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04/06/2024 | FRANCE | N°23MA03109

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 4ème chambre, 04 juin 2024, 23MA03109


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 29 novembre 2021 par lequel le maire de la commune de Pélissanne l'a licenciée à compter du 1er décembre 2021 et l'a radiée des cadres de la fonction publique territoriale à compter de cette même date, d'enjoindre à la commune de Pélissanne de procéder au réexamen de sa situation administrative à compter de la notification du jugement à intervenir et de mettre à la charge de cette comm

une la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice adminis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 29 novembre 2021 par lequel le maire de la commune de Pélissanne l'a licenciée à compter du 1er décembre 2021 et l'a radiée des cadres de la fonction publique territoriale à compter de cette même date, d'enjoindre à la commune de Pélissanne de procéder au réexamen de sa situation administrative à compter de la notification du jugement à intervenir et de mettre à la charge de cette commune la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2200903 du 6 décembre 2023, le tribunal administratif de Marseille a annulé cet arrêté, a enjoint au maire de la commune de Pélissanne de réexaminer la situation administrative de Mme A... dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédures devant la Cour :

I - Par une requête, enregistrée au greffe de la Cour le 22 décembre 2023 sous le

n° 23MA03109, la commune de Pélissanne, représenté par Me Font, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 6 décembre 2023 ;

2°) de rejeter les demandes de Mme A... ;

3°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, c'est à bon droit que la commune a fondé sa décision de licenciement sur l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 et l'article 17 du décret du 30 juillet 1987, en reprenant la procédure de reprise de poste à la suite des recours engagés par l'agent et en tirant les conséquences de son refus définitif de rejoindre son poste ;

- en retenant le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984, le tribunal a méconnu le champ d'application de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 et de l'article 17 du décret du 30 juillet 1987 ;

- le tribunal ne pouvait pas tenir compte, sans méconnaître le principe d'égalité entre fonctionnaires territoriaux, du placement provisoire de l'agent en disponibilité d'office dans l'attente de l'issue de ses recours contre les avis du comité médical alors que cet agent était déclaré apte ;

- aucun des moyens de première instance de la requérante n'est fondé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 janvier 2024, Mme A..., représentée par Me Pelgrin, conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint à la commune de Pélissanne de procéder au réexamen et à la régularisation de sa situation administrative et à ce que soit mise à la charge de la commune la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- les moyens d'appel ne sont pas fondés ;

- le poste qui lui a été proposé est le même que précédemment et ne tient pas compte des préconisations du médecin de prévention ;

- si elle a refusé de regagner ce poste, c'est en raison uniquement de son état de santé ;

- elle ne peut être regardée en situation d'abandon de poste puisqu'elle a dûment communiqué un arrêt de travail, dans le délai de quarante-huit heures, pour la période du 20 au 30 novembre 2021, et n'a pas été rendue destinataire d'une mise en demeure de reprendre son poste dans un délai de quinze jours ;

- son état de santé justifiait une adaptation de son poste sinon un reclassement ;

- l'arrêté est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article 5-1 du décret n° 85-603 du 10 juin 1985 puisque sa situation de travail présentait pour elle un danger grave et imminent pour sa santé ;

- l'annulation de la mesure implique nécessairement la reconstitution de sa carrière, sa réintégration et son maintien en position de congé de maladie à plein traitement jusqu'à sa reprise ou sa mise à la retraite.

Par une ordonnance du 5 avril 2024 la clôture d'instruction a été fixée au 22 avril 2024, à 12 heures.

II - Par une requête, enregistrée au greffe de la Cour le 29 décembre 2023, sous le

n° 23MA03182, la commune de Pélissanne, représentée par Me Font, demande à la Cour, sur le fondement de l'article R. 811-15 du code de justice administrative :

1°) de surseoir à l'exécution du jugement n° 2200903 rendu le 6 décembre 2023 par le tribunal administratif de Marseille ;

2°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune soutient que :

- les moyens soulevés à l'appui de son appel contre ce jugement sont sérieux et de nature à justifier, outre son annulation, le rejet des conclusions à fin d'annulation accueillies par ce jugement ;

- les moyens de première instance ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 janvier 2024, Mme A..., représentée par Me Pelgrin, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la commune la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, en faisant valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 5 avril 2024 la clôture d'instruction a été fixée au 22 avril 2024, à 12 heures.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-56 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Revert,

- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,

- et les observations de Me Duplaa, représentant la commune de Pélissanne et de

Me Pelgrin, représentant Mme A....

