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09/04/2024 | FRANCE | N°23NT03053

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 6ème chambre, 09 avril 2024, 23NT03053


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. F... B... et Mme C... Sangharé ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours formé contre une décision des autorités consulaires françaises à Nouakchott (Mauritanie) refusant de délivrer à M. B... un visa de long séjour en qualité de conjoint étranger d'une ressortissante française.



Par un jugeme

nt n° 2214765 du 31 août 2023, le tribunal administratif de Nantes a annulé cette décision et a enjoint...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... B... et Mme C... Sangharé ont demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté leur recours formé contre une décision des autorités consulaires françaises à Nouakchott (Mauritanie) refusant de délivrer à M. B... un visa de long séjour en qualité de conjoint étranger d'une ressortissante française.

Par un jugement n° 2214765 du 31 août 2023, le tribunal administratif de Nantes a annulé cette décision et a enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer de faire délivrer à M. B... un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française dans un délai maximal de deux mois.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 octobre 2023, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 31 août 2023 ;

2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif par M. B... et Mme Sangharé.

Il soutient que :

- à la date du mariage de M. B... avec Mme Sangharé le 9 août 2021, l'intéressé était déjà marié avec Mme A... ; dans l'attente de la décision du Procureur, la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France ne pouvait par suite que rejeter sa demande de visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 mars 2024 M. B... et Mme Sangharé, représentés par Me Rouxel, concluent au rejet de la requête et demandent que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L.761-1 du code justice administrative.

Ils soutiennent que les moyens soulevés par le ministre de l'intérieur et des outre-mer ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code du statut personnel mauritanien ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gélard,

- et les observations de Me Rouxel, représentant M. B... et Mme Sangharé.

Considérant ce qui suit :

1. Par un jugement du 31 août 2023, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision implicite par laquelle la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France a rejeté le recours formé par M. B... et Mme Sangharé contre une décision du 19 juillet 2022 des autorités consulaires françaises à Nouakchott (Mauritanie) refusant de délivrer à M. B... un visa de long séjour en qualité de conjoint étranger d'une ressortissante française. Le tribunal a enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer de faire délivrer à M. B... le visa sollicité dans un délai maximal de deux mois. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer relève appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes des dispositions de l'article L. 312-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le visa de long séjour est délivré de plein droit au conjoint de ressortissant français. Il ne peut être refusé qu'en cas de fraude, d'annulation du mariage ou de menace à l'ordre public. ".

3. Il résulte des dispositions de l'article 171-5 du code civil que la transcription sur les registres de l'état civil français de l'acte de mariage d'un français célébré par une autorité étrangère, qui n'est soumise à aucune exigence de délai, rend la qualité de conjoint opposable aux tiers depuis la date du mariage. L'absence de transcription de cet acte, qui ne prive le mariage d'aucun de ses effets civils entre les époux eux-mêmes ni entre ceux-ci et leurs enfants, fait en revanche obstacle à ce que le mariage soit, dans l'ordre juridique français, opposable aux tiers, notamment aux autorités publiques. Par ailleurs, en application des dispositions précitées de l'article L. 312-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il appartient en principe aux autorités consulaires de délivrer au conjoint étranger d'un ressortissant français, dont le mariage a fait l'objet d'une transcription sur le registre de l'état civil et n'a pas été contesté par l'autorité judiciaire, le visa nécessaire pour que les époux puissent mener une vie familiale normale. Pour y faire obstacle, il appartient à l'administration, si elle allègue une fraude, d'établir que le mariage a été entaché d'une telle fraude, de nature à justifier légalement le refus de visa.

4. D'autre part, aux termes de l'article 76 de la loi n° 2001-052 du 19 juillet 2001 portant code du statut personnel paru au journal officiel de la République islamique de Mauritanie du 15 août 2001 : " L'acte de mariage est enregistré conformément aux dispositions de l'article 65 de la loi n°96-019 du 19 juin 1996 portant code de l'Etat Civil. Sont aussi portées dans l'acte du mariage les mentions suivantes : (...) 2. Les nom et prénom du précédent conjoint de chacun des deux époux, s'il y a lieu, ainsi que les dates du décès ou du divorce ayant entraîné la dissolution de leur mariage (...) ". Par ailleurs aux termes de l'article 100 du même code : " Le divorce est la dissolution du mariage prononcée par le juge dans les conditions prévues au présent code. ".

5. Pour contester le jugement attaqué, le ministre de l'intérieur produit un courrier adressé le 10 août 2022 par l'ambassade de France en Mauritanie à Mme Sangharé, ressortissante française, l'informant de la saisine du procureur de la République de Nantes afin qu'il se prononce sur la validité de son acte de mariage avec M. B..., ressortissant mauritanien, célébré le 9 août 2021. Il se prévaut également de l'extrait d'acte de divorce établi par l'agence nationale du registre des populations et des titres sécurisés de Mauritanie mentionnant que si l'acte de mariage entre M. B... et Mme A..., sa précédente épouse, a été dissous le 10 avril 2020, leur jugement de divorce n'a été prononcé que le 17 août 2022 par le tribunal de Toujounine, soit postérieurement au remariage de M. B.... Par suite, au vu de ces éléments, qui ne sont pas contredits par les intimés, le ministre de l'intérieur et des outre-mer établit qu'à la date de son mariage avec Mme Sangharé, M. B... n'était pas encore divorcé de sa première épouse et se trouvait ainsi en situation de bigamie. Par suite, alors même que le mariage célébré entre M. B... et Mme Sangharé a été transcrit par l'officier de l'état civil du consulat de France en Mauritanie le 3 juin 2022, c'est à tort que le tribunal admiistraif de Nantes s'est fondé sur la méconnaissance des dispositions de l'article L. 312-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour annuler la décision attaquée. Aucun autre moyen dont la cour se trouverait saisie par l'effet dévolutif de l'appel n'a été invoqué par M. B... et Mme Sangharé.

6. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'intérieur et des outre-mer est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France refusant la délivrance à M. B... d'un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française et lui a enjoint de faire délivrer à l'intéressé dans un délai de deux mois le visa sollicité.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à M. B... et Mme Sangharé de la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2214765 du 31 août 2023, par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision implicite de la commission de recours contre les décisions de refus de visa d'entrée en France refusant la délivrance à M. B... d'un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française et a enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer de faire délivrer à l'intéressé, dans un délai de deux mois, le visa sollicité, est annulé.

Article 2 : La requête présentée devant le tribunal administratif de Nantes par M. B... et Mme Sangharé ainsi que leurs conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer ainsi qu'à M. F... B... et Mme C... Sangharé.

Délibéré après l'audience du 22 mars 2024 à laquelle siégeaient :

- M. Gaspon, président de chambre,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 avril 2024.

La rapporteure,

V. GELARDLe président,

O. GASPON

La greffière,

I. PETTON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23NT03053


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NT03053
Date de la décision : 09/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GASPON
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: Mme BOUGRINE
Avocat(s) : ROUXEL

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-09;23nt03053 ?
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