l'intéressé a toujours séjourné en France en situation irrégulière, mentionne que sa présence en France constitue une menace pour l'ordre public et qu'aucune circonstance d'ordre humanitaire ne fait obstacle à la décision. Cette décision est, ainsi, suffisamment motivée au regard des exigences de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
11. En troisième lieu, M. A... ne démontre aucune circonstance humanitaire de nature à faire obstacle au prononcé d'une interdiction de retour qui doit assortir en principe, en application des dispositions de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'obligation faite à un ressortissant étranger de quitter le territoire français sans délai. En particulier, ainsi qu'il a été dit au point 6, l'intéressé, qui s'est maintenu de façon irrégulière sur le territoire français, ne justifie pas d'une insertion professionnelle stable et ancienne sur le territoire, est célibataire et sans charge de famille en France et ne fait état d'aucun obstacle sérieux à son retour dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 15 ans. Par suite, en se fondant, notamment, sur les conditions irrégulières de son séjour en France, le préfet des Hauts-de-Seine a pu, sans méconnaître les dispositions précitées ni entacher sa décision d'une erreur d'appréciation, prononcer à son encontre une interdiction de retour d'une durée d'un an.
12. En dernier lieu, eu égard aux motifs énoncés au point 6 du présent arrêt, et en l'absence de tout autre élément probant, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision lui interdisant le retour sur le territoire français pour une durée d'un an est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.
13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu d'admettre M. A... à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Hauts-de-Seine.
Délibéré après l'audience du 3 juin 2025, à laquelle siégeaient :
- Mme Bonifacj, présidente de chambre,
- M. Niollet, président-assesseur,
- Mme Jayer, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 juin 2025.
La rapporteure,
M-D. JAYERLa présidente,
J. BONIFACJ
La greffière,
A. LOUNIS
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24PA04767