Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 15 octobre 2020 par laquelle la Commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité a refusé de lui délivrer une autorisation préalable pour une formation d'agent privé de sécurité.
Par un jugement n° 2007181 du 15 décembre 2021, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 février et 31 octobre 2022, M. A..., représenté par Me Chavkhalov, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2007181 du 15 décembre 2021 du tribunal administratif de Strasbourg ;
2°) d'annuler la décision du 15 octobre 2020 par laquelle la Commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité a refusé de lui délivrer une autorisation préalable pour une formation d'agent privé de sécurité ;
3°) d'enjoindre, à titre principal, au Conseil national des activités privées de sécurité de lui accorder une autorisation préalable à une formation professionnelle d'agent privé de sécurité, et, subsidiairement, de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge du conseil national des activités privées de sécurité la somme de 1 500 euros au bénéfice de son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision est entachée d'un vice de procédure en ce que les procédures relatives aux deux mises en cause dont il a fait l'objet ont été classées sans suite et qu'il n'est pas établi par le CNAPS qu'une autorisation a été donnée par le ministère public pour la consultation de ces données ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 septembre 2022, le conseil national des activités privées de sécurité, représenté par Me Cano, conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 500 euros soit mise à la charge de M. A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la sécurité intérieure,
- le code de procédure pénale,
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lusset, rapporteur,
- les observations de Me Lacoeuilhe pour le CNAPS ;
- et les conclusions de M. Denizot, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision du 15 octobre 2020, la commission nationale d'agrément et de contrôle du Conseil national des activités privées de sécurité (ci-après CNAPS) a rejeté le recours administratif préalable obligatoire formé par M. A... contre la décision du 19 juin 2020 par laquelle la commission locale d'agrément et de contrôle Est a refusé de lui délivrer une autorisation préalable pour une formation d'agent privé de sécurité. M. A... relève appel du jugement du 15 décembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 612-20 du code de la sécurité intérieure : " Nul ne peut être employé ou affecté pour participer à une activité mentionnée à l'article L. 611-1 : / 1° S'il a fait l'objet d'une condamnation à une peine correctionnelle ou à une peine criminelle inscrite au bulletin n° 2 du casier judiciaire ou, pour les ressortissants étrangers, dans un document équivalent, pour des motifs incompatibles avec l'exercice des fonctions ; / 2° S'il résulte de l'enquête administrative, ayant le cas échéant donné lieu à consultation, par des agents du Conseil national des activités privées de sécurité spécialement habilités par le représentant de l'Etat territorialement compétent et individuellement désignés, des traitements de données à caractère personnel gérés par les services de police et de gendarmerie nationales relevant des dispositions de l'article 31 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, à l'exception des fichiers d'identification, que son comportement ou ses agissements sont contraires à l'honneur, à la probité, aux bonnes mœurs ou sont de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes ou des biens, à la sécurité publique ou à la sûreté de l'Etat et sont incompatibles avec l'exercice des fonctions susmentionnées ; (...) ".
3. Il résulte des dispositions précitées que lorsqu'elle est saisie d'une demande de délivrance d'une carte professionnelle pour l'exercice de la profession d'agent privé de sécurité, l'autorité administrative compétente procède à une enquête administrative. Cette enquête, qui peut notamment donner lieu à la consultation du traitement automatisé de données à caractère personnel mentionné à l'article R. 40-23 du code de procédure pénale, vise à déterminer si le comportement ou les agissements de l'intéressé sont contraires à l'honneur, à la probité, aux bonnes mœurs ou sont de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes ou des biens, à la sécurité publique ou à la sûreté de l'Etat, et s'ils sont ou non compatibles avec l'exercice des fonctions d'agent privé de sécurité. Pour ce faire, l'autorité administrative procède, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, à une appréciation globale de l'ensemble des éléments dont elle dispose. A ce titre, si la question de l'existence de poursuites ou de sanctions pénales est indifférente, l'autorité administrative est en revanche amenée à prendre en considération, notamment, les circonstances dans lesquelles ont été commis les faits qui peuvent être reprochés au pétitionnaire ainsi que la date de leur commission.