Une note en délibéré présentée pour Mme A... a été enregistrée le 22 mai 2024.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 29 novembre 2021, pris après avis favorable de la commission administrative paritaire du 25 octobre 2021, le maire de la commune de Pélissanne a licencié Mme A... sur le fondement de l'article 17 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux, et l'a radiée des cadres à compter du 1er décembre 2021. Par un jugement du 6 décembre 2023, dont la commune de Pélissanne relève appel par sa requête n° 23MA03109 et demande le sursis à exécution par sa requête n° 23MA03182, le tribunal administratif de Marseille a annulé cette décision et a enjoint au maire de la commune de Pélissanne de réexaminer la situation administrative de Mme A... dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement.

Sur la jonction :

2. Les requêtes n°s 23MA03109 et 23MA03182 sont dirigées contre le même jugement et présentent à juger des questions identiques. Il y a donc lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Pour annuler le licenciement de Mme A..., le tribunal administratif de Marseille s'est fondé sur les motifs tirés, d'une part, de l'erreur de droit commise par le maire de Pélissanne en s'appuyant sur les dispositions de l'article 17 du décret du 30 septembre 1987 dont les conditions n'étaient pas réunies, Mme A... étant alors en position de disponibilité d'office et non de congé de maladie, et d'autre part, de la méconnaissance de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984, faute pour la commune d'avoir offert trois postes à l'intéressée qui les aurait refusés successivement.

En ce qui concerne le cadre juridique applicable :

4. Aux termes de l'article 17 du décret du 30 juillet 1987 pris pour l'application de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et relatif à l'organisation des comités médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux : " Lorsque, à l'expiration de la première période de six mois consécutifs de congé de maladie, le fonctionnaire est inapte à reprendre son service, le comité médical est saisi pour avis de toute demande de prolongation de ce congé dans la limite des six mois restant à courir. / Lorsque le fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical. En cas d'avis défavorable, s'il ne bénéficie pas de la période de préparation au reclassement prévue par le décret du 30 septembre 1985 susvisé, il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme. Le paiement du demi-traitement est maintenu, le cas échéant, jusqu'à la date de la décision de reprise de service, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite. / Le fonctionnaire qui, à l'expiration de son congé de maladie, refuse sans motif valable lié à son état de santé le poste qui lui est assigné peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire. ".

5. Par ailleurs, aux termes de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984 : " La disponibilité est prononcée, soit à la demande de l'intéressé, soit d'office à l'expiration des congés prévus aux 2°, 3° et 4° de l'article 57. Le fonctionnaire mis en disponibilité qui refuse successivement trois postes qui lui sont proposés dans le ressort territorial de son cadre d'emploi, emploi ou corps en vue de la réintégration peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire ".

6. Il résulte des dispositions de l'article 17 du décret du 30 juillet 1987, citées au

point 4, que le fonctionnaire déclaré par le comité médical apte à la reprise du service, à l'épuisement de ses droits à congé de maladie ordinaire, doit reprendre ses fonctions sur le poste qui lui est assigné, sauf à ce qu'il fasse état de motif valable lié à son état de santé.

