Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société AXA France IARD a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision implicite née le 9 janvier 2018 par laquelle la commune de Thann a rejeté sa demande préalable d'indemnisation, de condamner solidairement, subsidiairement in solidum, la commune de Thann et la société publique locale Citivia à lui verser la somme de 1 411 309,13 euros, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation à compter de la date du jugement à intervenir, en remboursement des sommes versées en réparation des préjudices subis par le jeune B... A... lors de l'accident du 27 mai 2015 à Thann, de condamner solidairement, subsidiairement in solidum, la commune de Thann et la société publique locale Citivia à prendre à leur charge les conséquences dommageables de l'accident survenu le 27 mai 2015, sur simple présentation des justificatifs de règlement par la société Axa France IARD à intervenir, de déclarer le jugement à intervenir commun à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Haut-Rhin et enfin de mettre à la charge solidairement, subsidiairement in solidum, de la commune de Thann et de la société publique locale Citivia la somme de 20 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1801403 du 14 décembre 2021, le tribunal administratif de Strasbourg, après avoir déclaré le jugement commun à la CPAM du Haut-Rhin, a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 11 février 2022 et 31 mars 2023, la société AXA France IARD, représentée par Me Schreckenberg de la SELARL Schreckenberg et Parniere, demande, dans le dernier état de ses écritures, à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 14 décembre 2021 ;
2°) d'annuler la décision implicite née le 9 janvier 2018 par laquelle la commune de Thann a rejeté sa demande préalable d'indemnisation ;
3°) de condamner solidairement, subsidiairement in solidum, la commune de Thann et la société Citivia à lui verser la somme de 1 411 309,13 euros, assortie des intérêts légaux et de leur capitalisation à compter de la date de la décision à intervenir, au titre des montants payés pour les préjudices subis par le jeune B... A... lors de l'accident du 27 mai 2015 sur la commune de Thann ;
4°) de condamner solidairement, subsidiairement in solidum, la commune de Thann et la société Citivia à prendre à leur charge les futures conséquences dommageables de l'accident survenu le 27 mai 2015, sur simple présentation des justificatifs de règlement par la société AXA France IARD à intervenir ;
5°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise judiciaire ayant pour objet, d'une part, de déterminer les causes et circonstances de l'accident du 27 mai 2015 et de mettre en lumière les éléments permettant à la juridiction de statuer sur la part des responsabilités de chacun et, d'autre part, d'évaluer le préjudice corporel de la victime ;
6°) de déclarer l'arrêt à intervenir commun et opposable à la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin ;
7°) de mettre à la charge solidairement, subsidiairement in solidum, de la commune de Thann et de la société Citivia la somme de 20 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa demande est recevable ;
- c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que la commune n'était pas tenue d'une obligation d'entretien normal des ouvrages ;
- l'accident s'est produit à l'intérieur de l'agglomération de la commune de Thann, dont l'entretien incombe à la commune ; si l'avenue Pasteur appartient au département, le maire est en tout état de cause tenu à ses obligations d'entretien et la commune et le département seront donc co-responsables ; par ailleurs, il n'est également pas démontré que l'allée de Noisetiers n'est pas une voie communale ;
- la responsabilité de la commune de Thann est engagée du fait du défaut d'entretien normal de l'ouvrage public ;
- c'est à tort que le tribunal administratif a considéré que la responsabilité de la commune n'était pas engagée du fait de sa carence dans l'exercice de ses pouvoirs de police municipale ;
- le maire exerce la police de la circulation sur l'ensemble des voies à l'intérieur de l'agglomération, incluant les routes départementales, mais également les voies privées : la visibilité n'était pas suffisante du fait des hautes herbes qui dépassaient 1,50 à 2 mètres de hauteur ; trois semaines après l'accident, les herbes ont été fauchées à la demande de la commune ;
- le maire est seul compétent pour établir les servitudes destinées à établir une meilleure visibilité sur les voies traversant sa commune, et particulièrement au niveau des croisements ou points dangereux pour la circulation publique ;
- aucun triangle de visibilité théorique n'a été prévu par la commune contrairement aux normes d'aménagement des carrefours interurbains ;
- l'avenue Pasteur a été complétement réaménagée à la suite de l'accident et la vitesse des automobilistes a été réduite de 70 km/h à 30 km/h ; ce qui démontre une signalétique et un aménagement urbain insuffisants ;
- il n'existe pas de causes exonératoires de responsabilité ; le conducteur ne roulait pas à une vitesse excessive ; il n'a jamais été condamné pénalement à la suite de l'accident ; la commune ne peut se prévaloir de ce que l'enfant, âgé alors de 7 ans, ne portait pas de casque de vélo ;
- il y a lieu de condamner solidairement, subsidiairement in solidum, la commune de Thann et la société Citivia, à réparer les conséquences dommageables de l'accident ; il résulte du traité de concession signé avec la commune le 27 mars 1997 et " portant sur l'aménagement du quartier du Blosen ", que cette société " avait la charge d'assurer l'entretien des terrains à commercialiser " ; qu'un partage de responsabilité a vocation à intervenir entre la commune et cette société, chacune ayant la charge de l'entretien d'une partie de l'intersection au niveau de laquelle l'accident s'est produit ;
- les préjudices subis par AXA France IARD, qui est subrogée dans les droits de son assuré, de M. B... A... et ses ayants droit qu'elle a indemnisés, sont évalués à 1 411 309,13 euros à l'été 2021 ; si la subrogation n'était pas retenue par la cour, il y aurait lieu d'appliquer la théorie de l'enrichissement sans cause ;
- les préjudices futurs devront également être indemnisés.
