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16/04/2025 | FRANCE | N°24PA03530

France | France, Cour administrative d'appel de PARIS, 6ème chambre, 16 avril 2025, 24PA03530


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... C... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 31 janvier 2023 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.



Par un jugement n° 2302233 du 2 juillet 2024, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :



Par une requête, enregistrée le 2 août 2024, Mme C... A..., représentée par Me Leboul, demande à la Cour :



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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 31 janvier 2023 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2302233 du 2 juillet 2024, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 2 août 2024, Mme C... A..., représentée par Me Leboul, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 2 juillet 2024 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 31 janvier 2023 du préfet de Seine-et-Marne ;

3°) d'enjoindre à toute autorité administrative compétente de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de la munir dans l'attente d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de l'absence de traitement disponible dans son pays d'origine ;

- la décision de refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;

- elle n'a pas été précédée d'un examen de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ne comporte pas la signature, lisible, d'un des médecins composant le collège en méconnaissance de l'article L. 212-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle n'a par ailleurs pas été précédée de la consultation de la commission du titre de séjour en méconnaissance du 4° de l'article L. 432-13 du même code ;

- cette décision méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 de ce code ;

- elle méconnaît celles de l'article L. 435-1 dudit code ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les décisions l'obligeant à quitter le territoire dans le délai de trente jours sont illégales en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elles sont entachées d'un défaut de motivation ;

- elles n'ont pas été précédées d'un examen de sa situation personnelle ;

- elles méconnaissent les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elles sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation quant à leurs conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle n'a pas été précédée d'un examen de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle.

La requête a été communiquée au préfet de Seine-et-Marne qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Jayer a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante guinéenne née le 2 février 1992, est entrée en France selon ses déclarations le 3 septembre 2012. A la suite du rejet de sa demande d'asile par une décision du 18 octobre 2013 de l'Office français de la protection des réfugiés et apatrides (OPFRA) confirmée le 19 mai 2024 par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 31 janvier 2023, le préfet de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme A... relève appel du jugement du 2 juillet 2024 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. ".

3. Les premiers juges ont répondu au moyen tiré de l'absence de traitement disponible dans le pays d'origine au point 10 de leur jugement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté comme manquant en fait.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

4. En premier lieu, les moyens tirés de l'insuffisance de la motivation de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour à Mme A..., de l'absence d'examen de sa situation personnelle et d'un vice de procédure entachant la consultation pour avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), doivent être écartés par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article de L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. (...) ".

6. Pour refuser de délivrer à Mme A... le titre de séjour sollicité, le préfet de Seine-et-Marne a notamment fondé son appréciation sur l'avis émis le 5 juillet 2022 par le collège des médecins de l'OFII précisant que, si l'état de santé de l'intéressée nécessite une prise en charge médicale dont le défaut est susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, celle-ci peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé en Guinée. Si Mme A... soutient être dans l'impossibilité d'en bénéficier, elle n'en justifie pas en produisant un certificat médical du 31 mai 2021 d'un médecin de l'AP-HP qui se borne à mentionner qu'il " n'est pas certain qu'une prise en charge adéquate puisse avoir lieu dans le pays d'origine ", au demeurant sans mentionner ce pays ou la nationalité de la patiente. Dès lors, il ne ressort pas des pièces du dossier que les caractéristiques du système de santé guinéen ne permettraient pas à la requérante d'avoir effectivement un accès à son traitement dans son pays d'origine. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le préfet de Seine-et-Marne n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de son refus de titre de séjour sur la situation personnelle de Mme A....

7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 (...) ".

8. Mme A... expose qu'elle réside en France de manière habituelle et continue depuis le mois de septembre 2018, se prévaut de la durée de son séjour, de son intégration personnelle et professionnelle, de sa parfaite maîtrise de la langue française. Elle ne fait cependant pas état de considérations humanitaires et de motifs exceptionnels de nature à justifier son admission au séjour sur le fondement des dispositions précités. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que le préfet de Seine-et-Marne aurait méconnu l'article invoqué et entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant de l'admettre au séjour sur son fondement.

9. En quatrième lieu, aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...) ".

10. Si Mme A... se prévaut des circonstances exposées au point 8, il ressort des pièces du dossier qu'elle est célibataire et sans charge de famille en France et qu'elle n'est pas dépourvue de toute attache familiale dans son pays où réside notamment sa fille, mineure. Dans ces conditions, et compte tenu de l'âge de la requérante à la date de la décision contestée, celle-ci ne peut être regardée comme portant une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale.

11. En dernier lieu, Mme A... n'établit pas sa présence en France entre les mois de janvier et octobre 2018 par la seule production d'un avis d'impôt 2018 pour l'année 2017 établi en son nom ou celui de son concubin en 2018 dès lors que cet avis comporte la mention des revenus d'un seul déclarant. Par suite, le préfet n'était pas tenu de consulter la commission du titre de séjour au titre du 4° de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours :

12. En premier lieu, la requérante n'est fondée à soutenir que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le délai de départ, devraient être annulées par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour.

13. En deuxième lieu, le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation de ces décisions doit être écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

14. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier, et notamment des termes de l'arrêté contesté, que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de Mme A..., la seule circonstance qu'il n'ait pas mentionné certains éléments relatifs à sa situation personnelle n'étant pas de nature à caractériser un défaut d'examen.

15. En quatrième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 6 que, si l'absence de prise en charge médicale de Mme A... est de nature à entraîner pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, celle-ci peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 9° de l'article L. 611- 3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

16. En dernier lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences que les décisions attaquées emporteraient sur la situation personnelle de Mme A..., doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 8 et 10 du présent arrêt.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement :

17. En premier lieu, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement devrait être annulée par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

18. En deuxième lieu, le moyen tirs de l'insuffisance de la motivation de la décision fixant le pays de destination doit être écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

19. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier, et notamment des termes de l'arrêté contesté, que le préfet de Seine-et-Marne a procédé à un examen particulier de la situation personnelle de Mme A....

20. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

21. Mme A... soutient qu'en cas de retour en Guinée, elle serait exposée à des traitements inhumains ou dégradants en l'absence de traitement approprié à son état de santé. Ainsi qu'il a été dit au point 6 du présent arrêt, elle ne démontre toutefois pas que la prise en charge médicale rendue nécessaire par son état de santé ne serait pas accessible dans son pays d'origine. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées et de ce que la décision contestée est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle et médicale de l'intéressée doivent être écartés.

22. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa requête, y compris les conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doit être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 1er avril 2025, à laquelle siégeaient :

- Mme Bonifacj, présidente de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme Jayer, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 avril 2025.

La rapporteure,

M-D. JAYERLa présidente,

J. BONIFACJ

La greffière,

A. LOUNIS

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 24PA03530


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de PARIS
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 24PA03530
Date de la décision : 16/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BONIFACJ
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme NAUDIN
Avocat(s) : LEBOUL

Origine de la décision
Date de l'import : 19/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-16;24pa03530 ?
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