La circonstance que l'agent ait saisi le comité médical d'une contestation de son avis d'aptitude à la reprise du service, ou le comité médical supérieur d'un recours contre cet avis, ne fait pas obstacle à ce que l'intéressé soit placé, par une décision à caractère provisoire et sous réserve de régularisation ultérieure par une décision définitive statuant sur sa situation y compris pendant la période couverte par la décision provisoire, en disponibilité d'office. Il en va de même de la circonstance que, pour contester cet avis d'aptitude à la reprise du service, l'agent présente une demande de placement en congé de longue maladie ou de longue durée. Dans l'un ou l'autre de ces cas, lorsque le comité médical confirme l'aptitude à la reprise du service ou émet un avis défavorable au bénéfice d'un tel congé, l'agent doit reprendre le service sur le poste qui lui a été assigné. Son refus, sans motif valable lié à son état de santé, l'expose à la décision de son employeur de le licencier.

7. S'il résulte des dispositions de l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984, mentionnées au point 5, que le fonctionnaire mis en disponibilité qui refuse successivement trois postes qui lui sont proposés dans le ressort territorial de son cadre d'emploi, emploi ou corps en vue de la réintégration peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire, de telles dispositions ne sont toutefois pas applicables lorsque la décision de mise en disponibilité concerne un agent qui, ayant épuisé ses droits à congé de maladie, est déclaré apte à la reprise du service et a été prise à titre provisoire, dans les conditions énoncées au point précédent.

En ce qui concerne la légalité du licenciement de Mme A... :

8. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... a été placée en congé de maladie ordinaire du 3 décembre 2018 au 2 décembre 2019 inclus, et a donc épuisé ses droits à ce congé le 3 décembre 2019. Le comité médical, qui par un premier avis du 6 novembre 2019 l'a déclarée apte à la reprise à compter du 3 décembre 2019, a confirmé son appréciation par un nouvel avis du 18 novembre 2020, rendu sur recours gracieux de l'intéressée et précisant que l'aptitude de celle-ci à la reprise concernait un temps partiel thérapeutique à 50% sur un poste aménagé, en lien avec le médecin de prévention. Mme A... ayant présenté le 2 décembre 2020 une demande de congé de longue maladie, le comité médical a rendu le 24 février 2021 un troisième avis d'aptitude à la reprise de son service, en mi-temps thérapeutique en lien avec le médecin de prévention. Certes, compte tenu de ces deux contestations par Mme A... de son aptitude à la reprise de son service, le maire de Pélissanne a pris le 19 mars 2021 un arrêté la plaçant, rétroactivement à compter du 3 décembre 2019, et jusqu'à sa réintégration " en mi-temps thérapeutique à 50% ", en disponibilité d'office. Mais une telle décision de mise en disponibilité, prise à titre provisoire et dans l'attente de la décision de reprise de service, ne faisait pas obstacle, ainsi qu'il a été dit aux points 6 et 7, d'une part à ce que le maire se borne à lui demander de reprendre son service sur le poste qu'il lui a assigné à l'issue des procédures relatives à ces contestations, en application des dispositions de l'article 17 du décret du 30 juillet 1987, sans être tenu de lui proposer deux autres postes comme l'exige l'article 72 de la loi du 26 janvier 1984, dans cette mesure inapplicable à la situation de l'intéressée, et d'autre part à ce que, constatant le refus de celle-ci de reprendre son poste, cette autorité décide de la licencier après avoir recueilli l'avis de la commission administrative paritaire.

9. Il suit de là que la commune de Pélissanne est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a annulé la décision de licenciement en litige pour méconnaissance des dispositions des articles 17 du décret du 30 juillet 1987 et 72 de la loi du 26 janvier 1984.

10. Néanmoins il appartient à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens de première instance et d'appel de Mme A....

11. En premier lieu, et d'une part, dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point 8, c'est à bon droit que le maire s'est placé dans le cadre défini par les dispositions de l'article 17 du décret du 30 juillet 1987 pour prononcer le licenciement de Mme A..., celle-ci ne peut utilement soutenir que la décision en litige est intervenue en méconnaissance de la procédure préalable à une décision de radiation des cadres pour abandon de poste, faute pour celle-ci d'avoir donné lieu à une mise en demeure régulière de reprendre son poste et pour l'agent d'avoir eu l'intention de rompre tout lien avec le service.

