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06/11/2024 | FRANCE | N°52401107

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 06 novembre 2024, 52401107


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


CH9






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 6 novembre 2024








Rejet




M. SOMMER, président






Arrêt n° 1107 FS-B


Pourvoi n° E 23-15.368








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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La société Ateliers Aubert-Labansat, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° E 23-15.368 contre l'arrêt rendu le 16 mars 2023 pa...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CH9

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 novembre 2024

Rejet

M. SOMMER, président

Arrêt n° 1107 FS-B

Pourvoi n° E 23-15.368

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 6 NOVEMBRE 2024

La société Ateliers Aubert-Labansat, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° E 23-15.368 contre l'arrêt rendu le 16 mars 2023 par la cour d'appel de Caen (1re chambre sociale), dans le litige l'opposant :

1°/ à M. [C] [P], domicilié [Adresse 1],

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Pecqueur, conseiller référendaire, les observations de la SCP Françoise Fabiani-François Pinatel, avocat de la société Ateliers Aubert-Labansat, de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. [P], et l'avis de Mme Roques, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 1er octobre 2024 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Pecqueur, conseiller référendaire rapporteur, Mme Capitaine, conseiller doyen, Mmes Lacquemant, Nirdé-Dorail, Palle, conseillers, Mme Valéry, MM. Chiron, Leperchey, conseillers référendaires, Mme Roques, avocat général référendaire, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Caen, 16 mars 2023), M. [P] a été engagé en qualité de charpentier menuisier le 5 juillet 1995 par la société Ateliers Aubert-Labansat. Le 12 septembre 2016, il a été victime d'un accident du travail.

2. Déclaré inapte à son poste le 3 septembre 2018, il a été licencié le 16 octobre 2018 pour inaptitude et impossibilité de reclassement et a saisi la juridiction prud'homale.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en ses deux premières branches

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en ses quatre dernières branches

Enoncé du moyen

4. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et de le condamner au paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi qu'aux frais de procédure, alors :

« 3°/ qu'aux termes de l'article L. 1226-10 du code du travail résultant de l'ordonnance du 22 septembre 2017, lorsque le salarié est déclaré inapte à occuper son poste, l'employeur doit lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel il appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel ; que la notion de groupe désigne le groupement formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce ; que dès lors qu'il existe une contestation sur l'existence d'un groupe de reclassement et/ou sur son périmètre, les juges du fond doivent former leur conviction au vu de l'ensemble des éléments qui leur sont soumis par les deux parties ; qu'en retenant, pour conclure à l'existence d'un groupe de reclassement, que la société n'apportait aucun élément réfutant son existence, la cour d'appel a fait peser sur l'employeur seul la charge de la preuve de l'existence du groupe, de son périmètre et des relations capitalistiques liant les sociétés qui l'auraient composé et a violé en conséquence l'article susvisé ainsi que l'article L. 2331-1 du code du travail ;

4°/ que les juges du fond ne peuvent retenir l'existence d'un groupe capitalistique de reclassement sans avoir caractérisé l'existence d'une influence dominante d'une société sur une autre ; qu'en concluant à l'existence d'un tel groupe sans indiquer qui, de la société Ateliers Aubert-Labansat et de la société Maisons d'Histoire, aurait été la société dominante de ce groupe, ni comment se caractériserait cette domination au regard des critères de l'article L. 2331-1 du code du travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-10 dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 22 septembre 2017 et de l'article L. 2331-1 du code du travail ;

5°/ que si la permutabilité n'est plus une condition suffisante à la reconnaissance d'un groupe de reclassement, elle n'en est pas moins une condition nécessaire ; qu'en concluant de l'existence d'un groupe capitalistique l'existence d'un groupe de reclassement, sans rechercher si les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation des deux sociétés qui le composaient permettaient d'y effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1226-10 du code du travail dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 22 septembre 2017 ;

6°/ que la charge de la preuve d'une possibilité de permutation du personnel entre les sociétés d'un groupe n'incombe à aucune des parties en particulier ; qu'en retenant, pour conclure à l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, que la société Ateliers Aubert-Labansat n'aurait pas établi que le permutation du personnel était impossible quand M. [P] n'avait produit strictement aucun élément justifiant d'une telle possibilité entre son employeur, spécialisé dans les charpentes, menuiserie et ébénisterie, et la société de maçonnerie Maisons d'Histoire, la cour d'appel a violé l'article L. 1226-10 dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 22 septembre 2017. »

Réponse de la Cour

5. Si la preuve de l'exécution de l'obligation de reclassement incombe à l'employeur, il appartient au juge, en cas de contestation sur l'existence ou le périmètre du groupe de reclassement, de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments qui lui sont soumis par les parties.

