Vu la procédure suivante :
Procédures contentieuses antérieures
Par une demande enregistrée au greffe du tribunal administratif de Lyon sous le n° 2300800, M. E... a demandé à ce tribunal d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par la préfète de la Loire sur sa demande de renouvellement de la carte de résident dont il était titulaire ou de délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et famille", ainsi que le refus implicite de la même autorité de lui délivrer des récépissés.
Par une demande enregistrée au greffe du même tribunal sous le numéro n° 2300922, M. E... a demandé à ce tribunal d'annuler l'arrêté du 9 décembre 2022 par lequel la préfète de la Loire a refusé le renouvellement de la carte de résident dont il était titulaire, a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans.
Par un jugement nos 2300800-2300922 du 6 avril 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté ces demandes.
Procédure devant la cour
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 3 juillet 2023 et 23 juillet 2024, M. B..., représenté par Me Petit, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement nos 2300800-2300922 du 6 avril 2023 du tribunal administratif de Lyon, en tant qu'il a rejeté les conclusions de la demande n° 2300922 ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 9 décembre 2022 par lequel la préfète de la Loire a refusé de renouveler la carte de résident dont il était titulaire, a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Loire :
- à titre principal, de renouveler la carte de résident dont il était titulaire, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
- à titre subsidiaire, de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
- à titre infiniment subsidiaire, de lui remettre un récépissé ou une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
- à titre encore subsidiaire, de lui délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans l'attente du réexamen de sa situation dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
- de s'assurer de l'effacement de son signalement aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros hors taxes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
Sur la régularité du jugement :
- les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen, dirigé contre la décision refusant le renouvellement de sa carte de résident, tiré de la méconnaissance des articles L. 424-6 et R. 424-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les premiers juges ont omis de statuer sur le moyen, dirigé contre la décision fixant le pays de destination, tiré de l'erreur de droit relative à la conservation de sa qualité de réfugié, faisant obstacle à son renvoi vers son pays d'origine ;
- le jugement est entaché d'une irrégularité de procédure en ce que les premiers juges ont procédé d'office à une substitution de base légale, sans le mettre à même de présenter ses observations sur cette substitution ;
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la décision de refus de renouvellement de la carte de résident :
- cette décision méconnaît les dispositions des articles L. 424-6 et R. 424-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'un vice de procédure en ce que la préfète n'a pas répondu à sa demande de renouvellement de sa carte de résident ;
- elle est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur de droit et d'une erreur de fait en ce qu'elle ne se prononce pas sur la demande de renouvellement de sa carte de résident, dont il avait sollicité le renouvellement et qui ne pouvait pas lui être retirée ;
En ce qui concerne la décision de refus de délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " :
- elle est entachée d'un vice de procédure, en ce qu'elle n'a pas été précédée de la saisine de la commission du titre de séjour, alors qu'il avait sollicité son admission exceptionnelle au séjour et qu'il justifie d'une résidence habituelle de plus de dix ans sur le territoire français préalablement à son incarcération en mai 2018, ce que la préfecture n'a jamais contesté en défense ;
- la préfète ne s'est pas livrée à un examen particulier de sa situation personnelle ;
- la décision est entachée d'une erreur d'appréciation de sa situation personnelle ;
- elle est entachée d'une erreur de fait en ce qui concerne la durée de son séjour régulier en France et la situation de ses parents et sœur ;
- la menace à l'ordre public n'est pas caractérisée ;
- la décision porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et familiale ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale, par voie d'exception, du fait de l'illégalité de la décision portant refus de renouvellement ou de délivrance d'un titre de séjour ;
- elle méconnaît les dispositions du 3° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il justifie d'une résidence habituelle de plus de dix ans sur le territoire français ;
- la décision porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
En ce qui concerne la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire :
- elle est illégale, par voie d'exception, du fait de l'illégalité de la décision portant refus de renouvellement ou de délivrance d'un titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- la préfète ne s'est pas livrée à un examen particulier de sa situation personnelle, notamment de sa situation de détention à la date de la décision attaquée ;
- la décision est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle et notamment de détention ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- elle est illégale, par voie d'exception, du fait de l'illégalité de la décision portant refus de renouvellement ou de délivrance d'un titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle est entachée d'une erreur de fait quant à sa nationalité et, par suite, quant au pays de destination ;
- elle est entachée d'une erreur de fait quant à ses attaches en France ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article 33 de la Convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;
- elle est entachée d'une erreur de droit, en ce que le retrait du statut de réfugié n'emporte pas la perte de la qualité de réfugié et que sa qualité de réfugié azerbaïdjanais fait obstacle à son expulsion vers C... ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et l'alinéa 2 de l'article 19 de cette charte ;
- elle est entachée d'une erreur de droit quant à la protection contre l'éloignement à destination de C... que lui offre la qualité de réfugié ;
En ce qui concerne la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :
- elle est insuffisamment motivée au regard des dispositions de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur de fait et d'appréciation de sa situation personnelle et familiale et de la prétendue menace à l'ordre public qu'il représenterait ;
- la décision porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
La requête a été communiquée à la préfète de la Loire, qui n'a pas produit de mémoire en défense dans le cadre de la présente instance.
Par ordonnance du 23 mai 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 13 juin 2024.
Le 23 juillet 2024, M. B... a produit un mémoire en réponse à une demande de pièces complémentaires adressée par la cour en application de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative.
La demande d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle de M. B... a été rejetée par une décision du 14 juin 2023, confirmée par une décision du président de la cour du 2 février 2024.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et le protocole relatif au statut des réfugiés, conclu à New-York le 31 janvier 1967 ;
- le traité sur l'Union européenne et le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la directive n° 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d'une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et au contenu de cette protection ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code pénal ;
- le code de procédure pénale ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Maubon, première conseillère,
- et les observations de Me Petit, représentant M. B....
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., né le 27 novembre 1991, déclare être entré en France en février 2005. Il est constant que M. B... a bénéficié du statut de réfugié, en application du principe d'unité de famille, ses parents ayant été reconnus réfugiés à titre principal par des décisions de la Commission de recours des réfugiés du 13 juillet 2006. Il a bénéficié à ce titre d'une carte de résident portant la mention " réfugié azerbaïdjanais ", délivrée le 24 mai 2011 et valable jusqu'au 23 mai 2021. Par un arrêt du 10 mai 2019, la cour d'assises de la Loire l'a condamné à une peine de quinze ans d'emprisonnement pour des faits de viol avec les circonstances aggravantes que les faits ont été commis par plusieurs auteurs et alors que la victime était particulièrement vulnérable, commis en janvier 2014 à Saint-Etienne. Par un arrêt du 3 juillet 2020, la cour d'assises du Rhône statuant en appel l'a condamné à une peine de douze ans d'emprisonnement pour ces mêmes faits. Le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a mis fin au statut de réfugié de M. B... par une décision du 26 mai 2021, sur le fondement des dispositions du 2° de l'article L. 511-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en considération de ces condamnations. Le 14 octobre 2021, M. B... a sollicité auprès de la préfecture de la Loire le renouvellement de son titre de séjour, dans l'attente de la décision de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) saisie d'un recours contre la décision du 26 mai 2021, ou à défaut la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Le recours formé par M. B... contre la décision du 26 mai 2021 mettant fin à son statut de réfugié a été rejeté par une décision de la CNDA du 17 juin 2022. Par un arrêté du 9 décembre 2022, la préfète de la Loire a refusé de renouveler le titre de séjour de M. B..., a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans. M. B... relève appel du jugement du 6 avril 2023 du tribunal administratif de Lyon en tant qu'il a rejeté les conclusions de sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 9 décembre 2022.