12. D'autre part, Mme A..., ayant épuisé ses droits à congé de maladie ordinaire et s'étant vue refuser le bénéfice d'un congé de longue maladie, ne peut utilement affirmer avoir été placée en position de congé de maladie dès la réception par son employeur de son dernier arrêt de travail, adressé dans les quarante-huit heures de son établissement, ni se plaindre de l'absence de contre-visite médicale préalablement au prononcé de la décision en litige.

13. Si Mme A... soutient que l'absence de production au dossier d'instance du procès-verbal de la séance de la commission administrative paritaire du 25 octobre 2021, consultée sur le projet de licenciement de l'intéressée, l'empêche de vérifier le respect par cet avis des règles de fonctionnement de cet organisme dont elle cite le contenu, elle n'a pas formulé de grief mettant en cause précisément l'une de ces règles après avoir reçu devant le tribunal communication de ce procès-verbal par la commune. En se bornant à indiquer que le président de la commission peut désigner un expert à la demande de l'administration ou de l'agent, Mme A..., qui n'allègue pas que le président de la commission a été saisi d'une telle demande, n'assortit pas la branche de son moyen des précisions suffisantes permettant à la Cour d'en apprécier le bien-fondé.

14. En deuxième lieu, par une lettre du 2 septembre 2021, reçue le 5 septembre, la directrice des ressources humaines de la commune a demandé à Mme A... de reprendre son service à compter du 8 septembre 2021, dans le respect des restrictions médicales formulées par le médecin de prévention le 22 mars 2021, sur un emploi d'adjoint technique au sein du service de l'entretien des locaux, la conduisant à effectuer différents travaux d'entretien, sur différents sites municipaux, dont l'espace Jean Cadeau. Il est constant que malgré cette décision de son employeur, fondée sur le constat de l'expiration de ses droits à congé et de son aptitude médicale, Mme A... n'a pas repris son service, mais a déposé pour la période du 6 septembre au 4 octobre 2021, puis pour celle du 4 octobre 2021 au 8 novembre 2021, des arrêts de travail pour syndrome anxio-dépressif sévère, qui font suite à des arrêts de travail établis à compter du 28 mai 2021.

15. D'une part, contrairement à ce que soutient l'intéressée, il ne résulte pas de la comparaison des préconisations médicales formulées par le médecin de prévention en dernier lieu le 22 mars 2021 et soulignant le caractère indispensable du travail en équipe ou en binôme, l'impossibilité de travailler en hauteur ou de porter une charge supérieure à 10 kg, et de la fiche descriptive du poste que lui a ainsi assigné son employeur, que celui-ci lui aurait demandé de reprendre son service sur une affectation contraire à son état de santé.

16. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que malgré l'affection qui a justifié son placement en congé de maladie ordinaire du 3 septembre 2018 au 2 septembre 2019 inclus, Mme A... a été considérée comme apte à reprendre son service, d'abord à compter du 3 décembre 2019 par un avis du comité médical du 6 novembre 2019, suivi le 19 novembre 2019 de l'avis du médecin de prévention préconisant une reprise à temps partiel thérapeutique notamment sur un poste en équipe ou en binôme, puis à compter de la notification de l'avis du comité médical du 18 novembre 2020, sur un poste aménagé à temps partiel thérapeutique à 50%, et enfin dès la notification de l'avis de ce comité du 24 février 2021 la déclarant apte à la reprise en mi-temps thérapeutique et suivi de l'avis du médecin de prévention du 12 mars 2021 favorable à cette reprise sous les réserves précisées au point précédent. Il résulte en outre de l'avis du médecin psychiatre du 11 mars 2021 que l'agent souffrait d'un état anxio-dépressif sévère entrant dans le cadre de troubles dysthymiques qui étaient en voie de stabilisation. Si le médecin traitant de l'intéressée, qui est l'auteur de l'ensemble de ses arrêts de travail, a établi le 19 octobre 2021 un avis qui fait état de l'aggravation de son état et de son incapacité à occuper un poste de travail, quel qu'il soit, et qui préconise une mise en invalidité ou un congé de longue maladie, une telle pièce, dont la commune affirme sans être contredite qu'elle ne lui a pas été soumise à l'appui des derniers arrêts de travail de l'agent, n'est pas à elle seule, compte tenu de sa teneur et de son contexte d'intervention, constitutive d'un motif valable lié à son état de santé et justifiant son refus de reprendre le service.