4. En premier lieu, aux termes de l'article 230-8 du code de procédure pénale : " Le traitement des données à caractère personnel est opéré sous le contrôle du procureur de la République territorialement compétent, qui, d'office ou à la demande de la personne concernée, ordonne qu'elles soient effacées, complétées ou rectifiées, notamment en cas de requalification judiciaire, ou qu'elles fassent l'objet d'une mention (...). Lorsque les données à caractère personnel relatives à la personne concernée font l'objet d'une mention, elles ne peuvent faire l'objet d'une consultation dans le cadre des enquêtes administratives prévues aux articles L. 114-1 et L. 234-1 à L. 234-3 du code de la sécurité intérieure et à l'article 17-1 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité (...) ". Aux termes de l'article R. 40-29 du même code : " I. - Dans le cadre des enquêtes prévues à l'article 17-1 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, (...) les données à caractère personnel figurant dans le traitement qui se rapportent à des procédures judiciaires en cours ou closes, à l'exception des cas où sont intervenues des mesures ou décisions de classement sans suite, de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement devenues définitives, ainsi que des données relatives aux victimes, peuvent être consultées, sans autorisation du ministère public, par : 1° Les personnels de la police et de la gendarmerie habilités selon les modalités prévues au 1° et au 2° du I de l'article R. 40-28 ; / (...) / 5° Les personnels investis de missions de police administrative individuellement désignés et spécialement habilités par le représentant de l'Etat. (...). Le procureur de la République adresse aux autorités gestionnaires du traitement un relevé des suites judiciaires devant figurer dans le traitement d'antécédents judiciaires et relatif à la personne concernée. Il indique à l'autorité de police administrative à l'origine de la demande si ces données sont accessibles en application de l'article 230-8 du présent code. (...) ".
5. Il résulte des dispositions du code de procédure pénale précitées que, dans le cadre d'une enquête administrative menée pour l'instruction d'une demande de délivrance d'une carte professionnelle pour l'exercice des métiers de la sécurité privée, les données à caractère personnel concernant une personne mise en cause qui figurent le cas échéant dans le traitement des antécédents judiciaires ne peuvent être consultées lorsqu'elles ont fait l'objet d'une mention, notamment à la suite d'une décision de non-lieu ou de classement sans suite. Aucun texte ne permet de déroger à cette interdiction. Lorsque les données à caractère personnel ne sont pas assorties d'une telle mention, les personnels mentionnés au point précédent peuvent les consulter.
6. En l'espèce, contrairement à ce que soutient M. A..., il ne résulte nullement de l'article R. 40-29 du code de procédure pénale que dans le cadre de son enquête, une autorité administrative serait tenue, lorsque des procédures ont été classées sans suite par le ministère public, d'obtenir une autorisation de ce dernier pour pouvoir consulter les fichiers automatisés des antécédents judiciaires. Au surplus, et en tout état de cause, à supposer même que les procédures concernant M. A... auraient fait l'objet de classements sans suite, ce qui n'est pas établi par les pièces du dossier, le requérant ne verse aucun élément de nature à établir que les données à caractère personnel le concernant qui figurent au fichier du traitement des antécédents judiciaires auraient fait l'objet d'une mention ordonnée par le procureur de la République en application de l'article 230-8 du code de procédure pénale, faisant obstacle à leur consultation dans le cadre d'enquêtes administratives. Il s'ensuit que le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté.
7. En second lieu, pour rejeter le recours administratif préalable obligatoire dont elle était saisie, la Commission nationale d'agrément et de contrôle s'est fondée sur les motifs, d'une part, que M. A... avait été mis en cause le 23 janvier 2019 en qualité d'auteur de faits d'usage de faux en écriture commis dans le cadre du dépôt en préfecture d'un dossier de demande de carte professionnelle pour l'exercice d'une activité de chauffeur de véhicule de tourisme, et, d'autre part, qu'il avait été mis en cause le 22 juin 2015, en qualité d'auteur de faits de déclaration fausse ou incomplète pour obtenir d'une personne publique ou d'un organisme chargé d'une mission de service public, une allocation, une prestation, un paiement ou un avantage indu, commis du 1er juin 2013 au 1er avril 2014. Compte tenu de la nature même de ces agissements, qui révèlent des manquements répétés à la probité, et du caractère récent des faits d'usage de faux en écriture, commis à une date à laquelle M. A... était d'ailleurs titulaire d'une carte professionnelle d'agent de sécurité, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la Commission nationale d'agrément et de contrôle a commis, en lui refusant l'autorisation demandée, une erreur d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 612-20 du code de la sécurité intérieure
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais de l'instance :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du Conseil national des activités privées de sécurité, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
10. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme que demande le Conseil national des activités privées de sécurité sur le fondement des mêmes dispositions.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le Conseil national des activités privées de sécurité sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au Conseil national des activités privées de sécurité.
Délibéré après l'audience du 8 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Ghisu-Deparis, présidente,
- M. Barteaux, président assesseur,
- M. Lusset, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 novembre 2024.
Le rapporteur,
Signé : A. Lusset
La présidente,
Signé : V. Ghisu-DeparisLa greffière,
Signé : F. Dupuy
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
F. Dupuy
N° 22NC00379 2