Sur la régularité du jugement de première instance :
2. En premier lieu, M. B... soutient que le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de la méconnaissance par l'arrêté contesté des articles L. 424-6 et R. 424-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dirigé contre la décision de refus de renouvellement de sa carte de résident. Toutefois, ces articles sont relatifs au retrait de la carte de résident délivré en qualité de réfugié, et ne peuvent pas être utilement invoqués à l'encontre d'une décision de refus de renouvellement d'une telle carte. L'arrêté contesté du 9 décembre 2022 porte décision de refus de renouvellement de la carte de résident de M. B..., qui expirait le 23 mai 2021, et refus de renouvellement de son titre de séjour au profit d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Par suite, le tribunal n'était pas tenu de se prononcer sur le moyen, inopérant, tiré de la méconnaissance des articles L. 424-6 et R. 424-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile soulevé à l'encontre de la décision de refus de renouvellement de la carte de résident de M. B.... Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement ne peut dès lors qu'être écarté.
3. En deuxième lieu, M. B... soutient que le tribunal a omis de statuer sur le moyen tiré de l'erreur de droit, résultant de l'impossibilité de le renvoyer à destination de C... du fait de la conservation de la qualité de réfugié malgré la fin du statut de réfugié, dirigé contre la décision fixant le pays de destination. Toutefois, il ressort des termes du jugement attaqué, notamment de ses points 13 et 14, que le tribunal n'a pas omis de statuer sur le moyen tiré du fait que la révocation du statut de réfugié n'a pas pour effet de priver de la qualité de réfugié une personne qui en remplit les conditions et de la méconnaissance de l'article 33 de la convention de Genève. Le moyen tiré de ce que le jugement serait irrégulier à raison de cette omission doit par suite être écarté.
4. En troisième lieu, il ressort des termes du point 11 du jugement contesté que le tribunal, en ce qui concerne le fondement de la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire, a considéré d'une part que la préfète s'était fondée à tort sur l'existence d'un risque de soustraction à la mesure d'éloignement, motif prévu au 3° de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et d'autre part " qu'elle aurait pris la même décision en se fondant sur la seule menace pour l'ordre public que constitue [le] comportement " de M. B..., motif relevant du 1° du même article L. 612-2. Ce faisant, le tribunal n'a pas procédé à une substitution de base légale d'office, mais à la neutralisation d'un motif considéré comme illégal d'une décision comportant plusieurs motifs, dont l'un a été considéré comme pouvant légalement fonder cette décision. Par suite, le moyen tiré de ce que la cour aurait procédé d'office à une substitution de base légale sans mettre les parties à même de présenter leurs observations sur ce point ne peut qu'être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement de première instance :
En ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de renouvellement de la carte de résident de M. B... :
5. En premier lieu, aux termes de l'article L. 424-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable à la date de l'arrêté du 9 décembre 2022 contesté : " Lorsqu'il est mis fin au statut de réfugié par décision définitive de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou par décision de justice ou lorsque l'étranger renonce à ce statut, la carte de résident prévue aux articles L. 424-1 et L. 424-3 est retirée. / L'autorité administrative statue sur le droit au séjour des intéressés à un autre titre dans un délai fixé par décret en Conseil d'État. / La carte de résident ne peut être retirée en application du premier alinéa quand l'étranger est en situation régulière depuis au moins cinq ans. "
6. La carte de résident dont était titulaire M. B..., et dont il avait sollicité le renouvellement, était expirée à la date de la décision attaquée, qui constitue une décision de refus de renouvellement de titre de séjour et non une décision de retrait de cette carte de résident. Dans ces conditions, M. B... ne peut pas utilement invoquer la méconnaissance des dispositions des articles L. 424-6 et R. 424-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui sont relatives aux décisions de retrait. Il ne résulte pas davantage de ces dispositions, relatives au retrait de la carte de résident, que l'autorité préfectorale se trouverait en situation de compétence liée pour accorder le renouvellement d'une carte de résident au jour de son expiration. Le moyen ne peut donc qu'être écarté dans toutes ses branches.