17. Il suit de là que Mme A... ayant épuisé ses droits à congé de maladie ordinaire à compter du 3 décembre 2019 et ayant été déclarée apte à la reprise de son service, au plus tard dès la notification de l'avis du comité médical du 24 février 2021, le maire de Pélissanne a pu légalement, sur le fondement de l'article 17 du décret du 30 juillet 1987, prononcer son licenciement après avoir constaté son refus de reprendre son service sur le poste qu'il lui avait valablement assigné, et recueilli l'avis favorable de la commission administrative paritaire.

18. En dernier lieu, compte tenu de ce qui a été dit au point 16, Mme A..., qui ne démontre pas son inaptitude médicale à exercer ses fonctions, n'est en tout état de cause pas fondée à affirmer qu'elle avait droit à un congé de longue maladie, ou à un congé d'invalidité temporaire imputable au service qu'elle n'a du reste pas demandé, ni à invoquer les dispositions de l'article 5-1 du décret du 10 juin 1985 selon lequel " L'autorité territoriale ne peut demander à l'agent de reprendre son activité dans une situation de travail présentant un danger grave et imminent ". Elle ne peut pas non plus utilement se prévaloir des dispositions des articles 81 de la loi du 26 janvier 1984 et 2 du décret du 30 septembre 1985 relatives à l'aménagement de poste et au reclassement des agents inaptes de manière définitive à leurs fonctions.

19. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Pélissanne est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du 29 novembre 2021 par laquelle son maire a licencié Mme A... pour " refus de poste " et l'a radiée des cadres à compter du 1er décembre 2021, lui a enjoint de réexaminer la situation administrative de celle-ci dans le délai d'un mois à compter de sa notification et a rejeté ses prétentions relatives à ses frais d'instance. Il y a donc lieu d'annuler ce jugement dans cette mesure et de rejeter la demande présentée par Mme A... devant le tribunal.

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution :

20. Le présent arrêt statuant sur l'appel formé par la commune de Pélissanne contre le jugement du tribunal administratif de Marseille du 6 décembre 2023, les conclusions de sa requête n° 23MA03182 tendant au sursis à exécution de ce jugement sont devenues sans objet.

Il n'y a plus lieu d'y statuer.

Sur les frais liés au litige :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Pélissanne, qui n'est pas la partie perdante dans les deux instances, une somme à verser à Mme A... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la commune tendant dans ces deux instances à l'application de ces dispositions.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la commune de Pélissanne tendant au sursis à exécution du jugement n° 2200903 rendu le 6 décembre 2023 par le tribunal administratif de Marseille.

Article 2 : Le jugement n° 2200903 rendu le 6 décembre 2023 par le tribunal administratif de Marseille est annulé en tant qu'il a fait droit à la demande de Mme A... tendant à l'annulation de la décision de licenciement du 29 novembre 2021, à ce qu'il soit enjoint à la commune de Pélissanne de réexaminer sa situation et en tant qu'il a rejeté les prétentions de la commune relatives à ses frais d'instance.

Article 3 : La demande présentée par Mme A... devant le tribunal administratif de Marseille, ainsi que ses conclusions d'appel à fin d'injonction et ses prétentions tendant dans les instances n°s 23MA03109 et 23MA03182 à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Pélissanne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Pélissanne et à Mme B... A....

Délibéré après l'audience du 22 mai 2024, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Martin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juin 2024.

N°s 23MA03109, 23MA031822


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23MA03109
Date de la décision : 04/06/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Disponibilité.

Fonctionnaires et agents publics - Cessation de fonctions - Licenciement.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Michaël REVERT
Rapporteur public ?: Mme BALARESQUE
Avocat(s) : PELGRIN;PELGRIN;FONT

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-06-04;23ma03109 ?
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