Par trois mémoires en défense enregistrés les 10 juin 2022, 3 février 2023 et 20 février 2023, la société publique locale Citivia, représentée par Me Jung, conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à titre subsidiaire, au rejet de l'appel en garantie formé par la commune de Thann à son encontre ;
3°) à titre très subsidiaire, à un partage de responsabilité avec une part prépondérante à la charge de la commune de Thann ;
4°) à ce que soit mise à la charge de la société AXA France IARD et de la commune de Thann une somme de 1 500 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle fait valoir que :
- les moyens ne sont pas fondés ;
- la preuve de l'entretien normal de la voirie a été rapportée ;
- aucun lien de causalité n'est établi entre ce prétendu défaut d'entretien et l'accident ;
- subsidiairement, la collectivité sera exonérée compte tenu de l'imprudence de la victime et de la faute du conducteur qui roulait à 60 km/h alors que la vitesse était limitée à 50 km/h ;
- la commune n'est pas fondée à l'appeler en garantie ; l'entretien de ses parcelles était réalisé en conformité avec le traité de concession ; l'article 18 de ce traité ne peut pas s'appliquer car aucune faute ne peut lui être reprochée dans l'exécution de la concession ;
- très subsidiairement, si la cour estimait qu'une part de responsabilité devait être retenue en raison de la présence des herbes, elle devra être partagée avec celle de la commune ;
- encore plus subsidiairement, la société AXA France IARD ne justifie pas être subrogée dans les droits de son assuré et de ses ayants-droits et n'apporte pas la preuve du versement des indemnités sollicitées ni les justificatifs d'évaluation des montants ; en l'absence de rapport d'expertise ou de pièce justificative, la demande indemnitaire ne peut qu'être rejetée.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 janvier 2023 et 21 mars 2023, la commune de Thann, représentée par Me Tadic, agissant par son maire, conclut :
1°) à titre principal, au rejet de la requête ;
2°) à titre subsidiaire, à la condamnation de la société publique locale Citivia à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ;
3°) à ce que la somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société AXA France IARD en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le maire n'a pas commis de faute dans l'exercice de ses pouvoirs de police de la circulation ; il n'a pas méconnu l'article L. 2213-1 du code général des collectivités territoriales qui lui confère le pouvoir de police de la circulation ;
- il n'a pas davantage méconnu les pouvoirs qu'il détient des articles L. 114-1 et suivants du code de la voirie routière permettant d'instituer un plan de dégagement ;
- il n'était pas tenu d'intervenir sur le fondement de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales permettant de réaliser des travaux d'élagage ;
- aucun défaut d'entretien normal des deux voies ne pourra être retenu ; l'allée des Noisetiers est une voie privée ouverte à la circulation du public qui appartient à la société publique locale Citivia, de sorte que la commune ne devait pas l'entretenir ; l'avenue Pasteur est une route départementale de sorte que son entretien appartient au département conformément à l'article L. 1313-2 du code de la voirie routière, et ce quand bien même, elle se situe à l'intérieur de l'agglomération ; au surplus, les accotements et cette avenue étaient parfaitement entretenus sur une bande d'au moins un mètre de large ;
- en tout état de cause, le lien de causalité entre l'accident et le défaut d'entretien normal des voies n'est pas établi ;
- à titre subsidiaire, il existe des causes exonératoires de responsabilité ; le conducteur a reconnu qu'il dépassait la limitation de vitesse autorisée ; le jeune garçon a été imprudent et ne s'est pas arrêté au stop ;
- à titre encore plus subsidiaire, en ce qui concerne le préjudice, la société AXA France IARD n'apporte pas la preuve des paiements effectués et ne produit pas la quittance subrogative ;
- à titre infiniment subsidiaire, elle est fondée à appeler en garantie la société publique locale Citivia qui était propriétaire des parcelles sur lesquelles les herbes hautes prétendument à l'origine de l'accident se situaient.