7. En deuxième lieu, il ressort des termes de la demande de titre de séjour rédigée par le conseil de M. B... en octobre 2021, confirmés par ceux de courriers d'avril et de juillet 2022, que M. B... n'a sollicité le renouvellement de sa carte de résident portant la mention " réfugié " que " dans l'attente de la décision de la CNDA " et qu'il a sollicité à titre subsidiaire la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Ainsi, en relevant le 9 décembre 2022, après avoir visé la décision du 26 mai 2021 de l'OFPRA et la décision du 17 juin 2022 de la CNDA confirmant la perte de statut de réfugié de M. B..., que celui-ci " a sollicité le 13 octobre 2021, lors du renouvellement de sa carte de séjour temporaire mention " réfugié " qui lui a été délivré sur le fondement de l'article L. 424-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, un changement de statut et la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 423-23 ou L. 435-1 du CESEDA ", la préfète de la Loire n'a entaché son arrêté, dont l'article 1er porte refus de la demande de renouvellement du titre de séjour présentée par M. B..., ni de défaut de réponse à la demande de renouvellement de la carte de résident, qui n'était présentée que " dans l'attente de la décision de la CNDA ", ni d'erreur de fait, ni d'insuffisance de motivation, ni de défaut d'examen particulier de sa situation personnelle.
En ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " :
8. En premier lieu, aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. "
9. Les années passées en détention au titre d'une peine privative de liberté ne peuvent être regardées comme une période de résidence habituelle au sens des dispositions précitées de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et s'imputer sur le calcul des dix ans qu'elles mentionnent.
10. M. B... soutient être entré en France en février 2005 alors qu'il était mineur, et avoir résidé habituellement en France depuis lors. Toutefois, parmi les pièces nouvelles qu'il produit en appel pour justifier de sa résidence habituelle en France depuis cette date, il ne produit aucun justificatif de sa présence sur le territoire français entre le 4 mai 2012, date à laquelle il a déclaré un début d'activité d'autoentrepreneur, et le 25 septembre 2013, date à laquelle il a déclaré son chiffre d'affaires pour juin juillet et août 2013, les documents fiscaux reçus entre temps n'établissant pas sa présence durant cette période. Il n'établit pas non plus la réalité de sa présence entre le 13 juin 2014, date de son interpellation pour des faits de vol en réunion, et le 19 septembre 2015, date à laquelle il a conclu un contrat de travail à durée indéterminée en qualité d'employé polyvalent, et ne produit pas de document attestant de la perception de revenus pour l'année 2014. En outre et surtout, il ressort des mentions du bulletin n° 2 du casier judiciaire de M. B... extrait le 25 août 2022 et de celles de sa fiche pénale éditée le 8 mars 2021, qu'il a été incarcéré six mois et 22 jours entre juin 2014 et janvier 2015 puis sans interruption à partir du 27 mai 2018. Ces périodes ne peuvent pas, ainsi qu'il a été indiqué au point précédent, être regardées comme une période de résidence habituelle. Ainsi, M. B... ne justifie pas résider habituellement en France depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée. Par suite, le moyen tiré de l'absence de consultation préalable de la commission du titre de séjour doit être écarté.
11. En deuxième lieu, M. B... soutient que la décision du 9 décembre 2022 est entachée d'erreurs de fait en ce qui concerne la durée de son séjour régulier en France et la situation de ses parents et sœur. D'une part, en considérant que " l'intéressé déclare que ses parents et sa sœur résident en France sans le justifier " et " n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ", la préfète de la Loire s'est bornée à porter une appréciation sur le contenu de la demande dont elle était saisie, sans entacher sa décision d'erreurs de fait. D'autre part, il ressort des termes de la décision contestée que la préfète de la Loire a considéré que M. B... a été en situation régulière du 11 juin 2009, date de sa demande de délivrance d'un premier titre de séjour, au 27 mai 2018, date de son incarcération pour purger ses peines d'emprisonnement, " soit pendant 8 ans 9 mois et 16 jours ". Toutefois, il ressort des mentions de l'arrêté du 9 décembre 2022 que cette appréciation, portée en ce qui concerne la protection contre l'éloignement prévue par l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, n'a pas eu d'incidence sur l'appréciation portée par la préfète pour adopter la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour à M. B..., qui est fondée sur le seul motif que la présence de ce dernier en France constitue une menace pour l'ordre public. Le moyen tiré de prétendues erreurs de fait doit donc être écarté.
12. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La circonstance que la présence d'un étranger en France constitue une menace pour l'ordre public fait obstacle à la délivrance et au renouvellement de la carte de séjour temporaire, de la carte de séjour pluriannuelle et de l'autorisation provisoire de séjour prévue aux articles L. 425-4 ou L. 425-10 ainsi qu'à la délivrance de la carte de résident (...). " Aux termes de l'article L. 432-1 du même code : " La délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public. "
13. Il ressort des pièces du dossier, ainsi qu'il a été dit au point 5 ci-dessous, que M. B..., présent en France depuis février 2005 d'après ses déclarations, titulaire de la qualité de réfugié, a été condamné en juillet 2020 à une peine de douze ans d'emprisonnement pour des faits de viol, avec deux circonstances aggravantes, commis en janvier 2014. Il avait précédemment été condamné, en mars 2016, à une amende pour des faits de vol en réunion commis en juin 2014. Depuis sa mise sous écrou, le 27 mai 2018, il a été condamné en septembre 2018 à quatre mois d'emprisonnement pour des faits de complicité de tentative de remise ou sortie irrégulière de correspondance, somme d'argent ou objet de détenu commis en juillet 2018. Il a perdu le statut de réfugié par une décision du directeur général de l'OFPRA du 26 mai 2021 confirmée par une décision du 17 juin 2022 de la CNDA. M. B... était marié depuis trois mois et quinze jours et avait perdu son emploi de chauffeur depuis un mois et sept jours à la date de son incarcération. Eu égard à la gravité des faits de viol pour lesquels il a été condamné dix-huit mois avant la décision contestée, bien qu'ils aient été commis il y a près de neuf ans à la date de la décision attaquée, la préfète de la Loire n'a pas commis d'erreur d'appréciation en considérant que la présence de M. B... en France constituait une menace pour l'ordre public Ni les regrets et les efforts de réinsertion dont se prévaut M. B..., ni la circonstance qu'il aurait bénéficié d'une permission de sortie en octobre 2021, ne sont suffisants pour remettre en cause cette appréciation. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'absence de menace à l'ordre public doit être écarté.
14. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
15. M. B... fait état de ce que sa vie privée et familiale se situe en France, où il est entré mineur il y a dix-huit ans, où résident les membres de sa famille reconnus réfugiés, notamment ses parents à la santé fragile, où il réside régulièrement sous couvert d'une carte de résident portant la mention " réfugié " valable jusqu'en mai 2021 et dont il a sollicité le renouvellement, où sa présence ne constitue pas une menace pour l'ordre public, où il fournit des efforts de réinsertion et où il s'est marié avec une ressortissante arménienne en février 2018. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. B... a été autorisé à séjourner en France en raison de son statut de réfugié, statut auquel il a été mis fin par une décision du directeur général de l'OFPRA du 26 mai 2021 confirmée par une décision de la CNDA du 17 juin 2022. Il ne dispose pas d'autres liens en France que ses parents et sa sœur, qui ont conservé leur statut de réfugié, et son épouse. Il ne ressort pas des pièces du dossier que cette ressortissante arménienne avec laquelle il a contracté mariage en février 2018 en France, disposerait d'un droit au séjour en France. Incarcéré depuis mai 2018 pour purger une peine d'emprisonnement de douze ans pour des faits de viol avec circonstances aggravantes, M. B... ne justifie pas de perspectives d'intégration particulières sur le territoire français, bien qu'il ait travaillé plusieurs années avant sa mise en détention. Dans ces conditions, la préfète de la Loire n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. B... une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision attaquée. Les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent dès lors être écartés.
