Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge partielle du prélèvement d'un tiers, effectué en application de l'article 244 bis A du code général des impôts, sur les plus-values réalisées lors de la cession, le 16 septembre 2011 et le 14 janvier 2013, de deux biens immobiliers situés à Paris, liée à la différence entre le taux de 33,33 % et le taux de 19 %, pour un montant de 60 186 euros, ainsi que la décharge des prélèvements sociaux auxquels il a été assujetti à raison de la plus-value réalisée lors de la cession intervenue le 14 janvier 2013, pour un montant de 57 921 euros.
Par une décision du 12 juin 2015, postérieure à l'introduction de cette demande, la direction des résidents à l'étranger et des services généraux a prononcé le dégrèvement partiel du prélèvement du tiers à raison des plus-values réalisées lors des cessions d'immeubles en date du 16 septembre 2011 et 14 janvier 2013, à concurrence d'un montant de 60 186 euros.
Par un jugement n° 1410022 du 26 mars 2019, le tribunal administratif de Montreuil a donné acte à M. B... du désistement de sa demande tendant à ce que le tribunal administratif de Montreuil transmette au Conseil d'Etat la question prioritaire de constitutionnalité qu'il a soulevée (article 1er), a jugé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions de M. B... à concurrence du dégrèvement prononcé de 60 186 euros (article 2) et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande (article 3).
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 27 mai 2019, le 10 décembre 2020 et le
26 avril 2021, M. B..., représenté par Mes Ladreyt et De Chanterac, avocats, demande à la Cour :
1°) d'annuler l'article 3 de ce jugement ;
2°) de lui accorder la décharge, en droits et pénalités, des prélèvements sociaux litigieux ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les prélèvements sociaux appliqués contreviennent à la liberté de circulation des capitaux en ce qu'ils instaurent une différence de traitement entre les investisseurs français et les investisseurs installés dans des Etats tiers.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- le règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 ;
- l'accord de sécurité sociale entre le gouvernement de la République française et le gouvernement des Etats-Unis d'Amérique du 2 mars 1987 ;
- la loi n ° 2012-958 du 16 août 2012 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A..., première conseillère,
- et les conclusions de M. Illouz, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant de nationalité française, résidant aux Etats-Unis d'Amérique et y travaillant en qualité d'agent de la Banque mondiale, a acquitté le prélèvement d'un tiers, effectué en application de l'article 244 bis A du code général des impôts, sur les plus-values réalisées lors de la cession, le 16 septembre 2011 et le 14 janvier 2013, de deux biens immobiliers situés à Paris, ainsi que des prélèvements sociaux sur la seule plus-value réalisée lors d'une cession intervenue le 14 janvier 2013, conformément à l'article 29 de la loi
n° 2012-958 susvisée du 16 août 2012. Par une réclamation du 6 juin 2013, M. B... demandé la restitution du prélèvement de 60 186 euros, correspondant au différentiel de taux entre 33,1/3 % et 19 %, taux applicable aux plus-values réalisées par les résidents français et communautaires et, d'autre part, la restitution totale des prélèvements sociaux mis à sa charge à hauteur de 57 931 euros. Cette réclamation ayant fait l'objet d'une décision implicite de rejet, M. B... a saisi le tribunal administratif de Montreuil d'une demande tendant à la restitution des sommes afférentes à ces impositions. En cours d'instance, l'administration a fait droit à la demande de réduction du prélèvement au taux de 19 % et a accordé au requérant un dégrèvement de 60 186 euros. Par un jugement n° 1410022 du 26 mars 2019, le tribunal administratif de Montreuil a donné acte à M. B... du désistement de sa demande tendant à ce que soit transmis au Conseil d'Etat une question prioritaire de constitutionnalité (article 1er), a jugé qu'il n'y avait plus lieu de statuer sur les conclusions de M. B... à concurrence du dégrèvement prononcé de 60 186 euros (article 2) et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande (article 3). M. B... fait appel du jugement en ce qu'il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
2. En vertu de l'article 63, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne relatif à la liberté de circulation des capitaux, sont prohibées les restrictions aux mouvements de capitaux entre les États membres ainsi qu'entre États membres et pays tiers. La cession d'un investissement immobilier constitue un mouvement de capitaux, comme en a jugé la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) dans son arrêt C-322/11 du 7 novembre 2013, K. Il résulte également de la jurisprudence de la CJUE, en particulier de son arrêt C-156/17 du 30 janvier 2020, Köln-Aktienfonds Deka, que les mesures interdites par l'article 63, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, en tant que restrictions aux mouvements de capitaux, comprennent celles qui sont de nature à dissuader les non-résidents de procéder à des investissements dans un État membre, qu'elles introduisent une différence de traitement entre résidents et non-résidents (restriction directe), ou que, bien qu'indistinctement applicables aux résidents et aux non-résidents, elles défavorisent, de fait, les situations transfrontalières (restriction indirecte). De telles restrictions peuvent néanmoins être justifiées, et partant compatibles avec la liberté de circulation des capitaux, lorsqu'elles s'appliquent à des situations qui ne sont pas objectivement comparables, ainsi qu'il résulte de l'article 65, paragraphe 1, du même traité, tel qu'interprété par une jurisprudence constante de la Cour de justice, notamment par les deux arrêts mentionnés ci-dessus.