La requête a été communiquée à la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin, agissant pour le compte de la caisse primaire d'assurance maladie du Haut-Rhin, qui n'a pas produit de mémoire.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de la voirie routière ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Roussaux,
- les conclusions de M. Denizot, rapporteur public,
- et les observations de Me Weygand, représentant AXA France IARD, de Me Tadic, représentant la commune de Thann et de Me Yung, représentant la société publique locale Citivia.
Considérant ce qui suit :
1. Le 27 mai 2015, vers 17 heures, à Thann, le jeune B... A..., âgé de sept ans, qui circulait à bicyclette en provenance de l'allée des Noisetiers, a été percuté par un véhicule utilitaire alors qu'il s'engageait sur l'avenue Pasteur. A l'issue de la procédure judicaire classée sans suite par le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Mulhouse, et après avoir vainement adressé une réclamation à la commune de Thann, la société AXA France IARD, assureur du véhicule, a saisi le tribunal administratif de Strasbourg d'une demande tendant à la condamnation solidaire, ou subsidiairement in solidum, de la commune de Thann et de la société publique locale Citivia, d'une part, à lui verser la somme de 1 411 309,13 euros au titre des sommes versées en réparation des préjudices subis par le jeune B... A... et des débours de la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin et, d'autre part, à prendre en charge les conséquences dommageables futures de cet accident sur simple présentation des justificatifs de paiement. La société AXA France IARD relève appel du jugement du 14 décembre 2021 du tribunal administratif de Strasbourg qui a rejeté sa demande.
Sur la responsabilité de la commune de Thann pour défaut d'entretien normal de l'ouvrage public :
En ce qui concerne l'absence de mise en œuvre des pouvoirs de police de la circulation, assimilable à un défaut d'entretien de la voirie publique :
2. Aux termes de l'article L. 2542-3 du code général des collectivités territoriales, applicable en Alsace-Moselle : " Les fonctions propres au maire sont de faire jouir les habitants des avantages d'une bonne police, notamment de la propreté, de la salubrité, de la sûreté et de la tranquillité dans les rues, lieux et édifices publics. Il appartient également au maire de veiller à la tranquillité, à la salubrité et à la sécurité des campagnes ". Aux termes de l'article L. 2213-1 du même code, applicable en Alsace-Moselle : " Le maire exerce la police de la circulation sur les routes nationales, les routes départementales et l'ensemble des voies publiques ou privées ouvertes à la circulation publique à l'intérieur des agglomérations, sous réserve des pouvoirs dévolus au représentant de l'Etat dans le département sur les routes à grande circulation (...) ". Aux termes de l'article L. 3221-4 du même code : " Le président du conseil départemental gère le domaine du département. A ce titre, il exerce les pouvoirs de police afférents à cette gestion, notamment en ce qui concerne la circulation sur ce domaine, sous réserve des attributions dévolues aux maires par le présent code et au représentant de l'Etat dans le département ainsi que du pouvoir de substitution du représentant de l'Etat dans le département prévu à l'article L. 3221-5 ". Aux termes de l'article L. 131-1 du code de la voirie routière : " Les voies qui font partie du domaine public routier départemental sont dénommées routes départementales (...) ". Aux termes de l'article L. 131-2 du même code : " Les dépenses relatives à la construction, à l'aménagement et à l'entretien des routes départementales sont à la charge du département ".
