Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Magneto Presse a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 21 septembre 2021 par laquelle le Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) a refusé de lui délivrer une autorisation préalable relative à l'octroi d'une aide financière à la production pour le documentaire " Sylvie et Johnny la fureur de vivre ".
Par un jugement n° 2124981/5-1 du 12 mai 2023, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 17 juillet 2023, la société Magneto presse, représentée par Me Chouraqui, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 12 mai 2023 ;
2°) d'annuler la décision du CNC du 21 septembre 2021 ;
3°) d'enjoindre au CNC, sous astreinte, de lui délivrer l'autorisation préalable d'allocation d'investissement pour le documentaire intitulé " Sylvie et Johnny la fureur de vivre " ;
4°) de mettre à la charge du CNC une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision du CNC est insuffisamment motivée ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 septembre 2024, le centre national du cinéma et de l'image animée conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la société Magneto presse au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par la société Magneto presse ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 29 novembre 2024, la clôture d'instruction a été fixée au
30 décembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du cinéma et de l'image animée,
- le code des relations entre le public et l'administration,
- le règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Bruston,
- les conclusions de Mme Naudin, rapporteure publique,
- et les observations de Me Frölich, représentant le Centre national du cinéma et de l'image animée.
Considérant ce qui suit :
1. Le 30 juin 2021, la société Magneto Presse a sollicité du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC) sur le fondement de l'article 311-26 du règlement général des aides financières annexé au code du cinéma et de l'image animée, l'octroi d'une allocation d'investissement pour son projet de documentaire intitulé " Sylvie et Johnny la fureur de vivre ". Par une décision du 21 septembre 2021, le CNC a refusé de lui attribuer cette aide. La société Magneto Presse relève appel du jugement du 12 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes de l'article D. 311-1 du code du cinéma et de l'image animée : " Les conditions générales d'attribution des aides financières sont fixées par délibérations du conseil d'administration du Centre national du cinéma et de l'image animée dans un document consolidé et dénommé " règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée " (...) ". Aux termes de l'article 311-6 du règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée, dans sa rédaction applicable à la date des décisions contestées : " Les œuvres audiovisuelles éligibles aux aides financières à la production et à la préparation sont des œuvres à vocation patrimoniale qui présentent un intérêt particulier d'ordre culturel, social, scientifique, technique ou économique. / Elles doivent faire l'objet, par les entreprises de production, d'une exploitation durable en cohérence avec leur vocation patrimoniale ". Aux termes de l'article 311-56 du même règlement : " Les entreprises de production ont la faculté d'investir les sommes inscrites sur leur compte automatique pour la production et la préparation des œuvres audiovisuelles qui appartiennent à l'un des genres suivants : (...) 3° Documentaire de création ; (...) ". Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...). ".
3. En premier lieu, la décision du 21 septembre 2021 qui énonce notamment que " le synopsis déroule un traitement factuel et chronologique des grandes étapes du couple à la manière d'une chronique " people ", sans s'appuyer sur une analyse historique ou sociologique de ce couple (...). Cette succession de pastilles ne correspond pas à une démarche documentaire, qui part d'une analyse de la réalité témoignant d'un point de vue original d'auteur, pour proposer un portrait nuancé et avec un point de vue original, mais davantage à une mise en forme strictement informative et factuelle (...) " pour en déduire que l'orientation du programme, clairement descriptive et illustrative, ne lui donne pas vocation à être rediffusé sur le long terme et que
celui-ci présente en outre une insuffisante création originale, est suffisamment motivée.
4. En second lieu, en vertu des dispositions de l'article 311-60 du règlement général des aides financières du CNC alors applicable et de la liste des documents justificatifs figurant en annexe, le CNC devait, pour prendre sa décision, se fonder sur la lecture du résumé du documentaire, de son synopsis et des notes d'intention de la réalisatrice et du co-producteur, et non sur le visionnage du documentaire. Or, si la note des producteurs met en avant la volonté de la réalisatrice de raconter le destin commun de Johnny Halliday et de Sylvie Vartan en prenant le soin " de mêler le récit de deux enfants du siècle et l'évolution de la société française ", et si la note d'intention fait état de leur influence sur leur époque, marquée notamment par la révolution étudiante ou encore la conquête spatiale, il ressort du synopsis, que les auteurs du documentaire, réalisé par la société Magneto Presse, ont fait le choix d'interviewer des personnes décrivant l'histoire du couple formé par Johnny Halliday et Sylvie Vartan, sans mise en perspective particulière, les évènements historiques cités dans la note d'intention n'apparaissant qu'en toile de fond. Les auteurs ont ainsi pris le parti de livrer un récit descriptif et chronologique, sans mise en perspective, ni point de vue et analyse critique, nonobstant les références aux bouleversements historiques et à la pression médiatique subie par le couple, figurant dans la note des producteurs. Dans ces conditions, en retenant que le documentaire en litige ne pouvait être qualifié de documentaire de création à vocation patrimoniale en l'absence de problématisation du sujet avec une mise en perspective critique, le CNC n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation.
5. Il résulte de tout ce qui précède que la société Magneto presse n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur les frais du litige :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du Centre national du cinéma et de l'image animée, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Magneto Presse demande sur ce fondement. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Magneto Presse une somme de 1 500 euros à verser au Centre national du cinéma et de l'image animée au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Magneto presse est rejetée.
Article 2 : La société Magneto Presse versera au Centre national du cinéma et de l'image animée une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent jugement sera notifié à la société Magneto presse et au Centre national du cinéma et de l'image animée.
Délibéré après l'audience du 21 mars 2025, à laquelle siégeaient :
Mme Doumergue, présidente,
Mme Bruston, présidente assesseure,
Mme Saint-Macary, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 avril 2025.
La rapporteure,
S. BRUSTON
La présidente,
M. DOUMERGUELa greffière,
E. FERNANDO
La République mande et ordonne à la ministre de la culture en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 23PA03167 2