3. D'une part, les règles relatives à l'assujettissement aux prélèvements sociaux des plus-values de cession immobilière sont indistinctement applicables, sans considération de leur nationalité, aux résidents des États-Unis d'Amérique, tels que M. B..., et aux résidents de France, si bien qu'aucune restriction directe à la liberté de circulation des capitaux ne peut en l'espèce être constatée.
4. D'autre part, aucune restriction indirecte entre résidents de France et résidents d'un État tiers à l'Union européenne échappant au champ d'application du règlement du 29 avril 2004 ne saurait davantage résulter de la circonstance que l'assujettissement aux prélèvements sociaux des seconds ne leur permet pas de bénéficier en France des prestations sociales généralement offertes aux premiers, dès lors que ces prélèvements n'ont pas le caractère d'une cotisation contributive ouvrant vocation au bénéfice des prestations et avantages servis par les régimes français obligatoires de sécurité sociale, mais celui d'une imposition de toute nature.
5. De surcroît, par l'arrêt du 18 janvier 2018, Frédéric Jahin contre Ministre de l'économie et des finances, Ministre des affaires sociales et de la santé, n° C-45/17, la Cour de justice de l'Union européenne a jugé qu'une législation telle que la législation française relative à la contribution sociale généralisée sur les revenus du patrimoine, au prélèvement social sur les revenus du patrimoine et à la contribution additionnelle à ce prélèvement, qui réserve un traitement plus favorable aux ressortissants de l'Union qui sont affiliés à un régime de sécurité sociale d'un autre État membre, d'un État membre de l'Espace économique européen ou de la Suisse, qu'à ceux qui sont affiliés à un régime de sécurité sociale d'un État tiers, constitue une restriction à la libre circulation des capitaux entre un État membre et un État tiers, qui est, en principe, interdite par l'article 63 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Elle a cependant jugé qu'une telle restriction à la libre circulation des capitaux entre un État membre et un État tiers était susceptible d'être justifiée, au regard des stipulations précitées de l'article 65, paragraphe 1, a), du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, par la différence de situation objective qui existe entre une personne physique, ressortissant d'un État membre, mais résidant dans un État tiers à l'Union européenne autre qu'un État membre de l'Espace économique européen ou la Suisse et qui y est affiliée à un régime de sécurité sociale, et un ressortissant de l'Union résidant et affilié à un régime de sécurité sociale dans un autre État membre. Il s'ensuit que la circonstance qu'une personne affiliée à un régime de sécurité sociale d'un État tiers à l'Union européenne, autre que les États membres de l'Espace économique européen ou la Suisse soit soumise, comme les personnes affiliées à la sécurité sociale en France, aux prélèvements sur les revenus du capital prévus par la législation française entrant dans le champ du règlement du 29 avril 2004, alors qu'une personne relevant d'un régime de sécurité sociale d'un État membre autre que la France ne peut, compte tenu des dispositions de ce règlement, y être soumise, ne constitue pas une restriction aux mouvements de capitaux en provenance ou à destination des pays tiers, au sens de l'article 63 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
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N° 19VE01942