3. Il résulte de ces dispositions que le département, en tant que propriétaire du domaine, est seul compétent pour opérer tous travaux d'aménagement ou d'entretien de son domaine routier, y compris à l'intérieur des agglomérations, dès lors que ces travaux ne privent pas de leur portée les compétences détenues par le maire au titre de ses pouvoirs de police de la circulation. Il résulte des mêmes dispositions précitées que le maire d'une commune est seul compétent, dans le cadre de ses pouvoirs de police de la circulation, pour décider de la mise en place de dispositifs de sécurité sur les routes départementales à l'intérieur de l'agglomération et sur le territoire de sa commune, dès lors que ces dispositifs n'ont ni pour objet, ni pour effet, de modifier l'assiette de la route départementale. Les dommages résultant de la mise en œuvre ou de l'absence de mise en œuvre de ces pouvoirs de police entraînent, le cas échéant, la responsabilité de la seule commune.
4. Il en va de même lorsque les dommages résultent de la carence du maire dans la mise en œuvre de ses pouvoirs de police sur une voie privée ouverte au public.
5. La société Axa France IARD, eu égard à l'argumentation qu'elle développe, doit être regardée comme recherchant la responsabilité de la commune de Thann sur le fondement de l'absence de mise en œuvre de ses pouvoirs de police assimilable à un défaut d'entretien normal de la voirie. Toutefois, il résulte de l'instruction que l'accident litigieux s'est produit à l'intersection entre l'avenue Pasteur, qui est une route départementale, et l'allée des Noisetiers, voie privée ouverte à la circulation du public, appartenant à la date des faits litigieux à la société publique locale Citivia en l'absence de rétrocession à la commune de Thann. Il ressort du rapport d'enquête de la gendarmerie nationale, que ce carrefour était signalé par deux balises d'intersection de type J3 situées à l'extrémité de l'allée des Noisetiers débouchant sur l'avenue Pasteur, un panneau stop et une bande blanche continue. Les photographies, jointes à ce rapport, établissent qu'à l'heure à laquelle est survenu l'accident, soit vers 17 heures, le carrefour était ainsi visible par tout usager vigilant provenant tant de l'avenue Pasteur que de l'allée des Noisetiers. Si le rapport d'enquête de la gendarmerie a relevé la présence d'herbes hautes bordant l'allée des Noisetiers, il résulte des photographies que cette allée était longée par des trottoirs d'environ un mètre de large et que l'accotement de l'avenue Pasteur était fauché sur une largeur similaire, ce qui permettait d'aborder l'intersection avec une visibilité correcte. De plus, le chauffeur du véhicule en cause a spontanément déclaré, lors de son audition par la gendarmerie nationale, n'avoir été gêné par aucun obstacle, puis s'il a précisé, à l'instigation du gendarme, qu'il aurait pu être gêné par le soleil ou les herbes situées sur le bas-côté, il a précisé qu'il ne pensait pas que ces éléments avaient masqué le cycliste qui était " venu tellement vite " de l'allée des Noisetiers en pente descendante. Ainsi, les hautes herbes présentes sur les parcelles privées, concédées à la société Citivia, ne sauraient être regardées comme ayant fait obstacle à une bonne visibilité au niveau du carrefour. Si un fauchage a été effectué sur ces parcelles jusqu'au fossé bordant l'avenue Pasteur dans les jours suivants l'accident, cette circonstance n'est pas de nature à révéler un défaut d'entretien. En outre, il ressort des témoignages recueillis par les gendarmes que la victime, qui avait un comportement imprudent, a franchi l'intersection sans marquer l'arrêt au stop. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en s'abstenant de procéder ou de faire procéder au fauchage des hautes herbes présentes sur une parcelle située à l'angle du carrefour de l'avenue Pasteur et de l'allée des Noisetiers, le maire de Thann aurait commis une faute dans l'exercice de son pouvoir de police de la circulation, assimilable à un défaut d'entretien de la voirie publique.
En ce qui concerne le défaut d'entretien de l'ouvrage public :
6. Il résulte de ce qui a été exposé précédemment qu'il incombe au département du Haut-Rhin d'entretenir l'avenue Pasteur. Toutefois, et à supposer que la société Axa France IARD ait entendu reprocher à la commune de Thann un défaut d'entretien de cette voie, il résulte de l'instruction, et en particulier de la convention d'entretien conclue en 2018 entre le conseil départemental et la commune, que cette dernière a pour unique obligation de faucher l'accotement de cette voie. Dès lors qu'il est constant que les accotements de cette route départementale étaient fauchés sur une largeur d'un mètre, la responsabilité de la commune de Thann ne peut, en tout état de cause, être recherchée pour défaut d'entretien normal de l'ouvrage public.