6. La cour d'appel a d'abord constaté que le salarié faisait valoir que la recherche de reclassement aurait dû s'étendre à toutes les sociétés détenues par la holding Gilathelo Investissements et notamment à la société Maisons d'Histoire faisant, selon lui, partie du même groupe et que l'employeur produisait un document d'une page établi par son expert-comptable, dont il ressortait que la société employeur était détenue à 100% par la société le Vaudome, elle-même détenue par la société Gilathelo Investissements à 18,51% et détenait 36,6% dans la société Maisons d'Histoire conjointement avec M. [G], actionnaire majoritaire à 54,4%.

7. Elle a ensuite relevé qu'aucun organigramme des différentes sociétés liées à la holding Gilathelo Investissements n'était produit empêchant de vérifier si, au sein de cet ensemble de sociétés, n'existait pas une entreprise dominante au sens des articles précités, que les informations relatives à la détention du capital des différentes sociétés étaient parcellaires et estimé que l'employeur avait choisi de ne pas fournir ces informations essentielles, alors qu'il était le seul à pouvoir le faire.

8. Elle a enfin relevé que selon les dires non contredits du salarié, la société Ateliers Aubert-Labansat et la société Maisons d'Histoire étaient domiciliées sur le même site et effectuaient des chantiers en commun et que l'employeur n'établissait ni ne soutenait que la permutation du personnel entre ces deux sociétés était impossible.

9. Ayant ainsi fait ressortir que l'employeur n'apportait pas d'éléments suffisants pour déterminer le périmètre du groupe au niveau duquel devait être apprécié le reclassement, la cour d'appel, qui a procédé aux recherches prétendument omises, a pu en déduire, en l'état des éléments qui lui étaient soumis tant par l'employeur que par le salarié et sans méconnaître les règles relatives à la charge de la preuve, que l'employeur ne justifiait pas avoir satisfait à son obligation de reclassement dans un périmètre pertinent.

10. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Ateliers Aubert-Labansat aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Ateliers Aubert-Labansat et la condamne à payer à M. [P] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six novembre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52401107
Date de la décision : 06/11/2024
Sens de l'arrêt : Rejet

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Maladie - Accident du travail ou maladie professionnelle - Inaptitude au travail - Obligation de reclassement - Obligation de l'employeur - Proposition d'un emploi adapté - Périmètre de l'obligation - Groupe de sociétés - Groupe de reclassement - Périmètre - Preuve - Charge - Office du juge - Détermination - Portée

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Cause - Accident du travail ou maladie professionnelle - Inaptitude physique du salarié - Obligation de reclassement - Périmètre de l'obligation - Groupe de sociétés - Groupe de reclassement - Périmètre - Preuve - Charge - Office du juge - Détermination - Portée

Si la preuve de l'exécution de l'obligation de reclassement incombe à l'employeur, il appartient au juge, en cas de contestation sur l'existence ou le périmètre du groupe de reclassement, de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments qui lui sont soumis par les parties. En conséquence, ne méconnaît pas les règles de la charge de la preuve relatives au périmètre du groupe de reclassement, la cour d'appel qui, appréciant les éléments qui lui étaient soumis tant par l'employeur que par le salarié, a constaté que l'employeur n'avait fourni que des informations parcellaires sur la détention du capital de sociétés dont le salarié alléguait qu'elles faisaient partie d'un groupe et a fait ressortir que la permutation du personnel était possible, ce dont elle a déduit que l'employeur ne justifiait pas du respect de son obligation de reclassement


Références :

Article L. 1226-10 du code du travail, dans sa rédaction issue des ordonnances n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 et n° 2017-1718 du 20 décembre 2017.
Publié au bulletin

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 16 mars 2023

Sur la charge de la preuve relative au périmètre du groupe de reclassement, à rapprocher : Soc., 30 septembre 2020, pourvoi n° 19-13122, Bull., (rejet)

arrêt cité ;

Soc., 31 mars 2021, pourvoi n° 19-17303, Bull., (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 06 nov. 2024, pourvoi n°52401107


Composition du Tribunal
Président : M. Sommer
Avocat(s) : SCP Fabiani - Pinatel, SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 19/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52401107
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