16. En cinquième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ".
17. Les circonstances dont fait état M. B..., tirées de sa qualité de réfugié, de l'absence de menace à l'ordre public, de sa durée de présence régulière et habituelle sur le territoire français, de l'intensité de ses attaches familiales en France, de l'absence d'attaches dans son pays de naissance, de ses perspectives d'intégration professionnelle et sociale ainsi que l'origine de la famille de la région du Haut Karabagh, ne sont pas suffisantes pour constituer des motifs exceptionnels ou des considérations humanitaires permettant de l'admettre au séjour en application des dispositions précitées. Le moyen ne peut en conséquence être accueilli.
En ce qui concerne la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
18. En premier lieu, en l'absence d'illégalité de la décision portant refus de renouvellement ou de délivrance de titre de séjour, le moyen tiré de l'illégalité de cette décision et soulevé par voie d'exception à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.
19. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) / 3° L'étranger qui réside régulièrement en France depuis plus de dix ans, sauf s'il a été, pendant toute cette période, titulaire d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle portant la mention " étudiant " ; / (...) ". Une période de détention au titre d'une peine privative de liberté ne peut être regardée comme une période de résidence régulière au sens du 3° de l'article L. 611-3 du code d'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile.
20. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., entré mineur en France en compagnie de ses parents reconnus réfugiés en juillet 2006, a bénéficié d'un titre de séjour en tant que réfugié, valable du 24 mai 2011 au 23 mai 2021. Toutefois, il résulte de l'extrait de son casier judiciaire et de la fiche pénale produites par le préfet devant le tribunal que M. B... a été incarcéré à trois reprises, du 14 au 17 juin 2014, du 4 juillet 2014 au 22 janvier 2015 puis depuis le 27 mai 2018 sans interruption. Ainsi, il ne justifie pas d'une période de résidence régulière depuis plus de dix ans en France à la date de la décision attaquée. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 3° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.
21. En troisième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, soulevé à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, doit être écarté par les mêmes motifs que ceux exposés au point 15 en ce qui concerne la décision de refus de séjour, M. B... ne faisant valoir aucune circonstance particulière distincte à l'encontre de la décision d'éloignement
En ce qui concerne la décision portant refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :
22. En premier lieu, en l'absence d'illégalité des décisions portant refus de renouvellement ou de délivrance de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, le moyen tiré de l'illégalité de ces décisions et soulevé par voie d'exception à l'encontre de la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire ne peut qu'être écarté.
23. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. / (...) ". Aux termes de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : / 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; / (...) / 3° Il existe un risque que l'étranger se soustraie à la décision portant obligation de quitter le territoire français dont il fait l'objet ".
24. Il ressort des termes de l'arrêté du 9 décembre 2022 que la décision de refus d'octroi d'un délai de départ volontaire contestée, qui est adoptée à la suite d'une décision de refus de séjour motivée par la menace pour l'ordre public que constitue la présence de M. B... en France et qui se réfère deux fois au 1° de l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, même si elle indique que le risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français " est établi ", sans pour autant le caractériser, et qu'" il y a lieu d'appliquer les dispositions de l'article L. 612-2, 3° du CESEDA ", est fondée sur les dispositions du 1° de cet article et sur la menace pour l'ordre public que constitue le comportement de M. B.... Dans ces conditions, les moyens tirés du défaut d'examen de la situation, de l'erreur d'appréciation et de l'erreur manifeste d'appréciation, relatifs au risque de soustraction, doivent doit être écartés.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
25. En premier lieu, en l'absence d'illégalité des décisions portant refus de renouvellement ou de délivrance de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, le moyen tiré de l'illégalité de ces décisions et soulevé par voie d'exception à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ne peut qu'être écarté.
26. En deuxième lieu, en se bornant à soutenir que sa nationalité ne peut être azerbaïdjanaise, alors qu'il est né le 27 novembre 1991, soit postérieurement à la déclaration d'indépendance de C..., à Talich, localité de cet État, et qu'il a bénéficié d'une carte de résident portant la mention " réfugié azerbaïdjanais " qu'il n'a pas remise en cause, comme sa sœur et ses parents, M. B... n'apporte pas suffisamment d'éléments pour établir que la préfète de la Loire aurait entaché sa décision d'une erreur de fait en désignant C... comme son pays d'origine et le pays dont il possède la nationalité.
27. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que, par une décision du 24 mai 2011, l'OFPRA a informé M. B... qu'il avait été admis au statut de réfugié durant sa minorité et qu'il était maintenu dans ce statut à sa majorité. Il a été mis fin à ce statut par une décision de l'OFPRA du 26 mai 2021, confirmée par une décision de la CNDA du 27 juin 2022.
28. Aux termes de l'article 33 de la convention de Genève : " 1. Aucun des États contractants n'expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques. / 2. Le bénéfice de la présente disposition ne pourra toutefois être invoqué par un réfugié qu'il y aura des raisons sérieuses de considérer comme un danger pour la sécurité du pays où il se trouve ou qui, ayant été l'objet d'une condamnation définitive pour un crime ou délit particulièrement grave, constitue une menace pour la communauté dudit pays. ". Aux termes de l'article 21 de la directive du 13 décembre 2011 : " 1. Les États membres respectent le principe de non-refoulement en vertu de leurs obligations internationales. / 2. Lorsque cela ne leur est pas interdit en vertu des obligations internationales visées au paragraphe 1, les États membres peuvent refouler un réfugié, qu'il soit ou ne soit pas formellement reconnu comme tel : / a) lorsqu'il y a des raisons sérieuses de considérer qu'il est une menace pour la sécurité de l'État membre où il se trouve ; ou / b) lorsque, ayant été condamné en dernier ressort pour un crime particulièrement grave, il constitue une menace pour la société de cet État membre. / (...) ". Aux termes de l'article L. 511-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le statut de réfugié est refusé ou il y est mis fin dans les situations suivantes : / 1° Il y a des raisons sérieuses de considérer que la présence en France de la personne concernée constitue une menace grave pour la sûreté de l'État ; / 2° La personne concernée a été condamnée en dernier ressort (...) soit pour un crime, soit pour un délit constituant un acte de terrorisme ou une apologie publique d'un acte de terrorisme ou puni de dix ans d'emprisonnement, et sa présence constitue une menace grave pour la société française. " Il résulte de ces dispositions qu'il peut être dérogé au principe de non-refoulement lorsqu'il existe des raisons sérieuses de considérer que le réfugié constitue une menace grave pour la sureté de l'État ou lorsque, ayant été condamné en dernier ressort en France soit pour un crime, soit pour un délit constituant un acte de terrorisme ou puni de dix ans d'emprisonnement, il constitue une menace grave pour la société. Toutefois, un État membre ne saurait éloigner un réfugié lorsqu'il existe des motifs sérieux et avérés de croire qu'il encourt dans le pays de destination un risque réel de subir des traitements prohibés par les articles 4 et 19 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ou l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
29. Il appartient à l'étranger qui conteste son éloignement de démontrer qu'il y a des raisons sérieuses de penser que, si la mesure incriminée était mise à exécution, il serait exposé à un risque réel de se voir infliger des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou aux articles 4 et 19 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Toutefois, le fait que la personne ait la qualité de réfugié est un élément qui doit être particulièrement pris en compte par les autorités. Dès lors, la personne à qui le statut de réfugié a été retiré, mais qui a conservé la qualité de réfugié, ne peut être éloignée que si l'administration, au terme d'un examen approfondi de sa situation personnelle prenant particulièrement en compte cette qualité, conclut à l'absence de risque pour l'intéressé de subir un traitement prohibé par les stipulations précitées dans le pays de destination.
30. M. B..., au visa de l'article L. 511-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de l'article 14 de la directive n° 2011-95/UE et de l'article 33 de la convention de Genève, soutient que " ayant conservé la qualité de réfugié, il ne peut valablement être renvoyé à destination de C... " et qu'il " n'a pas à démontrer qu'il risquerait de subir un traitement prohibé par les dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ". Toutefois, ainsi qu'il a été exposé ci-dessus, la qualité de réfugié ne fait pas à elle seule obstacle à l'éloignement de l'étranger à destination de son pays d'origine. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'erreur de droit doit être écarté.