7. Ainsi qu'il a été exposé au point 5, si l'allée des Noisetiers était ouverte à la circulation publique à la date de l'accident, elle demeurait une voie privée en l'absence de rétrocession à la commune de Thann. En outre, il ne résulte pas de l'instruction qu'elle était entretenue par la commune. Il s'ensuit que le moyen tiré du défaut d'entretien normal d'un ouvrage public ne peut être utilement invoqué pour cette allée par la société Axa France IARD.
Sur la responsabilité de la commune pour défaut de mise en place de servitudes :
8. D'une part, aux termes de l'article L. 2212-2-2 du code général des collectivités territoriales, dans sa version applicable au litige : " Dans l'hypothèse où, après mise en demeure sans résultat, le maire procéderait à l'exécution forcée des travaux d'élagage destinés à mettre fin à l'avance des plantations privées sur l'emprise des voies communales afin de garantir la sûreté et la commodité du passage, les frais afférents aux opérations sont mis à la charge des propriétaires négligents ".
9. D'autre part, aux termes de l'article L. 114-1 du code de la voirie routière : " Les propriétés riveraines ou voisines des voies publiques, situées à proximité de croisements, virages ou points dangereux ou incommodes pour la circulation publique peuvent être frappées de servitudes destinées à assurer une meilleure visibilité ". Aux termes de l'article L. 114-3 du même code, alors applicable : " Un plan de dégagement détermine, pour chaque parcelle, les terrains sur lesquels s'exercent des servitudes de visibilité et définit ces servitudes. Ce plan est soumis à une enquête publique ouverte par l'autorité exécutive de la collectivité territoriale ou de l'établissement public de coopération intercommunale, propriétaire de la voie, et organisée conformément aux dispositions du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. Il est approuvé par le représentant de l'Etat dans le département, le conseil départemental ou le conseil municipal, selon qu'il s'agit d'une route nationale, d'une route départementale ou d'une voie communale ". Aux termes de l'article L. 114-2 du même code : " Les servitudes de visibilité comportent, suivant le cas : 1° L'obligation (...) de supprimer les plantations gênantes, de ramener et de tenir le terrain et toute superstructure à un niveau au plus égal niveau qui est fixé par le plan de dégagement prévu à l'article L. 114-3 (...) ".
10. La requérante ne peut utilement se prévaloir des dispositions des articles L. 114-1 et suivants du code de la voirie routière dès lors que l'avenue Pasteur n'appartient pas à la commune de Thann et que l'allée des Noisetiers n'est pas une voie publique. Elle ne peut pas davantage se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 2212-2-2 du code général des collectivités territoriales qui s'applique aux seules voies communales. En outre, et en tout état de cause, comme cela a été dit au point 5, il ne résulte pas de l'instruction que le maire aurait manqué à ses obligations en s'abstenant d'ordonner la suppression de plantations gênantes pour la visibilité.
11. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, ni d'ordonner une expertise, que la société AXA France IARD n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.
Sur la déclaration d'arrêt commun :
12. Il y a lieu de déclarer le présent arrêt commun à la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin qui, régulièrement mise en cause dans le cadre de cette procédure d'appel, n'a pas produit.
Sur les frais liés au litige :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Thann et de la société publique locale Citivia, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que la société AXA France IARD demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la société AXA France IARD la somme de 1 500 euros demandée par la société publique locale Citivia et celle de 2 000 euros au bénéfice de la commune de Thann, au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société AXA France IARD est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt est déclaré commun à la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin.
Article 3 : La société AXA France IARD versera la somme de 1 500 euros à la société publique locale Citivia et celle de 2 000 euros à la commune de Thann au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société AXA France IARD, à la commune de Thann, à la société publique locale Citivia et à la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin.
Délibéré après l'audience du 21 janvier 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Barteaux, président,
- M. Lusset, premier conseiller,
- Mme Roussaux, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 février 2025.
La rapporteure,
Signé : S. Roussaux Le président,
Signé : S. Barteaux
La greffière,
Signé : N. Basso
La République mande et ordonne au préfet du Haut-Rhin en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
N. Basso
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N° 22NC00342