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11/02/2025 | FRANCE | N°24NC00958

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 4ème chambre, 11 février 2025, 24NC00958


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 3 août 2023 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi.



Par un jugement n° 2302047 du 6 février 2024, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.





Procédure devant la cour :

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Par une requête enregistrée le 16 avril 2024, M. B..., représentée par Me Boia de la SELARL Le Cab Avocats, demande à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 3 août 2023 par lequel le préfet de la Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2302047 du 6 février 2024, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 16 avril 2024, M. B..., représentée par Me Boia de la SELARL Le Cab Avocats, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2302047 du 6 février 2024 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

2°) d'annuler l'arrêté du 3 août 2023 du préfet de la Marne ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- il justifie par les documents qu'il produit de son état civil, et l'authenticité de ces documents n'est pas sérieusement remise en cause par le préfet de la Marne qui a ainsi commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation ;

- il aurait ainsi dû se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet de la Marne, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 mars 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Lusset, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., qui déclare être de nationalité malienne et être entré en France le 28 mai 2020, a été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance le 4 août 2020. Il a demandé au préfet de la Marne son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 3 août 2023, le préfet de la Marne a rejeté sa demande en ce sens, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement n° 2302047 du 6 février 2024 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes des dispositions de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version alors en vigueur : " Dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire ou s'il entre dans les prévisions de l'article L. 421-35, l'étranger qui a été confié au service de l'aide sociale à l'enfance au plus tard le jour de ses seize ans se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Cette carte est délivrée sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de la formation qui lui a été prescrite, de la nature des liens de l'étranger avec sa famille restée dans son pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil sur son insertion dans la société française ". Aux termes de l'article L. 111-6 du même code : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil ". Et aux termes de ce dernier article : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité ".

3. Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Ce faisant, il lui appartient d'apprécier les conséquences à tirer de la production par l'étranger d'une carte consulaire ou d'un passeport dont l'authenticité est établie ou n'est pas contestée, sans qu'une force probante particulière puisse être attribuée ou refusée par principe à de tels documents.

4. En premier lieu, d'une part, l'administration française n'est pas tenue de solliciter nécessairement et systématiquement les autorités d'un autre Etat afin d'établir qu'un acte d'état civil présenté comme émanant de cet Etat est dépourvu d'authenticité, en particulier lorsque l'acte est, compte tenu de sa forme et des informations dont dispose l'administration française sur la forme habituelle du document en question, manifestement falsifié. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, et notamment d'un rapport établi le 11 octobre 2022 par la " cellule fraude documentaire zonale " de la direction zonale de la police aux frontières Est, que l'extrait d'acte de naissance, la copie littérale d'acte de naissance et le jugement supplétif produits par le requérant pour justifier de son état civil comportent des irrégularités au regard de la législation malienne, plusieurs incohérences et de grossières erreurs, notamment orthographiques, portant par exemple la mention " TRBUNAL " en lieu et place de " TRIBUNAL ". Si certains des éléments mis en avant dans le rapport de la police aux frontières, dont le préfet s'est approprié les conclusions, sont insusceptibles d'établir, à eux seuls, le caractère falsifié des documents produits, la multiplicité des incohérences et des fautes d'orthographe suffisent en l'espèce à renverser la présomption d'authenticité résultant de l'article 47 du code civil, et fait par suite obstacle à ce que ces documents soient regardés comme faisant foi. Par ailleurs, si un second rapport du même service, en date du 13 juillet 2023, indique que la carte d'identité consulaire produite par l'intéressé est régulière en la forme, il n'est pas sérieusement contesté que cette carte a été établie à partir des documents précités, lesquels sont dépourvus, ainsi qu'il vient d'être dit, de valeur probante. Enfin, les nouvelles pièces produites en appel ne sont pas davantage de nature à établir l'identité et la date de naissance de l'intéressé, notamment la nouvelle copie littérale d'acte de naissance qui mentionne en pied de page une certification à l'original de l'année 2005, soit une date différente de celle figurant sur l'original initialement produit. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet a estimé qu'il ne justifiait pas avoir été confié à l'aide sociale à l'enfance avant d'avoir atteint l'âge de 16 ans pour lui refuser le titre de séjour sollicité sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 423-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur d'appréciation doivent, dès lors, être écartés.

5. En second lieu, et pour les mêmes motifs que ceux évoqués au point précédent, M. B... n'établit pas que le préfet de la Marne a commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de l'admettre au séjour.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 août 2023 du préfet de la Marne. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des frais d'instance, doivent être également rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Marne.

Délibéré après l'audience du 21 janvier 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Barteaux, président,

- M. Lusset, premier conseiller,

- Mme Roussaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 février 2025.

Le rapporteur,

Signé : A. LussetLe président,

Signé : S. Barteaux

La greffière,

Signé : N. Basso

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N. Basso

2

N° 24NC00958


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24NC00958
Date de la décision : 11/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BARTEAUX
Rapporteur ?: M. Arnaud LUSSET
Rapporteur public ?: M. DENIZOT
Avocat(s) : LE CAB AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-02-11;24nc00958 ?
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