31. En quatrième lieu, en invoquant les circonstances, anciennes, qui ont justifié la reconnaissance du statut de réfugié à ses parents en 2006 ainsi que le fait qu'il ne dispose plus d'aucun lien avec son pays de naissance, C..., dans lequel il se retrouverait isolé, sans apporter d'éléments actualisés sur la persistance d'un risque personnel pour sa vie ou sa sécurité, alors que la décision ne l'oblige pas à retourner dans la région du Haut-Karabagh et qu'elle permet au demeurant son éloignement à destination de tout pays tiers où il serait légalement admissible, M. B... ne démontre pas que son éloignement à destination de ce pays lui ferait courir un risque réel de subir des traitements prohibés par les articles 4 et 19 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ou l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 33 de la convention de Genève doit être écarté pour les mêmes motifs.
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans :
32. Aux termes de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger, l'autorité administrative assortit la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative n'édicte pas d'interdiction de retour. / Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. " Aux termes de l'article L. 612-10 de ce code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / (...). "
33. En premier lieu, il incombe à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace.
34. L'arrêté du 9 décembre 2022 mentionne, en particulier, la date de naissance de l'intéressé, le fait qu'il a quitté son pays à l'âge de quatorze ans, la décision du 24 mai 2011 lui reconnaissant le statut de réfugié, les décisions du 26 mai 2021 et du 17 juin 2022 mettant fin à ce statut, la condamnation à une peine de réclusion criminelle par un arrêt de la cour d'assises de la Loire du 10 mai 2019, la condamnation à une peine d'emprisonnement délictuel par un jugement du tribunal correctionnel de Saint-Etienne du 7 septembre 2018, le fait que M. B... est défavorablement connu des services de police, la circonstance qu'il est marié et la présence de ses parents et de sa sœur en France, avant de conclure qu'une interdiction de retour sur le territoire français de trois ans est justifiée " compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, de l'absence de liens personnels et familiaux anciens, intenses et stables sur le titre de séjour et de son comportement qui représente un trouve grave à l'ordre public ". Eu égard aux critères énoncés à l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision portant interdiction de retour sur le territoire français est ainsi suffisamment motivée. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation, de même que celui tiré de la méconnaissance de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit être écarté.
35. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que M. B..., arrivé mineur en France, bien que présent en France durant de nombreuses années et titulaire entre 2011 et 2021 d'une carte de résident d'une durée de validité de dix années, s'est rendu coupable en janvier 2014 d'un crime pour lequel il a été condamné à douze ans de réclusion en juillet 2020, en juin 2014 d'un délit pour lequel il a été condamné à une amende en mars 2016 et en juillet 2018 d'un délit pour lequel il a été condamné à quatre mois d'emprisonnement en septembre 2018. Ces faits, bien que relativement anciens, sont d'une gravité suffisante pour caractériser une menace pour l'ordre public justifiant le prononcé à son encontre d'une interdiction de retour sur le territoire français, nonobstant la présence en France de ses parents, de sa sœur et de son épouse, cette dernière ne justifiant pas d'un droit au séjour en France, et l'absence de précédente mesure d'éloignement. Dans ces conditions, au regard des critères listés à l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la préfète de la Loire n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 612-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en prononçant à l'encontre de M. B... une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans, soit la durée maximale pouvant être prononcée dans cette hypothèses. Les moyens tirés de l'erreur de fait et de l'erreur d'appréciation doivent donc être écartés.
36. En troisième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 14, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
37. Il résulte de toute ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée pour information au préfet de la Loire.
Délibéré après l'audience du 17 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,
Mme Anne-Gaëlle Mauclair, présidente-assesseure,
Mme Gabrielle Maubon, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 octobre 2024.
La rapporteure,
G. Maubon
La présidente,
M. D... La greffière,
F. Prouteau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
N° 23LY002218 2